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« Les salariés de la petite enfance sont-ils des sous-travailleurs sociaux pour être aussi peu rémunérés ? » (SNPPE)

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Cyrille Godfroy, co-secrétaire général du SNPPE, revendique une revalorisation salariale de 300 €.

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L’annonce du 5 mars dernier d’une augmentation des rémunérations du personnel des crèches du secteur privé est accueillie plutôt froidement par le Syndicat national des professionnels de la petite enfance (SNPPE). Pour Cyrille Godfroy, co-secrétaire général du syndicat, le compte n’y est pas. Et le secteur public fait figure d’oublié. Entretien.

ASH : Comment avez-vous accueilli les annonces ministérielles de revalorisation de 150 € des salaires des professionnels de la petite enfance ?

Cyrille Godfroy : C’est mieux que rien, mais ce n’est pas satisfaisant. Dès 2021, un an après la création du SNPPE, nous avons lancé une concertation auprès des salariés pour établir un baromètre des rémunérations. Des 3 000 réponses reçues, il est apparu que le salaire médian des professionnels du secteur (17 381 € par an) était inférieur de 300 € par mois au salaire médian français, qui se monte à 22 384 €. Les salariés de la petite enfance sont-ils des sous-travailleurs sociaux pour être aussi peu rémunérés ? Les 150 € d’augmentation annoncés sont très inférieurs aux attentes dans notre secteur qui peine énormément à recruter. Nous demandons une revalorisation d’au moins 300 € net mensuels.

>>> Sur le même sujet : Les salariés de la petite enfance augmentés jusqu’à 150 € par mois

Contre toute attente, le conseil d’administration de la Cnaf, qui se réunissait le 5 mars dernier, a choisi de reporter son vote sur ces augmentations. Comment l’interprétez-vous ?

Ce sont les organisations patronales présentes au conseil d’administration, au premier rang desquelles la Fédération française des entreprises de crèches (FFEC), adhérente au Medef, qui ont exigé ce report. Elles ont été rejointes dans leur revendication par la CFE-CGC et l’Unaf au prétexte que le conseil d’administration ne peut pas examiner une telle proposition si elle n’a pas, au préalable, reçu l’approbation de la commission des affaires sociales de la Cnaf. Ce qui reportera vraisemblablement le vote de cette décision au mois d’avril prochain. C’est rageant car, pour insuffisante que soit l’augmentation concédée, tout le monde autour de la table – organisations syndicales, associations, collectivités… – est bien conscient que la faiblesse des salaires du secteur contribue à la pénurie de recrutements qui touche tous les établissements.

Qu’est-ce qui a motivé cette décision de la partie patronale selon vous ?

J’y vois deux raisons. La première, c’est la publication prochaine d’un rapport Igas-IGF sur les micro-crèches qui risque d’être très défavorable aux gestionnaires de ces établissements qui se développent particulièrement dans le secteur privé lucratif. Pour l’instant, le rapport a été rendu à la ministre, mais son contenu n’a pas encore fuité. Le patronat a donc choisi d’allumer des contre-feux en cristallisant le débat sur les salaires. La seconde, c’est que ces micro-crèches du secteur privé lucratif ne sont pas financées directement pas la Cnaf au titre de la prestation de service unique (PSU), mais directement par les familles que la Cnaf indemnise ensuite au titre de la prestation d’accueil du jeune enfant (Paje). Elles ne sont donc pas concernées par les augmentations salariales annoncées, ce qui n’arrange pas la partie patronale. Ce qui explique que cette dernière engage un bras de fer avec l’Etat, quitte à pénaliser l’ensemble du secteur.
 

La mise en place de ces augmentations est soumise à des négociations salariales de branches. Aujourd’hui, seuls les établissements de la branche Alisfa sont en mesure de les appliquer. Comment se déroulent les autres négociations ?

Le SNPPE n’est pas encore représentatif puisque nous n'aurons des candidats aux élections des TPE pour la première fois qu’en novembre et décembre prochains. Nous ne sommes donc pas engagés dans les négociations et pas vraiment informés de ce qu'il s’y dit. Toutefois, d’après les remontées du terrain, les établissements Alisfa sont loin d’avoir les moyens de mettre en place ces augmentations prévues depuis le 1er janvier dernier. Dans certaines structures, sans les 80 millions provisionnés par la Cnaf à cet effet, les augmentations concrètes sont très faibles. De l’ordre de 20 € à 30 € par mois… c’est pour cela que le report du vote du conseil d’administration de la Cnaf est d’autant plus agaçant.

Vous exprimez également des inquiétudes pour les professionnels du secteur public…

Oui. Car les annonces d’augmentations salariales et leur prise en charge à 66 % par la Cnaf ne concernent que le secteur privé. Dans le public, les hausses de salaire dépendront des collectivités qui les emploient. Or, en fonction des orientations des élus ou du budget de la collectivité, soit ces augmentations risquent d’être insuffisantes, soit elles se feront au détriment d’autres dépenses… On a déjà vu, à l’issue du Ségur, des auxiliaires de puériculture ou des éducateurs de jeunes enfants quitter leur poste pour rejoindre des établissements hospitaliers où ils auraient droit à la prime. Si rien n’est fait pour aider les collectivités à prendre en charge les augmentations de leurs salariés, ça risque d’être encore pire !

Pensez-vous que le CA de la Cnaf votera la décision lors de sa prochaine réunion début avril ?

Beaucoup le pensent. Personnellement, je reste méfiant. On n’est pas à l’abri d’une autre mauvaise surprise car une enquête parlementaire sur le financement des crèches et la qualité de l’accueil est toujours en cours. Or, en attendant ses conclusions, personne ne bouge chez les employeurs et les financeurs…

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