Des dizaines d’enfants confiés à l’aide sociale à l'enfance (ASE) réduits à s’endormir sur des lits de fortune installés dans le coin d’une salle de réunion ou au fond d’un couloir ; 3 335 autres toujours dans l’attente de voir exécutées les mesures de placement ordonnées par les juges, continuant par là-même à subir les maltraitances de leurs proches ; 2 043 mineurs contraints de vivre à la rue, sans solution d’hébergement ; 9 % de postes vacants en protection de l’enfance, et on en passe… Le constat est connu : « La protection de l’enfance s’effondre un peu plus chaque jour », rappelle dans son introduction le Livre blanc de la protection de l’enfance, publié le 18 novembre.
Dépasser l'état des lieux
Pourtant, malgré des chiffres illustrant la crise historique que traverse la protection de l’enfance sans cesse ressassés, et des alertes provenant des différentes catégories de professionnels maintes fois lancées, les multiples signaux restent lettre morte. C’est pour dépasser le stade de l’état des lieux que le GEPso (Groupe national des établissements publics sociaux et médico-sociaux), les associations d’anciens concernés Speak et Repairs, et la fondation Jean-Jaurès se sont associés afin qu’« enfin les choses avancent ». Et que soit mis en œuvre « le plan Marshall » réclamé par plusieurs acteurs du secteur.
« Ce rapport (…) nous permet de saisir ce moment pour agir avec des solutions concrètes et ambitieuses », assure Adeline Hazan, présidente d’Unicef France, qui préface le livre. Résultat, le Livre blanc a rassemblé l’ensemble des recommandations égrenées par les associations, les professionnels de terrain et les personnes concernées pour aboutir à 70 propositions tangibles, regroupées en 5 grandes thématiques :
- S’assurer du respect de la loi et de l’adéquation des moyens avec les besoins,
- Mieux former et outiller les professionnels pour une prise en charge d’excellence,
- Réfléchir à une réponse adaptée pour les enfants de l’ASE ayant des besoins spécifiques,
- Changer de braquet en matière d’attractivité des métiers,
- Faire évoluer l’accompagnement des enfants confiés pour mieux répondre à leur besoin.
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Parmi les 70 propositions, le Gepso met particulièrement en avant le fait de :
- Instaurer des taux et normes d’encadrement en protection de l’enfance,
- Effectuer un choc des rémunérations des métiers de l’ASE et du médico-social,
- Faire en sorte que plus aucun enfant ne dorme à la rue en assurant un hébergement d’urgence pour chaque famille dans cette situation,
- Instaurer un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens entre l’Etat et les départements concernant le financement de la protection de l’enfance,
- Augmenter significativement l’offre de dispositifs d’aide à la parentalité et de prévention à destination des familles en difficulté,
- Rendre obligatoire la publication trimestrielle des mesures de placement non exécutées au sein de chaque département.
Ne reste plus qu’à appliquer ces mesures précises afin de, suivant les mots du Gepso, « remettre sur pied la protection de l’enfance ».
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