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Rentrée 2024 : ce que réclament prioritairement les associations

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Fin août, les associations des secteurs social et médico-social font face à l'urgence sans réels interlocuteurs au sein des ministères.

Crédit photo Ludovic Marin / AFP
Septembre approche. Et, avec lui, l’étau se resserre sur les secteurs social et médico-social. Avec la dissolution de l'Assemblée nationale et après la trève estivale, l’urgence à laquelle sont confrontés les professionnels n'a cessé de s'accentuer. Tour d’horizon des priorités de la rentrée en compagnie de plusieurs grands acteurs du secteur.  

Précarité, asile, protection de l’enfance,… Sur le terrain, il y a urgence. En cette fin d’été, les représentants du secteur sont prêts à défendre les nombreux « chantiers » législatifs en suspens depuis la dissolution de l'Assemblée nationale. Très attendue, la constitution du nouveau Gouvernement permettra de remettre sur la table les problématiques auxquelles se confrontent quotidiennement les professionnels du secteur.

 

« Agir dans l’urgence et sur la durée »

Pascal Brice, Président de la Fédération des acteurs de la solidarité (Fas)

« Il y a urgence à réouvrir une perspective de lutte contre la pauvreté. Le gouvernement doit montrer sa volonté d’agir, à la fois pour l’urgence et sur la durée. L’autre priorité se situe dans la sortie de la stigmatisation des personnes pauvres, notamment celle des étrangers.

Depuis la sortie du Covid, et plus encore depuis la loi immigration, quelque chose de très lourd et de délétère pèse sur les personnes en situation de précarité et sur les associations. Les travailleurs sociaux se sentent dans une impasse, sans perspective.

Les enjeux des secteurs de l’hébergement et du logement prédominent. Le nombre de gens à la rue continue d’augmenter dans un contexte de manque de places d’hébergement. Plus de 2 000 enfants dorment à la rue chaque soir.

La loi de programmation pluriannuelle engagée en 2021 avec le gouvernement a été abandonnée. Nous demandons évidemment à ce qu’elle soit reprise, c’est une priorité absolue. J’espère par ailleurs que le nouvel exécutif n’osera pas reprendre le projet de démantèlement de la loi SRU (Solidarité et renouvellement urbain) et qu’on aura enfin une politique de relance du logement social. La question du plein emploi doit elle aussi être réouverte et doit passer par l’accompagnement et l’engagement réciproque.

Pour répondre aux fragilités structurelles, nous avons besoin d’interlocuteurs au sein des ministères pour travailler en confiance et nous comptons sur leurs actions. Nous allons maintenir la pression, il y a urgence ».

 

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« Initier une politique d’attractivité volontariste »

Jérôme Voiturier, délégué général de l’Uniopss.

« Avant tout, il s’agira de voir quelle sera la coloration du prochain gouvernement. S’agira-t-il d’un exécutif plutôt libéral concentré sur la réduction de la dette publique ou d’un gouvernement plus « social » qui mettra les questions d’inclusion au cœur de son projet ? Quoi qu’il en soit, plusieurs gros dossiers restent devant nous, notamment celui de l’autonomie. Nous avons eu une « petite loi » sur cette question l’an dernier, mais ce que nous attendons, c’est un « grande loi », qui prendra en compte l’ensemble des thématiques liées au vieillissement, au grand âge et au handicap.

Autre sujet important : l’attractivité des métiers du social. La crise Covid a montré à quel point ces emplois étaient indispensables et pourtant rien n’a été fait pour les revaloriser. Nous avons besoin d’une politique d’attractivité volontariste et pour cela, il y a nécessité à appliquer les recommandations du livre blanc du Haut-conseil du travail social. La question de la formation et celle des dynamiques d’emploi sont primordiales afin de pouvoir garantir de vraies évolutions de carrière à ceux qui se lancent dans ces métiers. Aujourd’hui, ce n’est pas le cas. Et nos emplois peinent à être pourvus faute de véritable reconnaissance de long terme.

D’ailleurs, nous militons pour une véritable reconnaissance du secteur associatif. Il ne dispose pas de la reconnaissance qui devrait être la sienne et l’exécutif le considère encore trop comme une simple courroie de transmission alors que le privé non-lucratif représente aujourd’hui 90 % de la prise en charge de l’exclusion, 70 % de celle du handicap et 35 % de celle du grand-âge ».

 

« Mettre en place une véritable politique de lutte contre la pauvreté »

Marie-Aleth Grard, présidente d’ATD quart monde

« Nous devons renouer le dialogue avec un gouvernement. Sur les questions sociales et la lutte contre la pauvreté, il s’est rompu il y a deux ans. Sans dialogue, nous ne ferons pas diminuer la grande précarité qui augmente. Nous sommes inquiets. Sur les vingt dernières années, c’est la première fois qu’une telle hausse intervient.

