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Pascal Brice (FAS) : « Face au permis d’humilier, nous nous constituerons en espace de protection »

Pascal Brice (chemise lilas, lunettes noires), le président de la FAS, sur le front tous les dimanches. Ici avec l'association Aurore pour la manifestation d'Alertes féministes à Paris le 23 juin 2024. 

Crédit photo FAS
En cas d’arrivée de l’extrême droite au pouvoir, la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS) entend mettre en place un dispositif pour protéger les personnes accompagnées, les professionnels et les bénévoles. Mais peut-on travailler avec un gouvernement RN ? La réponse sans équivoque de Pascal Brice, le président de la fédération.

« La FAS lance un appel à la protection républicaine et à l’ouverture d’un “espace de solidarité et de protection" pour accompagner les personnes et les structures directement menacées. » C’est par ces mots que la Fédération des acteurs de la solidarité, réunie en assemblée générale ordinaire, est passée dans une nouvelle dimension vendredi 21 juin. Comme la plupart des acteurs du secteur social, la fédération appelle à voter – et plus spécifiquement à voter contre le RN le 7 juillet 2024. Mais en plus, elle envisage un plan d’action de résistance que nous détaille son président, Pascal Brice.

ASH : Pourquoi voulez-vous créer cet « espace de solidarité et de protection » ?

Pascal Brice : Nous faisons le constat que depuis un moment déjà, on a une multiplication des comportements et des actes agressifs à l’égard des personnes et des structures. Il y a eu des mouvements d’extrême droite qui ont fait un carrousel, qui se sont déplacés de lieux en lieux d’accueil de personnes étrangères pour faire monter la tension et la pression auprès de nos associations. C’est une première forme. Et il y a une deuxième forme beaucoup plus insidieuse mais de plus en plus présente, de libération de la parole, de propos à caractère stigmatisant et raciste. Notre inquiétude, c’est que dans l’éventualité où l’extrême droite prendrait le pouvoir, nous aurions à faire face à une démultiplication de ce type d’actes.

 

Dans la rue, devant les associations ?

Dans les rues. Dans les immeubles. Dans les quartiers. C’est déjà présent. Mais surtout notre conviction c’est qu’au vu de ce qu’est l’extrême droite, et de ce qu’elle provoque partout où elle s’installe, elle donnera à quiconque le souhaite un permis d’humilier. C’est ça la réalité quotidienne de l’extrême droite au pouvoir. Et c’est ce que nous anticipons, d’abord en appelant à la mobilisation pour éviter ça dans les urnes. Mais nous avons aussi la volonté d’affirmer que la FAS sera là, comme espace de construction et de protection auprès d’hommes et de femmes, des personnes accompagnées, des professionnels, des travailleuses sociales et des travailleurs sociaux, des bénévoles qui sont de plus en plus angoissés. Si le pire devait arriver, la FAS jouera pleinement ce rôle.

 

Mais concrètement, à quoi ressemblera cet espace, à un local ? A un numéro vert ? A une plateforme, un site ?

Ce sera un peu tout cela. Il y aura la possibilité de contacter des personnes au sein de la FAS nationale et des FAS régionales. Nous allons évidemment construire cet espace avec des partenaires du monde associatif. Il y aura donc la possibilité de signaler ces comportements, de pouvoir disposer d’une présence et de pouvoir déclencher des formes d’accompagnement juridiques ou médiatiques.

 

Si l’extrême droite n’a pas la majorité absolue pour gouverner, cet espace sera-t-il toujours d’actualité en raison d’une hausse des propos et des comportements débridés ?

Cet espace se constituera si l’extrême droite participe d’une manière ou d’une autre au pouvoir. Et si on reste dans un espace démocratique, nous continuerons à être vigilants car la situation est déjà préoccupante. J’avais écrit, avec la présidente de France terre d’asile, il y a plusieurs mois au ministre de l’Intérieur, suite à des agressions contre des élus et des associations. Lettre qui était restée sans réponse. Mais si l’extrême droite arrive au pouvoir, on change de nature de menace. Et dans cas-là, nous mettrons en place de manière pleine et entière cet espace de protection.

 

Au-delà de la remise en cause du droit du sol, de l’instauration de la préférence nationale et de la fin de l’inconditionnalité de l’accueil, quels points vous semblent inquiétants dans le programme du RN ?

L’extrême droite, ce n’est pas un programme. C’est une blague de dire que le RN a un programme. L’extrême droite porte une vision d’organisation de la société qui est que les personnes ne valent que par leur appartenance à un groupe. Pas pour ce qu’ils sont ou ce qu’ils font. Mais parce qu’ils appartiennent au groupe des Français ou des étrangers, des pauvres ou des riches, des hommes ou des femmes. Ces catégories font l’objet d’une vision hiérarchique. Certains sont habilités à considérer qu’ils sont supérieurs aux autres.

>>> Lire aussi : Législatives : « Faire entendre la voix des exilés » (Utopia 56)

La conséquence mécanique de cet état d’esprit, c’est un permis d’humilier. Partout. Et pas seulement contre les étrangers. Les gens se racontent des histoires : cela ne s’arrêtera pas aux étrangers. Cela concernera des bénéficiaires du RSA dont le voisin considérera qu’il ne travaille pas et que c’est un fainéant. C’est ce qui va se multiplier et nous monterions alors d’un cran car nous changerons de nature. Face à un Etat encourageant le permis d’humilier, nous nous constituerons en espace de protection.

 

Sur votre site, on voit que la FAS est « cofinancée par l’Union européenne » et « soutenue par le gouvernement français ». Si le RN est au pouvoir, serez-vous toujours soutenus par le gouvernement ?

C’est une question pour le gouvernement. Nous, nous continuerons ce qui est juste et nécessaire.

 

Mais pourriez-vous dialoguer avec un ministre des Affaires sociales RN ?

Non.

 

Et donc comment cela pourrait-il se passer ? Il vous faudra trouver d’autres sources de financement…

Je propose qu’on attende de voir ça. Cela fait évidemment partie des choses que nous avons tout à fait à l’esprit. L’acte 1, c’est se mobiliser et appeler à la mobilisation pour éviter ça. L’acte 2, constituer un espace de protection, dans cette hypothèse, pour les personnes et les structures. Et évidemment, la question que vous évoquez en fait partie. Mais on verra à ce moment-là.

>>> Lire aussi : Dissolution de l’Assemblée : les acteurs sociaux inquiets mais mobilisés

 

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