Avec plus de 60 accidents du travail pour 1 000 salariés, les établissements et services médico-sociaux (ESMS) sont en tête des entreprises à risques professionnels en France. Pire : entre 2018 et 2019, l’évolution de l’incapacité permanente s’y est accrue alors même que cet indicateur a baissé dans la quasi-totalité des autres secteurs. La situation est comparable pour les maladies professionnelles, les directeurs de structures sont d'ailleurs de plus en plus nombreux à lancer des campagnes de prévention des troubles musculosquelettiques (TMS).
Un manque de pilotage national
Face à cette situation alarmante, la Cour des comptes, dans un rapport rendu public le 4 octobre, appelle les pouvoirs publics à faire de cette problèmatique une « priorité nationale ». Pour cause, à l’heure actuelle, la gestion du risque accidents du travail-maladies professionnelles (AT-MP) dans le secteur ne dépend d'aucune institution. « La DGCS [direction générale de la cohésion sociale] exerce des missions qui s’étendent à l’ensemble des ESMS publics et privés, mais les risques professionnels ne figurent pas explicitement dans ses compétences », pointe la Cour des comptes.
Pour les établissements publics, « aucune coordination n’est prévue » entre la Caisse nationale d’assurance maladie et la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales. La situation n’est guère plus claire au plan régional. Seules certaines initiatives locales, comme en Bretagne ou en Auvergne-Rhône-Alpes, cherchent à faire mieux, principalement dans les ESMS privés.
Les appels à projets AT-MP inadaptés
Actuellement, l’amélioration de la prévention et de la gestion des risques AT-MP dans le secteur médico-social fait l’objet d’appels à projets. Une utilisation qui « ne paraît pas adaptée aux enjeux ». « Les ESMS qui sont en mesure de dégager du temps pour élaborer des dossiers de candidature ne sont généralement pas les plus en difficulté en matière de gestion et de maîtrise des risques professionnels », relève le rapport.
Selon la Cour des comptes, les contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens (Cpom) représenteraient un recours. Ils pourraient « non seulement définir des objectifs partagés et cohérents associés à plusieurs signaux, mais aussi organiser une mesure de l’impact des actions engagées ». Cela permettrait de concentrer les crédits alloués aux agences régionales de santé sur les ESMS à risques élevés et de « mettre en cohérence l’ensemble des moyens mobilisables ».
Cour des comptes, « Les enjeux de la maîtrise des risques professionnels dans les établissements et services pour personnes âgées et personnes en situation de handicap », octobre 2022.