ASH : Qu’avez-vous en tête en créant cette académie Skool·in ?
Marc Kempf : Notre promesse : permettre aux personnes « extra-ordinaires » d’avoir une vie ordinaire. A travers ce partenariat, nous unissons les expertises propres à l’Adapei et Askoria, alliant les champs éducatifs et pédagogiques, pour développer une offre de formation nouvelle dans le champ du handicap et de l’inclusion. Nous voulons participer à une transformation, à la fois de la place et du traitement des solidarités et de l’inclusion en France.
Matthieu Thiebault : Les pratiques inclusives développées dans le champ du handicap doivent servir à tous. Les outils de communication adaptée peuvent favoriser le développement du langage chez les enfants des multi-accueils. La méthode Falc (facile à lire et à comprendre) peut servir aux personnes présentant un trouble du neuro-développement (TND), mais aussi à celles en situation d’illettrisme. De même que les acteurs de l’Education nationale peuvent avoir un intérêt à se former autour de l’accompagnement des troubles du langage et des apprentissages (DYS) ou du spectre autistique (TSA).
A qui s’adresseront ces formations ?
M. T. : Nous avons quatre cibles : les professionnels du secteur social, médico-social et sanitaire, de l’animation ou de l’économie sociale et solidaire ; les managers de projets inclusifs ; les personnes en situation de handicap ; et la société civile. Pour développer et instaurer une véritable politique autour du handicap, il faut que les personnes concernées soient au cœur du projet. Notre communauté pédagogique comprendra donc des formateurs issus de la famille Askoria, des professionnels de l’Adapei ou du réseau, et des personnes en situation de handicap.
M. K. : L’originalité de l’académie tient sur ce trépied formateurs, professionnels du handicap et personnes accompagnées.
Comment se décline le catalogue de formations ?
M. K. : D’abord, nous proposons des formations courtes. Les personnes en situation de handicap pourront se former à la dynamique d’insertion professionnelle vers le milieu ordinaire, à l’engagement au sein d’un conseil de vie sociale (CVS) ; les pilotes de projets inclusifs au travail en réseau ; les professionnels de l’accompagnement à l’autodétermination et au pouvoir d’agir. Les acteurs de la société civile auront, eux, la possibilité d’apprendre à accueillir et renseigner les personnes en situation de handicap.
M. T. : Cette formation d’une journée détaille par exemple les règles du Falc ou l’utilisation du pictogramme S3A (symbole d’accueil, d’accompagnement et d’accessibilité), qui indique si le site favorise l’accueil des personnes porteuses d’une déficience intellectuelle. La formation peut-être utile, par exemple, aux personnels des établissements recevant du public (musées, centres hospitaliers, etc.).
Cette offre est-elle vouée à s’élargir, avec des formations qualifiantes notamment ?
M. T. : Nous avons deux souhaits pour l’année 2024-2025. Le premier : ouvrir un diplôme d’accompagnant éducatif et social (AES), doté d’une coloration handicap et inclusion. Il pourrait accompagner le développement de l’offre en Bretagne, dans le cadre des « 50 000 solutions nouvelles » (en mai dernier, lors de la Conférence nationale du handicap, Emmanuel Macron promettait des réponses, d’ici 2030, pour toute personne en situation de handicap nécessitant un accompagnement, ndlr).
Deuxième souhait : proposer un diplôme d’animation autour de l’action éducative inclusive. Il pourrait s’adresser à un responsable d’accueil collectif de mineurs, à une communauté de communes souhaitant développer le caractère inclusif de son territoire.
Autre exemple : former les employeurs. Notre pari est de faire en sorte que chacun s’émancipe par le travail et la formation. Il faut donc que les entreprises soient en situation de pouvoir accueillir, et recruter des personnes en situation de handicap. Nous développerons cette offre de formation à destination des entreprises, notamment celles qui conventionnent avec les établissements ou services d’aide par le travail (Esat).
Outre la formation, que recouvre l’idée d’« académie » ?
M. K. : Skool·in n’est pas seulement un opérateur de formation professionnelle. C’est vraiment une démarche, un lieu, une dynamique qui vise à participer à la transformation de la société. Nous voulons former, faire réfléchir et faire avancer la connaissance. Askoria dispose d’un centre de recherche. Elle a co-créé en 2020 la Grande école des solidarités avec Sciences Po Rennes, l’université de Rennes 2 et l’Ecole des hautes études en santé publique (EHESP). A travers l’académie, nous souhaitons apporter des éclairages scientifiques et académiques à la thématique du handicap, en coopération avec les personnes concernées. Mais aussi travailler à la source les politiques de solidarités, en formant les dirigeants. Et la Grande école des solidarités a son rôle à jouer.
M. T. : Avec cette école, nous avons l’ambition de former ceux qui ont le pouvoir de construction des politiques publiques. Fin 2024, nous organiserons une première formation de quelques jours, avec des élus et cadres territoriaux, qui souhaiteraient développer ces questions d’inclusion et d’éducation sur leur territoire.
Et pourquoi « Skool·in » ?
M. K. : Le terme Skool, même s’il ne signifie pas « école » (qui se dit skol en breton, ndlr), a une consonance bretonne. « In » renvoie à « inclusion » et « incroyable ». La baseline indique que nous sommes « tous engagés pour l’inclusion », quel que soit le statut des uns et des autres dans la société. Nous avons vraiment créé une marque, avec dans son logo les couleurs de l’Adapei et l’univers visuel d’Askoria.
>>> Pour en savoir plus : la présentation de Skool•In sur le site d'Astoria.