La devanture est un peu défraîchie mais l’activité tourne à plein régime. A l’intérieur, trois mécaniciens professionnels s’affairent autour d’un moteur, tandis que deux autres véhicules, capot béant, attendent d’être réparés. Voilà un garage des plus ordinaires, si ce n’est cet écriteau à l’entrée qui annonce la couleur : « Re-pare, garage solidaire et associatif ». « Ici, tout le monde est le bienvenu, en particulier les plus en difficulté », renseigne fièrement Jacques Malthieu, président de l’association qui gère ce garage situé dans un quartier populaire de Saint-Nazaire. Ouvert depuis novembre 2022, il propose deux types de tarifs, dont un particulièrement bas, pour permettre aux personnes ayant des petits revenus d’entretenir et de réparer leur véhicule. « Beaucoup de gens ne vont pas chez le garagiste faute de moyens et roulent avec des voitures, pour certaines, dans un état déplorable qui représentent un gouffre financier. C’est la double peine », constate Alain Roux, bénévole et responsable de la commission « accueil ». Aux petites bourses, une remise de 50 % sur le tarif horaire est appliquée, ainsi qu’une réduction des marges sur les pièces. « Grâce à des partenariats avec deux entreprises de récupération de pièces », précise le président.
Au premier étage du bâtiment, Alain Roux accueille son troisième client de la matinée. Objectif de ce rendez-vous : lui permettre d’adhérer à l’association, passage obligé pour obtenir son sésame dans le garage, mais surtout glaner des informations précieuses sur sa situation. « La voiture est une porte d’entrée pour faire venir des personnes qui échappent parfois à l’accompagnement social, mais qui sont malgré tout dans la détresse. Si les gens s’adressent à nous d’abord pour un problème mécanique, on prend le temps pour être à l’écoute de leurs besoins et les conseiller si nécessaire », détaille le bénévole.
Des faibles revenus
Parmi les quatre ou cinq nouvelles personnes qui poussent la porte de Re-pare chaque matin, 75 % de femmes, des travailleurs pauvres ou encore des personnes âgées touchant à peine de quoi se nourrir. « Une voiture en état de marche est un impératif pour certains, qu’il s’agisse d’aller travailler, de faire les courses ou d’emmener les enfants à l’école. Lors de l’entretien d’accueil, nous orientons nos questions autour de la mobilité ; celle-ci nous permet d’évaluer l’urgence de la situation et d’y répondre aussi vite que possible », ajoute Jacques Malthieu.
Entre l’idée et sa concrétisation, le président de Re-pare, professeur de mécanique à la retraite, est parvenu à convaincre de nombreux partenaires de l’intérêt du projet. L’association, qui a dû investir 120 000 € pour la reprise de cet ancien garage, a ainsi pu bénéficier pour moitié de fonds publics et privés. Pour les 60 000 € annuels nécessaires à son fonctionnement, la structure mise désormais sur la solidarité d’une partie de ses clients. « Pour pérenniser notre activité, il faut 40 % d’usagers qui paient le plein tarif et 60 % de bénéficiaires. C’est important qu’on reste un garage pour tous », insiste le responsable. Avec trois fois plus d’adhérents inscrits que prévu, la formule s’avère jusqu’ici payante bien que les délais d’attente s’allongent. Sont néanmoins conservés précieusement des créneaux pour les cas d’urgences. « Il y a un mois, on a aidé une septuagénaire qui, sans notre intervention immédiate sur sa voiture, aurait perdu son petit boulot qui complète sa minuscule retraite », raconte Alain Roux. En parallèle, le garage propose aussi la vente de voitures d’occasion, à prix très abordables. D’autres projets sont dans les tuyaux, tels qu’un service de lavage sans eau. Bientôt l’écriteau de l’atelier portera en plus la mention « écologique » !