Dans notre cartable, nous disposons bien sûr de propositions à soumettre aux responsables politiques. A commencer par la mise en place d’un revenu insaisissable pour remplacer le revenu de solidarité active (RSA) dont le montant peut être réévalué tous les trois mois. Cette nouvelle aide s’élèverait à 50 % du revenu médian. Cela permettrait au public concerné d’oser se projeter, de garantir la sérénité des enfants de ces familles pour qu’ils puissent entrer dans les apprentissages à l’école.

> A lire aussi : Le lieu de vie, une souffrance qui s’exprime peu

Les travaux du Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale (CNLE) seraient utiles au gouvernement pour mettre en place des actions pertinentes. Par exemple, ses recherches sur la fraude montrent qu’il est inefficace de missionner des milliers de fonctionnaires pour surveiller. Il vaut mieux accompagner les personnes les plus précaires dans la durée, avec une évaluation périodique de leur situation effectuée par les professionnels, au travers d’une relation de confiance. De la même manière, le rognage des aides au logement empêche de nombreuses familles d’avoir accès au parc social. Résultat : des chambres d’hôtels sociaux sont financées durant des années, ce qui casse terriblement les personnes dans leur parcours et coûte une fortune à la société. »

 

« Garantir une approche commune avec les pouvoirs publics »

Sylvie Guillaume, présidente de Forum Réfugiés

« Concernant la nomination des membres du nouveau gouvernement, nous sommes attentifs sur la manière dont va évoluer la situation. Nous veillerons à ce que les différents ministères concernés de près ou de loin par notre activité répondent à nos questionnements et à nos problématiques. Nous souhaitons nous entretenir rapidement avec leurs membres pour connaître les perspectives et faire part de nos difficultés.

Nous sommes sur un calendrier quelque peu « décalé » quant au travail rendu par les professionnels au regard des retards de paiements étatiques. Nous avons besoin de sécurité et un meilleur soutien financier s’impose car nous traitons d’un sujet sensible, l’humain. Le domaine de l’asile et les questions d’accueil qui s’y rattachent représentent une réelle plus-value pour la France.

En parallèle, la compréhension fine de nos enjeux par les ministres est essentielle. Nous allons donc les rencontrer pour parler de nos activités et surtout de nos besoins. Ces derniers doivent percevoir la richesse du travail que nous réalisons et ce qui se joue. L’enjeu des salaires des travailleurs sociaux domine bien que la prime Ségur ait un peu améliorer les choses. Il s’agit aussi de mesurer si les ministères disposent de la même perception que nous concernant l’impact des lois nationales et des lois européennes qui interviennent sur nos activités. Les associations ne peuvent pas être considérées comme des opérateurs. Il s’agit d’actrices à part entière. »

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« Sécuriser une enveloppe protection de l’enfance dans le budget »

Pierre-Alain Sarthou, directeur général de la Convention nationale des associations de protection de l’enfant (Cnape)

« La Cnape attend enfin un peu de stabilité. Plusieurs ministres et secrétaires d’Etat se sont succédé ces quatre ou cinq dernières années. On passe beaucoup de temps à les convaincre de l’urgence d’agir. Et ils quittent leurs fonctions lorsqu’une ébauche de réflexion se met en place. Cela ne permet pas d’engager des réponses adaptées.

Ensuite, il est essentiel qu’il y ait un ministère à part entière, ou un secrétariat d’Etat, chargé de l’enfance qui soit le plus haut possible dans l’ordre protocolaire. Et de savoir sur quelle administration il aura la tutelle ou la co-tutelle : la Direction générale de la cohésion sociale (DGCS) mais aussi la protection judiciaire de la jeunesse, l’Education nationale…

A la nomination du gouvernement, l’urgence sera l’élaboration d’un budget, d’ici au 1er octobre. Le ministre devra connaître le sujet et être opérationnel pour aller chercher les moyens nécessaires au refinancement de la protection de l’enfance. On a besoin de revaloriser les salaires, d’agir sur les décisions de placement, trop de situations ne sont pas traitées assez vite par la justice et les conseils départementaux.

Il devra tout de suite sécuriser une enveloppe « protection de l’enfance ». Et si l’on ne peut certes pas se projeter sur la couleur politique du gouvernement, je reste optimiste : la protection de l’enfance est un des rares sujets qui touchent toutes les forces politiques.

La Cnape, quant à elle, prépare la mobilisation du 25 septembre, avec le collectif des 400 000. A la suite de la commission d’enquête sur la protection de l'enfance, dont on espère qu’elle sera relancée, de très nombreux acteurs ont établi les mêmes constats. Il faut désormais agir fort. »

> Sur le même sujet : Pourquoi la Cnape a-t-elle décidé de lancer le collectif des 400 000 ?

 

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