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A Bobigny, les juges des enfants tirent la sonnette d’alarme

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"Il s’écoule jusqu’à dix huit mois entre l’audience au cours de laquelle la décision est prononcée par le juge des enfants et l’affectation du suivi à un éducateur", accusent les magistrats de la Seine-Saint-Denis. Selon eux, cette situation, provoquée par les restrictions budgétaires, aura des conséquences sur l'avenir en ne garantissant par une bonne protection des mineurs d'aujourd'hui.

Dans une tribune du 5 novembre à France Inter et au quotidien Le Monde, quinze juges des enfants du tribunal de Bobigny, en Seine-Saint-Denis, lancent "un appel au secours" face à la dégradation de leurs conditions de travail et à leurs difficultés pour mener à bien leur mission de protection de l’enfance. Car, alertent-ils, ils ne sont pas seulement les juges des jeunes délinquants mais aussi les "juges des mineurs en danger".

En l’occurrence, les magistrats dénoncent les délais inadmissibles de prise en charge des mesures d’assistance éducative à mettre en place lorsque la situation d’un mineur au sein de sa famille l’exige. "Il s’écoule jusqu’à dix huit mois entre l’audience au cours de laquelle la décision est prononcée par le juge des enfants et l’affectation du suivi à un éducateur", accusent-ils, assurant que, actuellement, près de 1 000 dossiers sont en attente de traitement. En cause, "un manque flagrant de personnel, lié aux restrictions budgétaires" dans ce qui est le deuxième tribunal de France.

Au nombre insuffisant d’éducateurs dans le département - dont le rôle est primordial pour accompagner les enfants placés et leurs parents, prendre en charge les traumatismes, organiser les visites, évaluer les signalements faits par les enseignants ou les assistants sociaux du secteur, etc. -, s’ajoutent celui des greffiers ne pouvant même plus être présents aux audiences.

"Nous sommes devenus des juges de mesures fictives alors que les enjeux sont cruciaux pour la société de demain : des enfants mal protégés, ce seront davantage d’adultes vulnérables, de drames humains, de personnes sans abri et dans l’incapacité de travailler. Ce seront davantage de coûts sociaux, de prises en charge en psychiatrie, de majeurs à protéger et, ce n’est plus à prouver, davantage de passages à l’acte criminel", concluent les juges de Bobigny.

Interpellée sur France Inter, la ministre de la Justice, Nicole Belloubet, a renvoyé la responsabilité de cette situation au département. Pour autant, la Seine-Saint-Denis ne pourrait être que la partie émergée de l’iceberg. En effet, les besoins de la protection de l’enfance ne cessent d’augmenter : selon un rapport de la DREES, en 2017, le nombre de mineurs et jeunes majeurs pris en charge par l’aide sociale à l’enfance a augmenté de 4 % par rapport à l’année précédente. Un phénomène lié, notamment, à la hausse du nombre de mineurs étrangers non accompagnés.

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