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Précarité : le service public de l’insertion et de l’emploi se développe

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Two businessmen handshaking in meeting after final project agreement deal done.

Photo d'illustration 

Crédit photo Adobe Stock
Alors que 14 territoires expérimentent déjà le service public de l’insertion et de l’emploi, le gouvernement annonce son extension à 65 territoires en 2021 et 2022. Ce dispositif vise à améliorer la prise en charge des personnes éloignées de l’emploi par le travail conjoint de différents acteurs. Il est plébiscité par ceux qui s’en saisissent en raison des possibilités d’adaptations locales qu’il permet.

Le service public de l’Insertion et de l’emploi (SPIE), déjà expérimenté dans 14 territoires, se déploie. Au terme de la concertation nationale organisée en novembre dernier par un comité de pilotage, le gouvernement annonce deux appels à manifestations d’intérêt (AMI) pour sélectionner les nouveaux candidats : un premier a été lancé le 16 décembre pour la sélection de 30 territoires en mars prochain et le second s’ouvrira à 35 territoires supplémentaires en 2021.

Le dispositif, qui dépend de la stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté et dont les premières concertations ont eu lieu fin 2019,  vise à mieux articuler les actions entre les professionnels des structures qui accompagnent les personnes éloignées de l’emploi, particulièrement les allocataires du revenu de solidarité active (RSA). La prise en charge personnalisée et l’accompagnement global (social, juridique, santé, logement) en sont les fers de lance pour endiguer le cloisonnement du modèle. La personne accompagnée doit, quant à elle, participer activement à son parcours d’insertion professionnelle. Une évaluation sur la situation globale de la personne doit être posée dès le départ. « Le dispositif doit offrir un meilleur accès au droit et à l’accompagnement des personnes pour éviter les actions incohérentes. Il s’agit d’équilibrer la liberté donnée aux territoires pour s’organiser avec ses partenaires par le biais d’un travail collectif large (associations, missions locales, départements, entreprises,…). Dans le cas contraire, cela exclurait les personnes en grande difficulté », explique Alexis Goursolas, responsable du service « stratégie et analyse des politiques publiques » pour la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS) et membre du comité de pilotage national des ateliers territoriaux du SPIE.

Multiplicité des modèles d’action et de gouvernance

Si, pour l’heure, un bilan des premières expérimentations est précoce au regard du retard de leur mise en œuvre en raison de la crise liée au Covid-19, les territoires concernés plébiscitent leur raison d’être. La possibilité d’organiser l’accompagnement en fonction des enjeux et des problématiques locales est un atout dont ils se saisissent. Par exemple, le département du Nord qui a coporté le projet avec Pôle emploi, mise sur un ciblage géographique très opérationnel et précis au travers de différentes actions. Ce territoire, qui compte 25 000 jeunes de moins de 30 ans sans qualification, souhaite accompagner 250 jeunes ménages de Roubaix et de Tourcoing en tenant compte, par exemple, des freins liés au logement ou au mode de garde. Par ailleurs, dans l’Avesnois, le département intervient dans la sphère de l’insertion par l’activité économique (IAE) pour assurer aux salariés en fin de contrat un travail dans le secteur marchand. La création d’un dossier unique d’insertion pour 5 000 allocataires nordistes est aussi testé.

Lieux uniques d'accompagnement

Pour la métropole de Lyon, l’un des enjeux majeurs est la création d’un portail numérique de l’insertion pour diffuser les offres de service. « Les conseillers d’insertion professionnelle connaissent certains acteurs, mais pas tous. L’idée est que les bénéficiaires puissent s’en saisir aussi », indique Christophe Lafoux, directeur de l’insertion et de l’emploi pour la métropole. D’autres exemples témoignent de la pluralité des choix dans la Somme, où vont être créés des lieux uniques d’accompagnement ainsi qu’un système d’information global. « C’est à l’administration de s’adapter à l’usager. Actuellement, les bénéficiaires disposent d’un dossier différent dans chaque lieu d’accompagnement », déplore Emmanuelle Augros, directrice de cabinet du président du conseil départemental de la Somme.  La Seine-Saint-Denis choisit, quant à elle, de se focaliser sur la filière de la construction et du bâtiment afin de répondre aux besoins liés au projet régional d’aménagement du Grand Paris et des Jeux Olympiques de 2024, qui implique la création de 10 000 emplois d’ici à 2022.

