Coconstruit à partir de lacunes recensées au sein de collectivités territoriales à faibles moyens budgétaires, le service public numérique Mon suivi social, porté par l’Agence nationale de la cohésion des territoires, améliore le quotidien des travailleurs sociaux. A l’initiative du programme, Vanessa Barbosa, agent pour la collectivité du Grand Autunois Morvan, en liste les atouts.
ASH : A quels types de structures s’adresse Mon suivi social ?
Vanessa Barbosa : Cet outil est dédié aux petits et moyens CCAS (centres communaux d'action sociale) qui disposent de faibles moyens financiers et humains. Lancé en 2022, le logiciel connaît une accélération de son développement puisque 993 structures situées dans 94 départements, outre-mer comprise, bénéficient d’un compte Mon suivi social. 80 % d’entre elles sont des communes et des CCAS et 83 % sont des territoires de moins de 20 000 habitants.
Quels sont les besoins des professionnels auxquels répond ce service ?
Au sein de nombreuses CCAS, chaque agent utilise son propre tableau Excel pour effectuer le suivi de ses activités d’accompagnement. Mon suivi social permet de centraliser les données des bénéficiaires au sein d’un même outil dans le respect du RGPD (règlement général sur la protection des données) et de la protection des données sensibles. Son utilisation se révèle utile par exemple en cas d’absence d’un professionnel puisque la continuité de l’aide se voit facilitée tout en garantissant la protection des informations personnelles, telles que celles relatives à la santé de la personne. Ce service numérique s'avère par ailleurs efficient dans la gestion des statistiques de la structure.
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Par quel moyen ?
Quand toutes les données ne sont pas collectées au sein d’un même dossier ou nommées de la même manière, la remontée des statistiques devient fastidieuse et chronophage. Si la charge de la centralisation revient souvent aux responsables, les travailleurs sociaux y participent aussi. Le tout, pour rendre des comptes aux financeurs mais aussi pour piloter l’activité de la structure. Il s’agit donc de répondre à un double enjeu : améliorer la qualité de suivi et optimiser le pilotage des activités par la production de statistiques en temps réel.
L’utilisation du dispositif a-t-il un impact sur les parcours des publics ?
Les travailleurs sociaux utilisateurs questionnés sur le sujet ont noté une amélioration de la prise en charge des usagers. En effet, l’accès à l’historique des actions conduites avec les personnes bénéficiaires se fait rapidement. Ce qui rend les professionnels davantage réactifs vis-à-vis du public.
Comment cela intervient-il ?
Cette fluidité est significative, par exemple, dans le cadre de sollicitations téléphoniques où les usagers appellent l’accueil pour valider la date de leur prochain rendez-vous, ou pour connaître l’avancement de leur dossier. Les personnes en difficultés sociales sont régulièrement dans des situations compliquées et ont besoin d’être rassurées. Cet outil y contribue.
Mon suivi social se montre donc utile à tous les niveaux hiérarchiques ?
En réalité, il y a autant de cas d’usages que de types de profils d’utilisateurs. Le travailleur social suit l’avancement de ses dossiers et peut mettre en place des rappels avec les dates d’échéance, l’agent d’accueil s’en saisit pour renseigner les bénéficiaires, et le responsable de structure améliore le pilotage de son activité. Par ricochet, la charge mentale se voit réduite.
L’autre force relevée s’inscrit dans la souplesse de l’outil. Les CCAS personnalisent toutes les typologies d’accompagnement qu’elles souhaitent proposées. C’est-à-dire qu’il ne va pas y avoir deux structures qui disposent des mêmes nomenclatures d’accompagnement. Si des aides alimentaires sont proposées, une typologie du même nom peut être créée. Même chose pour les entrées en établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) et ainsi de suite.
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Comment les collectivités peuvent-elles se saisir de Mon suivi social ?
Il faut d’abord participer à un webinaire (voir lien ci-dessous). Il s’agit d’un passage obligé pour ne pas engager dans le projet des structures pour lesquelles l’outil n’est pas adapté. Si elles décident de l’utiliser, elles créent leur espace. Tout se fait manuellement. D’abord par le responsable qui invite ensuite ses collaborateurs à utiliser l’outil en leur affectant l’accès à des paramètres spécifiques.
Comme le service est en ligne, il est très facile de s’en emparer. L’ensemble des salariés sont ensuite autonomes et en cas de besoin, le soutien d’un « club utilisateurs » avec un espace de ressources est à disposition.
L’outil est-il disponible gratuitement ?
Oui, notre travail se porte aujourd’hui sur sa pérennisation. Mais la gratuité reste un objectif car les petites collectivités sont souvent contraintes en termes d’accès à des outils performants en raison de leurs faibles moyens financiers. De la même manière, nous tentons de rendre l’utilisation de l’outil la plus simple possible. L’objectif étant qu'il soit disponible immédiatement sans que les professionnels n’aient besoin d’un parcours de formation complexe.
Qui sont les financeurs de Mon suivi social ?
Le projet est porté par l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT). Nous travaillons avec l’incubateur des territoires qui s’y rattache. Ce dernier gère l’aspect technique et l’ingénierie.
Un autre financement porte sur la partie développement, déploiement et coordination design car l’accessibilité est essentielle. Les agents en situation de handicap tels que les personnes malvoyantes doivent pouvoir se saisir du produit.
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