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Esat : « Sanctuariser 10 millions d’euros » (Sophie Cluzel)

Sophie Cluzel, secretaire d'Etat chargée des personnes handicapées.

Crédit photo DR
Attendue de longue date, initialement prévue début 2020 et décalée en raison de la crise sanitaire, la modernisation des établissements et services d’aide par le travail (Esat) est enfin lancée. Dans une interview exclusive, la secrétaire d’Etat aux personnes handicapées détaille ses ambitions et annonce, en lien avec les propositions du rapport Igas d’octobre 2019, une concertation avec les parties prenantes sur la modernisation du modèle Esat. En parallèle, est sanctuarisé un budget de 10 millions d’euros pour soutenir les établissements qui rencontrent des difficultés économiques en raison de la crise sanitaire.

Actualités sociales hebdomadaires : Dans une lettre ouverte qui vous a été adressée en novembre dernier, une quinzaine d’associations vous demandait la création d’un fond d’urgence pour soutenir les Esat en difficulté. Que leur répondez-vous ?

Sophie Cluzel : D’abord, de mars à octobre 2020, le gouvernement a mis en place des mesures exceptionnelles. Il a consacré 160 millions d’euros au soutien des Esat sans distinction et sans demande de justification de l’impact de la crise. Avec ces aides forfaitaires allouées aux structures, il s’agissait de préserver les revenus des travailleurs et les établissements eux-mêmes. Depuis fin octobre, les conséquences économiques ne sont pas les mêmes pour tous car la majorité des Esat a pu poursuivre son activité. Un effort a également été réalisé pour sécuriser les montants de dotations de fonctionnement des établissements sans tenir compte d’un éventuel taux d’occupation moindre lié à la crise sanitaire. Ce dispositif a été reconduit après le 10 octobre et est toujours en vigueur. Nous allons, en plus, aider à présent au cas par cas les structures qui exercent leurs activités dans les domaines les plus impactés, notamment par les fermetures administratives. L’hôtellerie, la restauration, le tourisme, mais aussi la sous-traitance dans des secteurs comme l’aéronautique. Nous allons faire du sur-mesure, en étudiant les pertes d’exploitation de chaque établissement demandeur, et pas du soutien d’un organisme gestionnaire qui pourrait compenser les pertes par d’autres activités ou par la mobilisation de sa propre trésorerie. Dans cette optique, nous sanctuarisons 10 millions d’euros.

 

A.S.H. : A partir de quand les Esat peuvent-ils espérer recevoir cette aide ? Il semble que certains d’entre eux soient déjà très en difficulté…

S. C. : Les Esat sont invités à faire connaître leur situation, sur la base d’un dossier qui leur a été adressé, auprès de leur ARS (agence régionale de santé) de rattachement d’ici le 12 février 2021. Dès la prise en charge actée, nous mettrons tout en œuvre afin que les financements soient versés le plus rapidement possible.

 

A.S.H. : Les associations gestionnaires demandent aussi la création d’un fonds de relance, un investissement pour aider les Esat à se restructurer, à créer de nouvelles activités. Est-ce prévu ?

S. C. : Avant cela, il faut déterminer les évolutions du modèle Esat, dans sa globalité, à mettre en place, et donc commencer par donner une suite au rapport de l’Igas (inspection générale des affaires sociales) rendu en 2019. D’où le lancement de la concertation avec les parties prenantes sur trois axes : l’évolution de l’offre de services ; la sécurisation des parcours et le renforcement des droits des personnes ; l’accompagnement des professionnels et l’attractivité des métiers. Ces chantiers doivent nous permettre d’affiner l’ensemble des paramètres à prendre en compte pour mener à bien cette modernisation des Esat. C’est attendu depuis longtemps tant par les associations gestionnaires que par les personnes elles-mêmes.

 

A.S.H. : Pour traiter ces différents thèmes, vous allez créer des groupes de travail, d’une dizaine de personnes chacun. Quels profils attendez-vous ?

S. C. : Des travailleurs d’Esat ainsi que des élus de conseils de la vie sociale, des professionnels d’Esat indépendants, des représentants des associations gestionnaires, mais aussi des représentants d’entreprises dont des entreprises adaptées… Si l’on veut favoriser les parcours personnalisés vers l’emploi, tous les acteurs doivent se mobiliser pour cette concertation attendue.  

 

A.S.H. : Le calendrier que vous vous fixez semble serré. Etre en mesure de formuler des propositions au comité interministériel du handicap (CIH) de juillet prochain, est-ce réellement tenable ?

S. C. : Je n’ai jamais dit que tous les chantiers auraient abouti en juillet. Ce n’est pas la vitesse qui m’importe, mais bien la qualité et l’opérationnalité des premières mesures proposées par les groupes de travail. Le CIH est un premier point d’étape, pas une fin en soi. D ’ici juillet, nous pourrons d’ores et déjà intervenir sur ces irritants du quotidien qui sont très dommageables pour le droit des personnes : leur éviter de devoir repasser devant la MDPH (maison départementale des personnes handicapées) à l’occasion d’une embauche en milieu ordinaire, leur accorder le bénéfice d’une mutuelle ou de l’intéressement lorsqu’il existe dans l’Esat.

 

A.S.H. : La crise sanitaire renforce-t-elle le caractère impérieux de cette modernisation des Esat ?

S. C. : Oui, la crise nous oblige à réfléchir différemment et crée aussi paradoxalement des opportunités de transformation. De même que la réforme de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés intervenue en janvier 2020, qui a incité les Esat à davantage de partenariats avec le milieu ordinaire dans le cadre de parcours sécurisés vers l’emploi avec un droit aux allers-retours entre différents milieux : Esat, entreprises adaptées, entreprises ordinaires… Nous devons améliorer le pouvoir d’agir des personnes sur leur choix de vie. C’est le moment ou jamais. La crise économique et financière peut permettre de faire bouger les lignes. Mais tout ne sera pas bouclé en quatre mois, j’en ai bien conscience.

 

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