Groupements d’intérêt public, commissions locales, comités de pilotage… En matière de gouvernance, les modalités choisies sont également multiples. « C’était un enjeu très fort. Nous portons le projet avec la Direccte [direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi] et avec Pôle emploi, qui se décline avec une équipe inter-rganisationnelle de 100 référents. Les entreprises concernées font partie de notre comité stratégique. Leur implication dans un dispositif public est nouveau et nous devons maintenir leur implication et celle des conseillers emploi », indique Anne-Sophie Casteigt, directrice ajointe à la direction de l’emploi, de l’insertion et de l’attractivité territoriale du département de Seine-Saint-Denis. Pour leur part, la métropole de Lyon privilégie une gouvernance collégiale et le Nord s’appuie sur le recrutement d’un coordinateur SPIE et sur la direction régionale de Pôle emploi.

Si ces premières expérimentations offrent une grande liberté aux territoires, certains acteurs s’interrogent sur la finalité du déploiement du dispositif sur 65 nouveaux territoires ces deux prochaines années. L’émergence d’un service national est redoutée. « Je me questionne sur cette précipitation. Le but est d’expérimenter et de voir ce qui fonctionne. Cela permet d’oser et de faire autrement. De plus, la nouvelle version de l’AMI est différente de la nôtre, notamment en matière de critères d’évaluation. Le premier cahier des charges était plus ouvert », remarque Pascal Fuchs, adjoint au directeur général adjoint en charge des solidarités pour le département du Nord.

Liberté territoriale

Sur ces questions-là, le cabinet de Brigitte Klinkert, ministre déléguée chargée de l’insertion pour le ministère du Travail, de l’Emploi et de l’Insertion, est formel. Il indique que « la concertation a émis des recommandations qui peuvent être mises en place sans attendre […]. Les expérimentations ont été lancées sur des objectifs plus larges. Elles ont permis d’identifier les types de modalités que les territoires pouvaient proposer pour renforcer leur coordination et l’efficacité des parcours ». Il précise par ailleurs qu’il ne s’agit pas de créer un service à la manière d’une nouvelle structure ni de créer un service « par le haut », mais d’un soutien aux démarches des territoires. L’importance du cadre fixé par l’Etat fait en revanche l’unanimité, bien que certains acteurs soient en attente de visibilité sur la façon dont le SPIE peut s’incarner. « Des outils nationaux tels que des grilles de diagnostics, des informations écrites ou par le biais de vidéos concernant les droits et les devoirs des bénéficiaires et le partage de données entre territoires vont être mis à disposition », annonce Alexis Goursolas.  

Pour finir, un point noir subsiste pour le SPIE : la mise en place du revenu universel d’activité (RUA), dont personne ne sait s’il verra le jour et qui était prévu au départ comme le pendant du dispositif. Alors que la France compte 11 allocations différentes, le passage d’un parcours à l’autre crée parfois des ruptures financières considérables. « Avec le RUA, ces questions-là seraient gommées. L’accompagnement et le versement de prestations décentes sont liés. Si on sécurise les gens sur l’aspect financier, ils se remobilisent beaucoup plus facilement », indique Anne-Sophie Casteigt. Pour sa part, Emmmanuelle Augros est plus méfiante. « Il s’agit d’un enjeu de simplification qu’on ne peut que soutenir. Mais sans information concernant ses modalités de financement, qui pourraient dépendre de l’Etat comme des départements, nous ne préférons pas nous prononcer pour l’instant », indique-t-elle. Quoi qu’il en soit, l’alternative reste le revenu de solidarité active. « Il n’y a plus d’espace pour une réforme des minima sociaux. Le niveau du RSA est trop faible. Il faut aller au-delà des aides ponctuelles, le revaloriser et l’ouvrir aux 18-25 ans. Il faut être conscient de la situation, proposer aux personnes toutes les possibilités d’emploi, mais en aucun cas elles n’ont à payer la crise sanitaire et sociale en étant contraintes sur les ressources », conclut le responsable du service « stratégie et analyse des politiques publiques » de la FAS.

 

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