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Les dépenses sociales dans le viseur de l’IGF et de l’Igas

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Les deux rapports remis par l'Igas et l'IGF préconisent 1,8 milliard d'euros d'économies sur le budget "travail-emploi" et 1,5 sur la formation professionnelle et l'apprentissage

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IAE, emplois aidés, apprentissage, formation des chômeurs… Tout à sa recherche d’économies pour engager son budget 2025, l’Etat s’apprête à cibler tous azimuts. L’Igas et l’IGF, dans deux rapports sortis récemment, viennent de lui apporter des cartouches pour tailler dans les dépenses d’emploi, d’insertion et de formation.

Ce n’est pas la feuille de route budgétaire pour le prochain locataire de Bercy… mais ce dernier, quel(le) qu’il(elle) soit, pourrait y trouver des sources d’inspiration. Car alors que le dépôt du projet de loi de finances pour 2025, attendu pour le 1er octobre, a pris un mois de retard et que la France est placée sous la surveillance budgétaire de l’Union européenne après avoir largement dépassé le plafond de son déficit public autorisé, deux rapports réalisés conjointement par les inspections générales des finances (IGF) et des affaires sociales (Igas) viennent offrir des pistes au gouvernement pour réduire la voilure de la dépense publique.

Commandées par l'ancienne Première ministre Elisabeth Borne en 2023, ces deux revues de dépenses, qui s’inscrivaient respectivement dans le cadre de la mise en place de la réforme France travail et de l’évaluation des politiques de soutien à la formation professionnelle et à l’apprentissage, émettent une série de recommandations visant à réaliser des économies de 1,8 milliard d’euros sur la mission « travail et emploi » du budget de l’Etat et de 1,5 milliard sur les aides à la formation et à l’alternance.

Et le prochain gouvernement pourrait s'appuyer sur ces mesures afin de ramener en dessous de 3 % du PIB le niveau d’un déficit public, qui s’est envolé au dessus de 5,1 % cette année et pourrait frôler les 5,6 % selon les prévisions des experts.

L’IAE amputée de 226 millions

Premier chantier ouvert par les deux corps d’inspection, celui du soutien à l’emploi et à l’accompagnement des demandeurs d’emploi. Dans leur rapport, l’IGF et l’Igas préconisent un changement de braquet pour créer des passerelles entre les différents dispositifs destinés aux personnes les plus éloignées de l’emploi (contrat d’engagement jeunes, territoires zéro chômeur de longue durée, emplois francs, insertion par l’activité économique, etc.) dans le cadre de « parcours successifs de rapprochement vers l’emploi ». Des parcours plus cohérents… mais aussi plus économiques.

Car en la matière, les coups de rabot sont au programme. En premier lieu sur l’insertion par l’activité économique (IAE) pour laquelle les inspecteurs préconisent une révision à la baisse du nombre de postes programmés sur la période 2025-2027. Sur les 125 784 contrats prévus par la loi de programmation des finances publiques (LPFP), l’Igas et l’IGF n’en retiennent que 110 500. Economies prévues : 226 millions sur 2025 ; 525 millions sur 2025-2027.

Sur le même sujet: Coupes budgétaires : l’IAE tire la sonnette d’alarme

Les entreprises adaptées dans la ligne de mire

Les entreprises adaptées seraient également mises à contribution à hauteur de 51 millions via une dégressivité de l’aide au poste au bout de cinq ans dans la structure – fixée en 2024 à 17 877 € pour les travailleurs âgés de moins de 50 ans ; 18 108 € pour les 50-55 ans et 18 574 € pour les plus de 56 ans. Et par un resserrement du « droit d’entrée » dans le dispositif : aujourd’hui ouvert à tous les bénéficiaires de l’allocation aux adultes handicapés (AAH), il serait réservé exclusivement à ceux qui ne peuvent s’intégrer sur le marché du travail ordinaire pour limiter les effets d’aubaine.

A lire: Entreprises adaptées: deux dispositifs expérimentaux pérennisé

Coup de rabot sur les emplois aidés et les CEJ

Autres sources d’économies, les différents types de contrats aidés, qu’il s’agisse des contrats uniques d’insertion (CUI), parcours emplois compétences (PEC), contrats d’engagement jeunes (CEJ) ou emplois francs pour lesquels, là encore, les inspecteurs suggèrent de réduire la voilure.

Pour les emplois aidés, cette révision à la baisse passerait à la fois par une réduction du nombre de contrats financés – de 60 000 prévus, ils passeraient à 55 000 pour l’année à venir – et par une moindre prise en charge horaire de leurs coûts, pour un total de 156 millions d’euros. Côté CEJ – qui a remplacé la Garantie jeunes en 2021 –, 67 millions pourraient rester dans les caisses de l’Etat en restreignant les critères d’entrée dans le dispositif, en réservant le plafond maximal de l’allocation (552,29 € par mois) aux seuls jeunes les plus éloignés de l’emploi ou en fléchant 25 % des futurs signataires d’un contrat d’engagement jeunes vers un autre dispositif d’insertion, le parcours d'accompagnement contractualisé vers l'emploi et l'autonomie (PACEA) dont l’aide financière est plafonnée à 300 € mensuels.

