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Handicap : « faciliter l’accès au patrimoine littéraire et théâtral »

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Matt K’Danet, acteur, metteur en scène et formateur au sein de l'association Zigzag.

Crédit photo Alexandre Ouya
Dans le cadre d’une recherche artistique et scientifique, l’association Zigzag, en collaboration avec les travailleurs d’un Esat, met sur pied une nouvelle forme de spectacle « tous publics » et accessible : le théâtre Falc (Facile à lire et à comprendre). L’objectif : adapter le patrimoine théâtral en travaillant les textes, en repensant la mise en scène et la direction d’acteurs. Explications avec Matt K’Danet, formateur au sein de l’association.

ASH : Qu’est-ce que le théâtre Falc ?

Matt K’Danet : Depuis 23 ans, nous proposons d’adapter les pratiques artistiques aux personnes fragilisées par le handicap. Notre démarche comprend une partie consacrée à la recherche et une autre à la création de spectacles professionnels et adaptés. A la croisée de ces deux départements, nous avons eu l’idée un peu farfelue d’inventer une nouvelle forme de théâtre qui serait facile à lire – au sens de suivre – et à comprendre : le théâtre Falc (1). L’objectif est de faciliter l’accès au patrimoine littéraire et théâtral en s’attaquant à la langue de Molière, de Shakespeare, de Ionesco ou de Jean de la Fontaine pour la rendre accessible. Les textes ont été transcrits par les travailleurs de l’Esat La Roseraie de Carrière-sur-Seine (Yvelines). Ils prennent en compte les difficultés de compréhension des personnes en situation de handicap cognitif, des « primo-arrivants », des jeunes enfants…

La deuxième partie du chantier porte sur la mise en scène pour qu’elle aussi soit « facilitante ». Il y a eu un important travail concernant la direction d’acteurs. Comment prononcent-ils les mots ? De quelles façons sont suggérés les antagonismes dans les corps et les déplacements ? Comment les prises d’espace vont révéler les métalangages ?... Il s’agit d’accentuer sans surjouer pour créer un spectacle tous publics qui tienne compte des difficultés de compréhension des uns et des autres. Un théâtre universellement compréhensible est utopique. En revanche, se donner les moyens de réaliser un spectacle le plus clair possible, c’est faisable.

Vous explorez également les aspects sensoriels…

Le théâtre est un art total et nous nous jetons à corps perdu dans cette notion. Nous réfléchissons l’audio, les ambiances, la vidéo-projection... Nous avons, par exemple, travaillé avec l’intelligence artificielle pour créer des décors à la manière de Gustave Doré. Dans des séquences du texte de Molière que nous avons adapté, un personnage épelle des mots et en explique l’étymologie. Nous avons saisi la balle au bond et projeté au mur les lettres qui s’écrivent et forment comme un grand tableau en interaction avec le comédien. Nous avons également travaillé sur l’odorama pour donner à sentir aux spectateurs. L’aspect multisensoriel s’ajoute à la question du jeu des comédiens et de la transcription des textes.

En quoi consiste le volet scientifique de cette recherche ?

Le versant scientifique est évalué par le centre de recherche intégrée de l’Ecole pratique de service social en la personne de Claire Heijboer. Les modalités de participation au projet des personnes concernées sont regardées. Il est question de les associer en tant qu’expertes de la transcription facile à lire et à comprendre. A ce titre, elles sont représentées au conseil scientifique. Les ateliers Falc menés au sein de l’Esat La Roseraie ont permis de transcrire les textes que nous avons choisi ensemble : Le Corbeau et le Renard de Jean de la fontaine, Le Petit Chaperon rouge de Charles Perrault et la Jalousie du Barbouillé de Molière. Concernant le volet artistique, nous n’avons cessé de créer des allers-retours avec ces mêmes personnes qui ont co-élaboré certains pans de la mise en scène. Elles ont assisté aux répétitions et conseillé le metteur en scène et les acteurs sur leur jeu.

Quelles sont les prochaines étapes du projet ?

La présentation au public de ces pièces en mai dernier était une maquette de recherche et non une création. A cette occasion, nous avons transmis un questionnaire en Falc aux personnes présentes, ainsi qu’un questionnaire en ligne destiné aux accompagnants, aux éducateurs et aux aidants. Nous travaillons à analyser ces données.

Il est ensuite prévu de rédiger deux articles. Le premier consacré au volet scientifique qui sera signé par Claire Heijboer. Le second, dont je m’occuperai, qui prendra la forme d’un rapport à la Direction générale de la création artistique. En parallèle, nous sommes en train de réaliser un document pour couvrir cette aventure. De nombreuses associations et entités culturelles commencent à s’intéresser à ce projet en passant commande ou en demandant l’élaboration de nouvelles pièces.

Une fois le dispositif de recherche clos, nous souhaitons nous diriger vers la création. L’idée serait, comme pour les compagnies traditionnelles, de mettre sur pied des spectacles. Nous réfléchissons à la création d’un label qui serait garant des bonnes pratiques en matière d’adaptation en théâtre Falc. Nous aimerions aussi proposer des formations professionnelles à destination des comédiens et des metteurs en scène ayant le désir d’adapter des pièces. Indépendamment du répertoire, certains artistes pourraient aussi avoir envie de réaliser une version Falc de leur création contemporaine.


Crédit photos : Celine Sturm

(1) Le projet est soutenu par le ministère de la Culture et la Direction générale de la création artistique (DGCA). L’association Zigzag travaille en partenariat avec l’Unapei, Avenir Apei et des universités.

 

 

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