Basé sur une quarantaine de saisines reçues depuis 2010 et sur les auditions d’associations et d’experts européens, l'avis du contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) sur la prise en charge des personnes transgenres, publié au Journal officiel le 6 juillet, propose d'améliorer l'accueil et l'accompagnement de ce public.
Systématiser l’écoute
Parmi les pistes, l’importance de formaliser, pour chaque arrivée en détention, une consultation avec la personne afin qu’elle exprime ses craintes en matière de sécurité et, surtout, qu’elle puisse, si elle le souhaite, dévoiler sa transidentité. En effet, cette dernière n’est pas identifiable par l’administration si le dossier n’en fait pas mention.
« Souvent, la transidentité n’est révélée que lorsque la personne est sommée de se dénuder. Des fouilles seraient parfois réalisées dans le seul but d’établir les caractéristiques sexuelles de la personne. Cette pratique constitue une atteinte grave à la dignité […] Les fouilles par palpation ou à nu menées dans le but d’identifier le sexe anatomique doivent être proscrites », indique le CGLPL.
Dans les locaux relevant du ministère de la Justice, le choix du lieu de prise en charge étant fondé majoritairement sur le genre, il apparaît essentiel que les personnes transgenres puissent indiquer la civilité et le prénom selon lesquels elles souhaitent être désignées. De la même manière, elles doivent pouvoir être placées en cellule individuelle et pouvoir faire part, dès leur arrivée, des catégories de professionnels avec lesquelles elles souhaitent partager leur transidentité afin que le secret professionnel puisse être garanti.
Mesures de protection inadaptées
De plus, la majorité des personnes transgenres est incarcérée dans des établissements ou quartiers qui ne correspondent pas à leur identité de genre. Pour les protéger du risque d’agression, les mesures prises par l’administration pénitentiaire mèneraient vers leur invisibilisation. « Elles sont fréquemment placées au quartier d’isolement ou dans les secteurs particuliers lorsqu’ils sont vides d’autres occupants ou peu utilisés, ce qui réduit, voire supprime, leurs possibilités de contacts humains et d’accès au travail, à l’activité physique, à des soins adaptés. Cette situation peut conduire à une dégradation de leur santé psychique, voire les mener au suicide », alerte le CGLPL qui rappelle que l’isolement au seul motif de la transidentité doit être mis en place en dernier recours.
Parmi les autres dysfonctionnements, le rapport pointe le manque de formation des professionnels de ces lieux, contraints de se former par eux-mêmes. « Si l’approche du personnel se veut empreinte de bon sens et respectueuse des règles, la prise en charge qu’il dispense aux personnes transgenres est en réalité souvent attentatoire à leurs droits fondamentaux. »
Pour y remédier, le contrôleur général des lieux de privation de liberté recommande d’inclure, dans les formations initiales des professionnels, des modules approfondis relatifs aux discriminations subies par les minorités de genre et plus particulièrement sur les risques d’auto-agressions ainsi que sur la prévention du suicide.
Pour finir, en raison de l’exposition de ce public aux troubles dépressifs, aux conduites addictives, au sans-abrisme ainsi qu’aux mesures de privation de liberté, l’autorité administrative indépendante préconise que des études soient menées et financées par les pouvoirs publics.
Concernant le rapport, pour l’heure, des observations des ministres de l’Intérieur, de la Justice ainsi que des Solidarités et de la Santé sont attendues.