Quant aux emplois francs, réservés aux jeunes des quartiers de la politique prioritaire de la ville (QPV), leur coût pourrait être amoindri de 53,2 millions en réduisant la prime à l’embauche qui leur est associée (5 000 € sur trois ans pour les entreprises) et en réduisant leur nombre programmé en 2024.

Les emplois TZCLD rognés

Serrage de vis également recommandé pour l’expérimentation « Territoires zéro chômeur de longue durée » (TZCLD). Dans le scénario des deux inspections, 28 millions pourraient être économisés dès septembre 2025 en réduisant le montant du complément temporaire d’équilibre (CTE), cette compensation versée aux entreprises à but d'emploi (EBE) qui ne parviennent pas à boucler leur budget annuel, mais aussi en rognant sur le nombre d’emplois financés qui passerait de 4 400 à un nombre réduit compris entre 3 000 et 3 200 sur la période 2025-2027.

>>> La réponse de Laurent Grandguillaume, président de TZCLD: "On s'en prend à l'ensemble des entreprises d'insertion"

L’apprentissage au régime sec

Objet du second rapport, la formation professionnelle serait également mise au régime sec. Les contrats d’apprentissage, en premier lieu, dont les niveaux de prise en charge (NPEC), déjà réduits d’environ 7,5 % en moyenne, ont connu une très récente baisse de 15 %, doublé d’un plafonnement à 12 000 €, en juillet dernier pour tous les contrats d’un niveau de qualification supérieur à Bac + 3.

Une décision déjà présentée comme une mesure budgétaire dans le programme d’économies annoncé pour 2024 par Bruno Le Maire et qui fait peser des risques sur un certain nombre de diplômes du travail social comme celui d’animateur socio-éducatif, d’éducateur spécialisé ou de conseiller en économie sociale et familiale.

Toutefois, les aides à l’embauche d’apprentis (6 000 €) n’avaient pas été impactées cette année alors que les primes pour les contrats de professionnalisation, d’un montant équivalent, avaient été supprimées au mois de mai dernier.

Sur le même sujet: La prise en charge des contrats d’apprentissage à nouveau rabotée au 15 juillet

Mais, en suivant les recommandations de l’Igas et de l’IGF, un nouveau tour de vis pourrait être donné. Non seulement parce que les inspecteurs recommandent une nouvelle baisse des NPEC à hauteur de 150 millions « maximum » dès 2024. Mais aussi parce qu’ils envisagent, afin de réduire la facture annuelle de France compétences (9,8 milliards), une « refonte systémique » de cette prise en charge. Selon ce scénario, l’investissement de l’Etat dans le soutien aux diplômes par apprentissage de niveau6 (licence) ou 7 (master) – soit 35 % du total des contrats d’apprentissage – serait réduit respectivement de 20 % et de 10 %, laissant le reste à la charge des branches et de leurs entreprises adhérentes, pour une économie estimée de 620 millions d’euros.

Cette réforme s’accompagnerait d’une révision à la hausse de la contribution supplémentaire à l’apprentissage (CSA) à laquelle sont soumises les entreprises de plus de 250 salariés. Son produit pour les caisses de l’Etat passerait de 46 à 93 millions d’euros.

Pour compléter: Apprentissage : une réduction des primes à l’embauche pourrait plomber la dynamique de recrutement dans le médico-social

Impôt sur le revenu pour les apprentis

Plus dur encore, les jeunes apprentis pourraient être mis à contribution, avec la soumission de leur rémunération à l'impôt sur le revenu (IR) et à la CRDS, « tout en pratiquant un abattement sur leur base ressources pour éviter les pertes de droits sociaux ». Gains espérés : 459 millions d’euros pour l’IR ; 64,6 millions pour la CRDS.

En outre, le seuil d’exonération des cotisations salariales de leurs rémunérations pourrait être ramené de 0,79 Smic à 0,5 Smic. Si, selon les calculs de l’Igas et de l’IGF, la perte de salaire pour un jeune ne serait que de 19 € par rapport à 2023, le gain pour l’Etat pourrait, lui, se monter à 229 millions d’euros.

200 millions d'économies sur la formation des chômeurs

La formation des chômeurs, dont la dépense a doublé entre 2018 et 2022, portée par l’augmentation des formations collectives et des formations au poste, pourrait également faire les frais de cette recherche éperdue d’économies.

Si les inspecteurs recommandent toutefois de « circonscrire » les économies à réaliser sur ce pôle de dépenses, ils n’en suggèrent pas moins une « rationalisation » des dispositifs qui pourrait rapporter entre 180 et 200 millions à l’Etat : centrer les dépenses sur les formations individuelles, réduire la prise en charge de la formation distantielle, limiter les achats de France travail aux seules actions de formation conventionnées (AFC), restreindre les dotations d’Etat pour le financement des préparations opérationnelles à l’emploi collectives, multiplier les co-financements entre Opco et France travail pour les préparations opérationnelles à l’emploi individuelles, inciter les demandeurs d’emploi à mobiliser prioritairement leur compte personnel de formation, etc.

 

 

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