Qui de l’humain ou de l’IA est le plus à même de concevoir les plannings les plus efficients pour les établissements sanitaires et médico-sociaux et leurs agents ? La question n’est pas anodine. L’élaboration des calendriers de travail dans un secteur marqué par un absentéisme pouvant monter jusqu’à 9 % des effectifs relève parfois de l’exercice d’équilibrisme, où le cadre de santé chargé des ressources humaines (RH) doit jongler avec les impératifs organisationnels, mais aussi réglementaires.
Charge mentale
Résultat : « Ces cadres consacrent entre 40 et 80 % de leur temps à l’élaboration des plannings au détriment de leurs autres missions, notamment l'animation d’équipes », observe Matthieu Girier, directeur de la performance RH au sein de l’Agence nationale de la performance sanitaire et médico-sociale (Anap). Activité particulièrement chronophage, l’exercice de la gestion des plannings contribue même à « aggraver la charge mentale » qui pèse sur l’encadrement, plutôt que de constituer « un outil de management de la gestion de compétences, de la qualité et de la sécurité des soins, de la sécurisation du personnel et de la qualité de vie au travail », déplore Eugénie Ramaut, cadre de santé au CHU de Lyon et membre du bureau de l’Association nationale des cadres de santé (Ancim).
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Challenge
Dans ces conditions, le recours à l’IA pourrait générer un gain de temps pour les personnels d’encadrement chargés de la gestion RH des équipes et des établissements. Pour tenter d’en déterminer la mesure, l’Anap a planifié l’organisation d’un challenge qui doit se tenir le 6 mars prochain.
Au programme, deux équipes de dix cadres de santé chacune, sélectionnés parmi les agents candidats – 190 candidatures ont déjà été enregistrées, mais les inscriptions seront clôturées définitivement en fin d’année – s’affronteront autour d’un exercice d’élaboration de plannings tenant compte de la construction des cycles de travail, des contraintes réglementaires et de l’absentéisme au sein des équipes. La première, assistée par un outil d’intelligence artificielle ; la seconde, sans aide informatique.
A l’issue du concours, un jury, composé de membres de l’Anap, de l’Ancim, de la Drees (Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques) et d’éditeurs de logiciels d’IA, déterminera le planning le plus conforme aux attentes d’un établissement de santé.
Inspirer la réflexion
Au-delà du caractère ludique du concours, l’exercice permettra surtout « d’inspirer la réflexion sur les pratiques actuelles et les évolutions de l’écosystème, de réaliser des plannings fiables de qualité facilitant la qualité de vie au travail et de déterminer les conditions de succès d’un déploiement de ces solutions à grande échelle », énumère Matthieu Guyot, expert en ressources humaines et intelligence artificielle au sein de l’Anap. Actuellement, l’IA demeure encore utilisée de façon inégale dans les établissements français et c’est surtout le secteur privé qui s’en est emparé, même si certains établissements publics comme le CHU de La Réunion ou des institutions telles que l’AP-HP commencent à y recourir.
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