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Aide à domicile : « Le département du Nord est un révélateur des dysfonctionnements structurels du secteur »

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Les représentants des services d'aide à domicile du Nord réclament la création d'un fonds d'urgence de 50 millions d'euros.

Crédit photo UNA Nord
Dans un courrier adressé au conseil départemental du Nord, l’ensemble des fédérations du secteur de l’aide à domicile demande la création d’un fonds d’urgence de 50 millions d’euros pour répondre à la dégradation économique des structures. La situation est « explosive », dénonce Hélène Lemaire, directrice de l’UNA Nord, qui craint qu’il en soit bientôt de même dans ce domaine pour le reste de la France.

Actualités sociales hebdomadaires : Quelle est la situation du secteur dans votre département ?

Hélène Lemaire : Dans le Nord, depuis octobre 2017, les modalités de tarification prévues par le code de l’action sociale et des familles ont été abandonnées de manière unilatérale. Un montant de prise en charge unique (à 21 €) a été fixé, et ce quels que soient le public accompagné et le type de prestations proposées. Un reste à charge complémentaire a aussi été autorisé avec toutefois un plafond maximal. Depuis cette date, le montant de la prise en charge unique n'a augmenté que de 1 €. C'est très insuffisant et cela ne correspond pas à la réalité des coûts. Pour le seul avenant 43, par exemple, seulement 50 % des revalorisations salariales sont actuellement compensées. Ce modèle n'est donc pas pérenne. On ne peut pas continuer comme cela. C'est une fuite en avant.

Quelle est la réaction du conseil départemental ?

Il avait mis en place une « mission APA » dont les conclusions ont été rendues publiques le 26 septembre. Résultat : le département entend désormais privilégier les services mandataires. Alors que l’ensemble des fédérations de l’aide à domicile (1) déplorent la dégradation de la situation économique, cette recommandation nous met en colère car elle ne répond pas aux attentes de nos publics fragiles. A cela s'ajoute un problème d'attractivité : il est illusoire d’imaginer pouvoir trouver des professionnels prêts à travailler en service mandataire, alors que le salaire y est 20 % plus faible. Les conclusions de cette mission ont donc cristallisé encore plus les tensions.

Pour répondre aux problèmes de trésorerie, le département propose des prêts à taux zéro. Ce n’est pas une mauvaise chose car très concrètement certaines structures vont être en difficulté pour payer les salaires de décembre. Le département cherche ainsi à éviter des cessations de paiement à la sortie des fêtes. Mais cela ne répond pas à nos attentes : nous demandons un fonds d’urgence de 50 millions d’euros pour l’année 2022.

Comment avez-vous estimé cette somme ?

Cela correspond à tous les surcoûts non pris en compte à ce jour : mise en place du tarif socle à 22 €, revalorisations salariales liées à l’avenant 43, augmentation du Smic… Tout cela accélère la dégradation économique des structures. Ces 50 millions d’euros doivent aussi prendre en compte les surcoûts liés au travail des dimanches et jours fériés (majorés de 40 % par notre convention collective) et à la fragmentation des interventions. Cela doit nous permettre de reconstituer notre trésorerie. En revanche, dans le fonds d’urgence nous n’avons pas budgétisé la hausse des prix de l'énergie. En réalité, nous avons besoin de beaucoup plus.

Quelle est la particularité du Nord par rapport au reste de la France ?

Le département est un révélateur des dysfonctionnements structurels du secteur. A ce jour, dans la grande majorité des autres territoires, les structures sont encore tarifées. Ce n'est plus le cas du Nord depuis 2017. Mais certains territoires suivent notre (mauvais) exemple. C’est le cas par exemple de l’Alsace où le conseil départemental ne peut pas prendre en charge financièrement la totalité de l'avenant 43. Ce modèle économique n’est pas adapté.

Sans le fonds d’urgence, de nombreuses structures seront amenées à supprimer des emplois, à arrêter les interventions, voire à fermer leurs portes. Or nous intervenons auprès de 60 000 personnes âgées et en situation de handicap, peu solvables pour la plupart, et nous représentons 12 000 professionnels, répartis dans 238 services d’aide à domicile. La situation est donc explosive et unique en son genre. Pour l’instant.


(1) Les huit signataires : Fesp, UNA Nord, Uriopss Hauts-de-France, Synerpa Domicile, Fédésap, ADMR Nord, Udcass Nord, Adédom.

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