Ils le redoutaient, c’est arrivé. Pour les acteurs de l’économie sociale et solidaire (ESS), le coup de rabot budgétaire annoncé à l’occasion de la présentation, jeudi dernier, du projet de loi de finances pour 2025, a pris des airs de coups de bambou. Tout à sa recherche de 60 milliards d’économies pour l’an prochain, le gouvernement Barnier a frappé dur sur ce secteur qui pèse environ 10% du PIB du pays et représente près de 14% de l’emploi privé en France. « Il y a franchement de quoi s’alarmer ! » résumait Antoine Détourné, délégué général d’ESS France à l’issue de la publication des grandes orientations budgétaires de l’Etat pour l’année à venir.
42% de budget en moins pour les emplois aidés
Car si les crédits de la mission travail et emploi accordés à l’insertion demeurent globalement stables avec un maintien du nombre de places financées dans l’insertion par l’activité économique (IAE), les entreprises adaptées (EA) et la poursuite de la montée en charge du dispositif Territoire zéro chômeur de longue durée (TZCLD), les subsides consacrées aux emplois aidés, dont le secteur de l’ESS est un grand consommateur, devraient connaître une sérieuse révision à la baisse.
Selon les chiffres publiés dans le "bleu budgétaire" 2025, leur budget devrait passer de 398,6 millions d’euros cette année à 234,4 millions l’an prochain. Parmi les dispositifs soumis à cette cure d’austérité figurent notamment les emplois francs promis à la suppression, les parcours emploi-compétences (PEC) dont le nombre sera réduit de 66 687 à 50 000 et les contrats initiatives emplois jeunes (CIE Jeunes) qui passeront de 2115 à seulement 158.
"Humiliation"
Autre conséquence de cette mise à la diète, le budget de l’ESS à Bercy, utilisé en partie pour soutenir le développement des TPE et PME de l’économie sociale et solidaire, devrait se voir réduit de 25%, passant ainsi de 22 à 17 millions d’euros. « Par son ampleur, cette révision à la baisse est une humiliation pour l’ESS ! C’était déjà le plus petit budget de Bercy et c’est aujourd’hui le seul à se voir raboté dans ces proportions alors que les autres programmes liés aux stratégies économiques de l’Etat sont épargnés par ces coupes », grince Antoine Détourné.
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Sans compter qu’à ces réductions budgétaires s’ajoutent toutes les coupes « invisibles », celles qui concerneront les collectivités territoriales (445 d’entre elles verront leur budget amputé de 5 milliards d’euros) qui constituent souvent les premières sources de financement des structures associatives de l’ESS consacrées à l’action sociale. « Une grande partie des structures et entreprises de l’ESS, qui épaulent les services publics dans leur mission d’intérêt général, reçoivent des dotations de l'État et des collectivités. Si les coupes budgétaires s’abattent sur elle, c'est tout un écosystème de 220 000 structures employant 2,4 millions de salariés qui sera fragilisé », tempête pour sa part Hugues Vidor, le président de l’Udes.
Face à ces réductions de crédits, le secteur de l’économie sociale et solidaire a prévu d’appeler à la mobilisation pour faire fléchir les parlementaires. Le 16 octobre au matin, les principaux réseaux de l’ESS devraient se rencontrer pour déterminer les actions à mener.
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