Si ce projet de loi va au bout, la médiation sociale sera bien inscrite comme le 14e métier de l’action sociale. Cela fait quinze ans que nous nous battons pour cette reconnaissance, préalable nécessaire pour obtenir un diplôme d’Etat et une véritable filière professionnelle. Néanmoins, on ne se considère pas forcément comme des travailleurs sociaux, sinon comme des intervenants de l’activité sociale. Le médiateur social se place sur les champs de la prévention de la délinquance, de la prévention sociale, du vivre ensemble et de la cohésion sociale. Il est aux côtés des publics sur les territoires, pour détecter des besoins et mettre en relation avec des travailleurs sociaux qui disposent d’outils d’accompagnement. Nous sommes les premiers maillons de la chaîne auprès des populations les plus éloignées des institutions, pour les remettre en lien notamment avec les acteurs du travail social. Ce métier peut s’exercer dans différents domaines : l’école, les transports, l’espace public, l’habitat social, Pôle emploi, la Poste, la CAF, là où il y a un besoin d’accueil des publics et d’un tiers impartial, bienveillant et indépendant. Mais nous n’avons pas, par exemple, de compétences en matière d’âge, à l’instar des éducateurs de prévention spécialisée qui interviennent sur les 12-25 ans.
Professionnaliser les médiateurs
Il y a un mouvement général de professionnalisation de la médiation depuis une dizaine d’années. Les ancêtres des médiateurs sociaux étaient les « femmes-relais », établies en région parisienne, qui avaient initié ce travail avec leurs familles sur les questions d’accès aux droits. Ensuite, certains maires ont fait de la médiation en cherchant des gens qui habitaient les quartiers prioritaires. L’idée était de faire monter en compétences des « grands frères » en leur donnant un mandat de médiateur pour assurer un peu de « sécurité » et acheter la paix sociale. Cela peut encore exister, mais 90 % des communes considèrent désormais qu’il faut des médiateurs professionnels avec de véritables compétences. On ne cherche plus à recruter au sein des habitants des territoires : on parie sur les aptitudes professionnelles et non sur de pseudos capacités personnelles, parce qu’untel connaît untel de la communauté ou de l’immeuble.
S’il y a eu des frictions avec d’autres métiers du social, c’est justement parce que le métier de médiateur n’était pas règlementé et très peu professionnalisé. Aujourd’hui, des partenariats se bâtissent avec des éducateurs de prévention spécialisée ou des animateurs de centres sociaux. Là où les craintes subsistent, et même si la ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités s’est clairement exprimée pour, c’est plutôt du côté du gouvernement. Il va falloir de l’argent pour créer des postes et répartir la charge financière entre les collectivités et l’Etat. Si la loi est le postulat de base, tout l’enjeu sera ensuite de travailler à la création des diplômes et d’une filière, pour que demain il y ait une convention collective et une reconnaissance salariale.
Xavier Rochefort, président de France médiation et directeur de l’Agence Lyon tranquillité médiation (ALTM)
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