Tous les couples séparés peuvent confier depuis le 1er janvier de cette année la gestion des flux financiers relatifs à leur pension alimentaire aux caisses d’allocations familiales (CAF) ou aux mutualités sociales agricoles (MSA).
Baptisé « service public des pensions alimentaires », le dispositif gouvernemental ouvert depuis octobre dernier aux familles victimes d’impayés s’élargit. Désormais, lorsqu’une pension alimentaire est fixée, « son versement est géré par les caisses qui les prélèvent auprès des débiteurs et les reversent au parent créancier concerné », et ce, sur simple demande d’un des ex-conjoints. Les personnes dont les séparations ont eu lieu avant 2021 peuvent, quant à elles, établir la demande d’intermédiation par l’intermédiaire d'un site ou d’une plateforme téléphonique dédiés mis en place par la CAF. Le dispositif perdure tant que la situation de l'enfant le nécessite et il prend fin lorsque les deux parents le demandent.
En cas d’impayé, ce sont les CAF ou les MSA qui versent aux familles lésées une allocation de soutien familial (ASF), dont le montant s’élève à environ 116 € mensuels par enfant à charge. Lorsque le montant de la pension alimentaire est inférieur à l’ASF, une allocation complémentaire est versée. Les structures se chargent également de récupérer les sommes dues auprès du débiteur. Initier une démarche de recouvrement des arriérés des 24 derniers mois est également possible gratuitement, avec l’appui des CAF et des MSA.
Les CAF dotées de moyens de pression
Actuellement, environ 30 % des familles concernées par le versement d’une pension alimentaire sont victimes d’impayés. « Nous espérons que les familles vont nous transmettre cette charge dès le départ. Bien que le service ne soit pas réservé aux situations avec incident de paiement, dans certains cas, pour garantir l’intérêt des enfants, il est préférable que nous nous chargions de l’assurer car nous sommes neutres. En effet, la pression d’un conjoint ou la culpabilité empêche certaines personnes de revendiquer leurs droits », explique Fabrice Leturcq, responsable du service « accompagnement et prévention » pour l’Aripa (Agence de recouvrement et d’intermédiation des pensions alimentaires) et responsable de l’équipe chargée de la gestion des pensions alimentaires pour la CAF de la Charente, à Angoulême.
Dans une autre mesure, le dispositif s’apparente à une « interface » avec la justice. En effet, les CAF sont dotées de pouvoirs exceptionnels identiques à ceux d’un huissier car elles sont habilitées à saisir le salaire ou les ressources d’une personne. Si le débiteur refuse de se soumettre à la mise en place de l’intermédiation financière, il s’expose à une amende ainsi qu’à des frais de gestion. « Certains débiteurs ont déserté leurs responsabilités, mais il ne faut pas oublier que d’autres sont dans des situations de précarité qui ne leur permettent pas de payer et ils ne s’autorisent donc pas à assurer leur rôle de parent. En posant des échéanciers adaptés, nous savons, par expérience, que tout le monde s’y retrouve », assure Fabrice Leturcq.
Organisation et financement
Le nouveau service est coordonné par l’Aripa, qui s’appuie sur 24 sites locaux dans lesquels des équipes spécialisées sont constituées. Ainsi, 820 personnes travaillent à temps plein pour répondre aux familles. Pour ce faire, 450 agents avaient été recrutés l’an dernier. Il s’agit là d’une réorganisation notable au sein des CAF concernées. Par exemple, l’équipe spécialisée de la CAF de la Charente est passée de 10 à 42 employés. Commerce, social, administratif, juridique… Les nouveaux agents, recrutés en février 2020, disposent de profils variés. « C’est indispensable. Par exemple, pour assurer le service, il faut convaincre et réussir à négocier afin d’obtenir l’adhésion du débiteur. L’aspect marketing est également important, car il ne faut pas oublier que l’on vend un service. Il est essentiel de sortir de notre carcan administratif », précise le responsable d’équipe.
Les nouveaux agents ont tous bénéficié d’une formation de trois mois visant à appréhender la législation, les techniques de recouvrement et la capacité d’adapter celles-ci aux situations. Les objectifs de recouvrement font maintenant place à l’intermédiation. Le but étant de travailler sur les délais de résultats ressentis par l’usager, et non sur ceux du traitement des dossiers. « Aujourd’hui, nous disposons d’effectifs, il faut à présent que la charge de travail augmente. Nous devons réussir à capter un maximum de familles et faire comprendre l’intérêt de nos services », indique Fabrice Leturcq.
Enfin, en matière de budget, le gouvernement précise que, « pour assurer son fonctionnement mais également financer l’augmentation du recours à l’allocation de soutien familial, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 prévoyait déjà un budget de 40 millions d’euros pour permettre le déploiement de ce nouveau service public. Dès 2021, ce sont 120 millions d’euros qui y seront alloués ».