Un vent nouveau et léger
Partager une pizza et une bière en regardant un match de football. S’enthousiasmer ensemble. Participer à un atelier bien-être ou partir en vacances ; le tout en vivant dans un établissement social ou médico-social. Science-fiction ou réalité ?
« Y a de la joie, bonjour bonjour les hirondelles » : ces paroles de Charles Trenet raisonnent-elles dans le quotidien de certaines structures ? Contre toute attente – pour ceux en tout cas qui en doutent encore –, la réponse est oui. A l’heure où le pessimisme ambiant pèse plus que jamais, où les soignants sont épuisés, où les directions rencontrent des difficultés à recruter, certains ont décidé de résister et d’innover. C’est le parti pris par tous les professionnels de terrain, membres de direction, formateurs et autres experts qui ont accepté de témoigner dans ce numéro spécial assurément optimiste. Car oui, sur le territoire français, un nombre incalculable d’initiatives sont menées avec l’ambition affichée d’améliorer la qualité de vie des usagers mais aussi les conditions de travail des équipes. C’est le cas d’un groupe Facebook créé il y a plus de dix ans et qui réunit pas moins de 30 000 professionnels accompagnant des personnes souffrant de la maladie d’Alzheimer ou d’un trouble associé. Ensemble, ils débattent de leurs pratiques, échangent autour des formations ou des approches non médicamenteuses. L’occasion de découvrir une direction qui a choisi de « faire tomber » les tenues professionnelles, une qui a institutionnalisé un service dédié à l’accompagnement de nuit ou encore une autre dont la commission de recrutement des salariés est ouverte aux usagers.
Oser faire différemment
Si on peut s’interroger sur la prise de conscience des pouvoirs publics à agir et sur les solutions apportées en termes de plans de prévention, d’accès à la formation, d’augmentation des effectifs et des salaires sur fond de Ségur, aujourd’hui, c’est du côté du terrain que l’espoir est le plus grand. Que l’engagement est le plus fort. Volontaires et imaginatifs, des femmes et des hommes ont décidé d’agir pour les plus fragiles et de créer les meilleures conditions autour d’un lieu de vie (et non un lieu de soin), pour des habitants (et non de résidents ou d’usagers), loin de se reconnaître dans les divers cas de maltraitance que personne ne nie. Mais ils veulent aussi faire entendre leur voix, celle de la bienveillance et de la bientraitance. Ils ont tous un point commun : leur professionnalisme et aussi un certain grain de folie pour aller au-delà des exigences, normes et autres procédures, véritables carcans qui sclérosent les établissements. C’est ainsi qu’un Esat théatre est né, qu’un comité des fêtes a vu le jour dans un Sessad ou qu’une recherche scientifique a été confiée en Ehpad à deux aides-soignantes. Leur créneau : oser faire différemment.
Prendre soin de ceux qui prennent soin des autres
La crise sanitaire a eu le mérite de prendre à bras le corps l’état de santé psychologique (désastreux) des équipes qui était si peu investi. Ateliers bien-être, moments festifs, repas commun… le partage permet de créer du lien. Penser aussi aux petits gestes du quotidien, fait de merci, de main tendue, de petites attentions aux grands effets. D’autres sont à l’origine de la naissance d’une nouvelle philosophie de soin, dénonçant la distance thérapeutique tant prônée, et si absurde, misant sur la tendresse au cœur des accompagnements. Chacun à son échelle peut agir… et avoir un impact positif sur son environnement. C’est ce que prouvent les témoignages de ce numéro spécial. A consommer sans modération.
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Crédit photo : Pavo
