Le doute plane sur la pérennisation du 3919, ligne d’écoute à destination des femmes victimes de violences sexistes. Dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux le 11 janvier, Caroline De Haas, fondatrice du collectif Nous toutes, soutient que le gouvernement souhaite « purement et simplement » supprimer ce numéro de téléphone. Les vives inquiétudes exprimées par la militante féministe découlent d’une réponse à une question posée sur la plateforme des marchés publics. Le gouvernement y explique notamment que la marque associée à ce service d’écoute « est en cours de définition », laissant ainsi supposer que le nom et le numéro pourraient changer. Le 3919 « commence à être connu et reconnu partout en France. Ça fait des années qu’on se bat pour le faire reconnaître », alerte Caroline De Haas. « Des femmes victimes de violences continueront à appeler le 3919 et n’auront plus personne au bout du fil. »
3919 : on découvre que le gouvernement a prévu en 2021 de supprimer purement et simplement le numéro d'aide aux femmes victimes de violences.
— #NousToutes (@NousToutesOrg) January 11, 2021
Caroline De Haas, de #NousToutes explique en 2 minutes le problème. #SauvonsLe3919 pic.twitter.com/sKobhLrD6a
Contacté, le ministère chargé de l’Égalité entre les femmes et les hommes assure de son côté qu’« il n’est aucunement question » de supprimer ou de changer de numéro, « mais bien au contraire de renforcer l’accompagnement des femmes victimes de violences via ce service ». Une réponse gouvernementale loin de convaincre le collectif Nous toutes, qui interpelle sur Twitter Elisabeth Moreno, la ministre déléguée en charge de ces questions, en lui demandant comment elle compte « conserver un numéro » dont l’Etat n’est pas propriétaire.
Au point 2.5.1 du cahier des charges, il est très précisément écrit que le n° est exploité par l'Etat (ce ne peut donc pas être le 3919, exploité par @SolidariteFemme) et que la marque est en cours de définition.
— #NousToutes (@NousToutesOrg) January 12, 2021
On peut difficilement faire plus clair. pic.twitter.com/9sxxjlfTMi
Demande de retrait de la procédure de marché public
Pour Françoise Brié, directrice de la Fédération nationale solidarité femmes, qui gère actuellement la plateforme téléphonique, le maintien du 3919 n’est qu’un « volet » du problème. « Notre principale préoccupation reste la mise en concurrence d’une mission d’intérêt général, souffle-t-elle. Il s’agit de confisquer aux associations de notre réseau et aux autres associations féministes une ligne d’écoute nationale qui a été construite pendant trente ans à force de mobilisations et de subventions. »
Dans un communiqué de presse publié ce vendredi 15 janvier, la fédération ainsi qu’une vingtaine d’autres associations expliquent craindre « la disparition d’un savoir-faire associatif unique ». Elles pointent un cahier des charges trop axé sur les critères quantitatifs (durée et quantité des appels) et dénoncent « une approche mercantile, déconnectée et éloignée de la mission première du 3919 ».
Le @gouvernementFR a lancé le marché public sur la gestion du 3919, numéro que #SolidaritéFemmes gère depuis sa création en 1992.
— Solidarité Femmes (@SolidariteFemme) January 15, 2021
Quelles sont les conséquences de la mise en concurrence de cette ligne d’écoute à destination des victimes de violences ?
Un thread #SauvonsLe3919 pic.twitter.com/XNqCOnGBCE
« Pourquoi mettre en concurrence une ligne d’écoute qui fonctionne et qui a répondu de manière très pertinente et efficace à l’ensemble des dernières crises qui se sont présentées à nous, s’interroge Françoise Brié. Dernièrement, nous avons enregistré une hausse de 67 % des appels entrants et de plus de 20 % du traitement des appels. »
Les différents acteurs associatifs demandent ainsi le retrait de cette procédure de marché qu’ils assurent ne pas être obligatoire, contrairement à ce que soutient le gouvernement. En l'état actuel des choses, la Fédération nationale solidarité femmes n’est pas certaine de répondre à l’appel d’offres, confie sa directrice.
Une pétition, mise en ligne sur Change.org et destinée à « sauver » ce service d'écoute, a récolté près de 64 000 signatures.