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Exil : « La marche d’Amal » passe à Calais

La venue d’Amal dans la ville est un retour, sur un territoire où rien n’a vraiment changé depuis six ans

Crédit photo Louis Witter
Exil - Partie le 27 juillet dernier de Gaziantep en Turquie, à la frontière syrienne, la marionnette Amal, haute de plus de trois mètres, représente l’exil d’une petite fille de 9 ans. A Calais le 17 octobre, elle a effectué l’une de ses dernières étapes avant l’Angleterre.

Il y a quelques décennies, à Fort-Nieulay, à la sortie de Calais, des cerfs-volants volaient. Les enfants venaient y jouer. Mais la sécurisation de la frontière et de la ville de Calais a vu s’ériger, petit à petit, des grillages, des murs et des barbelés. Et les ailes volantes ont atteri. Ce dimanche 17 octobre, une foule de trois cents personnes se presse devant la « Porte de Calais », à l’entrée du fort. Au loin, la marionnette de la petite Amal apparaît. Les téléphones sont brandis, les appareils photo aussi.

Cette marionnette, c’est la fin d’un parcours destiné à raconter l’exil et surtout celui des enfants. Qu’ils viennent de Syrie, d’Irak, d'Erythrée ou du Soudan, ils étaient nombreux cet été sur les campements du calaisis, accompagnés de leurs parents, attendant de traverser la Manche jusqu’au Royaume-Uni. Les organisateurs de l’événement connaissent bien la région. En 2015, ils avaient posé une scène de théâtre dans la « jungle », le bidonville où survivaient au plus fort près de dix mille personnes et monté une pièce avec les personnes exilées.

La venue d’Amal dans la ville est un retour, sur un territoire où rien n’a vraiment changé depuis six ans. Raphaël est enseignant. Il est venu assister à la marche et soutenir le projet artistique. « C’est un quartier où l’art et la culture ne viennent pas habituellement. C’est important de venir ici, même si les gens ne sont pas au courant de la signification d’Amal. On ne peut pas être contre. Les enfants qui doivent tout quitter restent des gamins. Et ça n’est jamais de leur faute, aux enfants. »

A sa fenêtre, un type invective quelques spectateurs. Pour lui, la venue de la poupée géante est une « provocation envers les Calaisiens ». Peu ou prou le même discours que celui de la maire de la ville, Natacha Bouchart, qui, dans la presse locale, assume l’interdiction pour la marionnette d’être installée sur la plage. « Mme le maire préfère se concentrer sur cette excellente nouvelle qu’est le passage à Calais du Tour de France en 2022. C’est extrêmement valorisant et positif pour l’image de Calais. »

Dans le quartier de Fort-Nieulay, Amal déambule en musique. Gabriel et Jean-Luc, deux musiciens bretons, lui ouvrent la route au violon et à la flûte, accompagnés de plusieurs percussions : « C’est une musique traditionnelle soudanaise que l’on joue. On l’a apprise ici avec des personnes exilées. » A leurs côtés, on danse, on chante. Au départ de la marche, une cuve d’eau était posée par le Calais Food Collective, entourée de rochers. Ces dernières semaines, les autorités ont tout fait pour les empêcher de distribuer de quoi se désaltérer sur l’un des campements de Coquelles. Amal se baisse, visage à hauteur d’homme, pour déplacer les rochers comme ce fut le cas le 11 septembre dernier.  La foule applaudit, les associatifs qui comprennent la référence sourient de ce pied de nez artistique.

Derrière Amal, une foule d’enfants brandit les cerfs-volants fabriqués avec l’aide d’Anaïs et de Ludovic. Les deux bénévoles de l’association Shanti ne sont pas présents ce jour-là. Avec Philippe, prêtre jésuite de 72 ans, ils ont entamé le 11 octobre une grève de la faim illimitée pour dénoncer les conditions de vie des exilés à Calais. Leur manifeste est lu au micro et, ça et là, des pancartes leur témoignent un soutien inconditionnel.

La petite Amal aura traversé une petite partie de la ville. Un peu à l’extérieur, un peu invisibilisée, tout comme les personnes exilées d’ici le sont. Son trajet finira en Angleterre, au-delà de la Manche, après huit mille kilomètres de marche.

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