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Mathieu Klein veut « remettre en chantier le Livre blanc »

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Le maire de Nancy et président du Haut Conseil du travail social, en marge de la première journée du congrès de la FAS.

Crédit photo Pascal Bastien / ASH
Non, le Livre blanc n’est pas mort. C’est Mathieu Klein, l’homme qui l’a remis à un lointain gouvernement d’avant les remaniements et les dissolutions, qui l’affirme. Il s’exprimait en marge du congrès du travail social de la FAS, qui se déroule les 24 et 25 septembre à Nancy.

« Merci d’avoir choisi Nancy. La ville est en chantier… comme le travail social ! » C’est par ces mots que Mathieu Klein a ouvert le congrès de la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS) ce 24 septembre 2024. Le président du Haut Conseil du travail social (HCTS) et maire de Nancy accueille les journées du travail social de la FAS : tout un symbole qu’a tenu à souligner l’édile en faisant appel à l’histoire. « Nous sommes un territoire humaniste », a-t-il précisé. « Le duché de Lorraine était un petit ilot » qui « offrait l’asile intellectuel » aux philosophes des Lumières.

Aujourd’hui, la ville accueille 1 200 travailleurs sociaux. « Je n’ai jamais vu le principal amphithéâtre du centre des congrès aussi rempli qu'aujourd’hui ! », souligne Mathieu Klein avec satisfaction. Le président du HCTS, c’est aussi l’homme qui a remis le Livre blanc du travail social, en décembre 2023, à Aurore Bergé alors ministre de la Solidarité. On n’a pas manqué de lui en demander des nouvelles dans l’amphithéâtre… et dans cette interview.

ASH : Les préconisations du Livre blanc sont-elles toujours d’actualité avec le nouveau gouvernement ?

Mathieu Klein : Elles sont plus que jamais d’actualité. Certaines ont déjà commencé à avoir un début de réalisation. Je pense par exemple à la perspective de la création de l’Institut national du travail social, à la question du travail sur la convention collective unique avec des moyens pour financer une revalorisation salariale des travailleurs sociaux ou encore à l’extension du Ségur à tous les personnels concernés pendant la crise sanitaire.

Le Livre blanc porte avant tout un message. Un vrai cri d’alerte aux pouvoirs publics sur la crise profonde que traverse le travail social en raison des enjeux d'attractivité. Ce sont des métiers qui ont des problèmes de rémunération qu’il faut traiter au fond. Tout comme la question de l’organisation du travail, de sa débureaucratisation, la question de l’accès aux droits des personnes accompagnées… Quelques-unes de ces recommandations, il y en a 14 en tout, sont encore pleinement d’actualité. D’ailleurs, puisque le nouveau ministre des Solidarités est maintenant nommé, je vais demander à le rencontrer le plus rapidement possible pour mettre en chantier la suite du Livre blanc.

Les coupes budgétaires probables ne rendent-elles pas impossible toute action concrète ?

La question aujourd’hui des moyens est évidemment première, on le voit dans la mise en œuvre de l’extension du Ségur. Les départements font face à de graves difficultés financières en raison de l’effondrement des droits de mutation et des frais de notaires dans leurs recettes. Il n’est pas envisageable que l’ensemble de ce chemin sur la revalorisation des carrières et des salaires, ainsi qu’une meilleure reconnaissance du travail social puissent passer par perte et profits.

>>> Sur le même sujet : "Si rien n’est fait, la seule perspective, c’est le chaos" (Pascal Brice)

Nous sommes dans une société où la durée de vie s’allonge, où les besoins d’autonomie des personnes, de l’accompagnement face aux accidents de la vie sont de plus en plus forts. Nous sommes l’un des pays les plus riches du monde, néanmoins dix millions de personnes vivent dans la précarité ou la pauvreté. Et aucune politique de solidarité, aussi vertueuse et pleine de bonnes intentions soit-elle, ne peut trouver de traduction s’il n'y a pas de professionnels du travail social pour la mettre en œuvre. Cette crise du travail social doit être prise particulièrement au sérieux.

Vous avez évoqué la nécessité de mettre en place la solidarité à la source. Peut-elle se faire au niveau local avec les territoires « zéro non-recours » 

La question de la solidarité à la source est dans le débat public depuis plusieurs années. Le président de la République s’était engagé, dès le début de son premier quinquennat, à travailler sur l’automatisation de l’accès au droit. Concernant le RSA, on sait qu’environ 30 % des personnes qui pourraient le toucher n’en bénéficient pas. Pourquoi ? Parce que les démarches sont soit trop complexes, soit tout simplement inconnues des publics qui pourraient en bénéficier. Ce non-recours au droit est l’une des principales difficultés du pacte social et du pacte républicain.

Nous avons été capables en France, à juste titre, d'instaurer le prélèvement à la source de l’impôt, pour éviter toutes démarches fastidieuses, qui faisaient par ailleurs perdre des recettes à l’Etat. Je crois qu’on doit pouvoir faire preuve du même volontarisme pour la solidarité à la source, qui ne peut pas se limiter au pré-remplissage de formulaires administratifs. Il faut donc expérimenter localement. A Nancy, par exemple, le conseil départemental et la métropole participent à l'expérimentation « Zéro non-recours », qui développe « l’aller vers » dans des quartiers où vivent des personnes qui pourraient avoir accès à certains droits et qui n’en bénéficient pas.

Mais cela ne peut être qu’en l’appui d’une politique d’automatisation impliquant que le local soit vraiment inscrit dans une trajectoire de transformation sociale. L’automatisation de l’accès au droit représente, pour les professionnels du travail social, la capacité de se focaliser sur les parcours de vie, plutôt que de passer un temps infini à ouvrir, à rouvrir des droits perdus ou des droits non ouverts dans l’imbroglio administratif.

Quel rôle peuvent avoir les associations de lutte contre la pauvreté dans ce contexte ?

Elles jouent un rôle évidemment majeur. Il ne faut jamais oublier qu’accompagner un parcours de vie, ouvrir des droits sociaux, permettre à quelqu’un de recouvrer son autonomie, sa dignité, c'est aussi inscrire la société dans son ensemble dans une trajectoire de transformation. C’est aussi refuser que les politiques de solidarité soient assimilées à de l'assistanat, que certains territoires soient considérés comme perdus pour la République. C’est un travail politique au sens noble du terme.

>>> A lire aussi : Nancy, capitale du travail social avec la FAS

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