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Haute-Savoie : faute de moyens, 150 personnes en situation de handicap renvoyées dans leurs familles

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 Photo d'illustration.

Crédit photo Julie Franchet / Studio Hans Lucas / AFP
Handicap - Alors qu’une mobilisation nationale s’organise pour dénoncer le manque de moyens humains dans les métiers des secteurs social et médico-social, la fédération Unapei révèle une situation de crise déjà bien engagée. Démissions de nombreux professionnels, fermeture de services, appels aux bénévoles pour assurer la continuité des soins… Le secteur périclite face aux effets concrets des décisions du Ségur de la santé.

« La situation est catastrophique. Il nous manque, au bas mot, 125 postes en contrat à durée indéterminée à temps plein. Depuis quelques mois, nous fermons des services, des unités, et nous avons renvoyé des personnes en situation de handicap dans 150 familles», témoigne Raphaël Miconnet, directeur général de l’association Epanou et représentant des associations membres de la fédération Unapei en Haute-Savoie et de l’association des infirmes moteurs cérébraux du département.

Alors qu’une mobilisation nationale des professionnels des secteurs social et médico-social a eu lieu le 6 octobre pour dénoncer le faible niveau de rémunération des professionnels et le manque d’attractivité qui en résulte (lire notre article), plusieurs associations ont déjà dû stopper l’accompagnement proposé, faute de solutions.

A l’origine de cette situation, l’iniquité engendrée par la décision gouvernementale, via le Ségur de la santé, d’une augmentations de salaire de 183 € net qui n’a concerné qu’un certain nombre de professionnels relevant du secteur public. Laissant ainsi pour compte, avec un fort sentiment de mépris, les salariés des établissements privés du champ du handicap.

Ainsi, infirmiers, aides-soignants, éducateurs, moniteurs-éducateurs ou chargés de logistique quittent leurs structures, pour lesquelles les possibilités de recrutement deviennent, dans ce contexte, extrêmement limitées.

Attractivité en berne

« Depuis le début de l’été, nous ne recevons plus de CV, peu importent le poste concerné, l’établissement ou le périmètre géographique du département. Il en est de même en Savoie. Avant la crise sanitaire liée à la Covid-19, nous étions quasiment en situation de plein emploi », confie Raphaël Miconnet. Pour éviter la fermeture d’établissements, les solutions sont fragiles : embauche difficile de personnes intérimaires non qualifiées, rappel de personnels en congés ou heures supplémentaires pour les salariés en activité.

Contacté par la rédaction des ASH, le conseil départemental de Haute-Savoie indique que « les revendications sur la demande à l’Etat de la revalorisation des salaires de la fonction publique sont légitimes. Le conseil départemental défend la reconnaissance de la prime à la vie chère » sur son territoire. « En ce qui concerne la part qui revient au département et qui ne pourrait intervenir qu’en janvier 2022 selon les termes de la loi, comme annoncée à tous les acteurs, la décision sera prise sur le budget 2022 conformément à la loi. »

Si la Haute-Savoie pâtit d’un coût de la vie élevé et d’un manque d’attractivité accentué du fait de la proximité avec la Suisse, où de nombreux professionnels préfèrent exercer, le reste de la France n’est pas épargné. En atteste, par exemple, la baisse générale du nombre d’élèves inscrits en centres de formation spécialisée.

Dans les Hauts-de-Seine, faute de personnel, des familles commencent à accueillir leur proche en situation de handicap. En Loire-Atlantique, l’Adapei 44 lance un appel au bénévolat pour encadrer certaines activités ; et, à Nantes, des aidants retraités organisent des tournées pour aller nourrir des personnes en situation de handicap.

Irrespect des droits fondamentaux

« Partout, les voyants sont au rouge. C’est un bond de soixante ans en arrière. Actuellement, même les zones rurales telles que le Périgord, épargnées jusqu’à présent, subissent le phénomène. Et aucun engagement n’est intégré au PLFSS » [projet de loi de financement de la sécurité sociale], fustige Marie-Aude Torres Maguedano, directrice exécutive de l’Unapei.

Les choix qui s’imposent impliquent donc aussi le soutien logistique et technique de personnes sans formation, ce qui nuit à la qualité de l’accompagnement et engendre, pour de nombreux professionnels, des questionnements relatifs à la sécurité ou à la responsabilité auxquelles les structures se sont engagées envers leurs bénéficiaires.

« Il ne faut pas négliger l’épuisement des professionnels. Je n’ai jamais eu un tel niveau d’inquiétude. Il faut que, a minima, des revalorisations salariales soient engagées et alignées sur celles prévues par le Ségur de la santé. Sans investissement, l’amélioration est impossible. Le regard sur nos métiers et sur les problématiques du public doit changer. La décision du gouvernement déterminera si, pour lui, la société du “prendre soin” est importante », pointe Marie-Aude Torres Maguedano.

Pour sa part, le cabinet de Sophie Cluzel, secrétaire d’Etat aux personnes handicapées, n’a pas répondu à nos sollicitations.

 

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