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10 conseils pour développer sa marque employeur

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Pour se distinguer, il faut être capable de tenir ses promesses. 

Crédit photo Adobe Stock
Héritée des méthodes de management du secteur lucratif, la marque employeur s’impose comme un élément incontournable de la stratégie des associations pour faire face au déficit d’attractivité du secteur social et médico-social. Même si, dans les faits, peu d’entre elles affichent une démarche aboutie.
 
 

Qui peut encore y échapper ? Personne. « Toutes les associations doivent travailler leur marque employeur, même les plus petites », affirme Louisa Tlilane, responsable du conseil en ressources humaines chez Nexem. Selon les derniers chiffres de l’organisation patronale, publiés il y a un peu plus d’un an, 50 000 emplois ne seraient pas pourvus dans le secteur social et médico-social. Et 150 000 candidats pourraient manquer à l’appel d’ici 2025.

Les employeurs savent qu’ils ne pourront guère compter sur la rémunération pour se montrer attractifs. Mais d’autres leviers peuvent et doivent être actionnés. Reste à le faire savoir. Et c’est toute l’ambition d’une marque employeur : travailler son image pour réussir à attirer et conserver des collaborateurs, salariés, bénévoles, mais aussi les partenaires extérieurs, au premier rang desquels les financeurs. « On ne s’associe pas avec une structure qui a une image écornée », souligne Laurent Lebris, fondateur de Cause et Sens, une société spécialisée dans les stratégies associatives.

Bien sûr, la com’ n’est rien sans la cohérence du terrain. Et toute démarche, plus qu’un simple vernis, doit reposer sur des fondamentaux solides, qu’il faut réinterroger au préalable. « Il n’y a rien de pire que d’afficher des promesses qu’on est incapable de tenir, résume Alexia Pescreminoz, DRH d’Aurore. On crée de la frustration. Et il ne faut pas oublier que les salariés, quels que soient les établissements, s’expriment sur les réseaux sociaux. Quitte à écrire des horreurs sur ce qu’ils ont vécu… »

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La marque employeur opère ainsi un perpétuel mouvement de balancier entre le travail de terrain et sa communication, en interne comme en externe. Elle se construit en gardant en permanence un œil sur les trois moments clés du parcours d’un collaborateur : avant, pendant et au moment du départ. « Bien sûr, il faut faire connaître l’association, donner envie de venir y travailler, amorce Agathe Barnay, DRH à la Fondation de l’Armée du salut. Mais une fois l’embauche effective, il faut fidéliser les salariés et donc s’interroger sur la façon dont on les traite. Enfin, il faut soigner la manière dont on s'en sépare, même s’ils ont été licenciés pour faute. »

Le chantier est colossal, mais rassurons-nous : chaque association détient une ou plusieurs parties de cette marque employeur. Et souvent, comme monsieur Jourdain fait de la prose, sans le savoir. Tout l’enjeu consiste à la formaliser pour lui apporter cohérence et efficacité. Petit guide en dix leçons…
 

Mobiliser autour du projet associatif

Les associations du secteur n’ont pas d’argent. Mais elles ont des valeurs ! Et elles doivent les porter haut et fort. Un préalable : la rédaction du projet associatif. « La marque employeur en est l’émanation », souligne Laurent Lebris, de Cause et Sens. D’où l’importance de le rendre vivant ! « C’est un exercice de communication en soi. Il faut le travailler en pesant ses mots, sans en faire des tartines, pour le porter de façon claire et audible pour tous et faire en sorte que chaque strate de l’association s’en saisisse, des RH aux bénévoles. »

Le projet associatif doit refléter l’ADN de la structure et être réalisé par le maximum d’acteurs. La Croix-Rouge française a adopté son dernier texte en 2020, après une année d’ateliers et de consultations. Quelque 16 000 participants y ont contribué : salariés et bénévoles, mais aussi des personnes accompagnées, des donateurs et des partenaires publics et privés. « Il dit ce que nous sommes, ce que nous voulons faire ensemble et comment nous devons le faire », résume le document en préambule. Une mobilisation générale qui aura permis d’asseoir la stratégie et les objectifs de la marque employeur, définis dans un second temps.

Dans le même esprit, le projet d’établissement détermine un cap collectif. A condition d’en faire un outil concret, écrit par l’équipe. Un objectif que s’est fixé l’association Aurore, qui envisage de déployer des méthodologies de construction collective du texte.
 

Dresser un état des lieux

Pas de marque employeur sans un audit sérieux révélant les forces et faiblesses de la structure. Quitte à bousculer… « La mise en place d’un baromètre social, avec des outils en ligne, aide à connaître le climat. On peut analyser les données internes issues des retours des entretiens professionnels ou de départ, organiser des groupes d’expression de salariés. Il faudra identifier aussi l’existant en matière d’avantages sociaux (congés, télétravail, etc.) », explique Louisa Tlilane, à Nexem. Dans un souci d’amélioration continue, une démarche de consultation des employés par le biais de questionnaires, s’avèrera une habitude utile.
 

Apporter des correctifs

Bien sûr, aucun audit n’est voué à rester lettre morte. Des constats et des faiblesses pointées devront naître des correctifs. La société change ? « Il faut accepter que le rapport de force s’est renversé », avance Agathe Barnay. Les salariés, notamment les plus jeunes, ne veulent plus de contrat à durée indéterminée ? Va pour un CDD. « Et s’ils sont contents, ils resteront. A nous de leur proposer des conditions de travail bienveillantes. » L’Armée du salut a réfléchi à individualiser les plannings. Aurore, qui compte 15 % de postes non pourvus, teste actuellement la semaine de quatre jours. Des aménagements qui comportent leur lot de contraintes, mais dont nul ne peut faire l’économie, au moins d’y songer.
 

Communiquer en interne

« Si les salariés ne sont pas au courant, rien ne sert de mettre en place des dispositifs », martèle Agathe Barnay, qui défend l’importance de la com’ interne. A l’Armée du salut, beaucoup d’infos passent par l’intranet, les e-mails ou les newsletters – « pas assez lus », au goût de la DRH. L’enjeu, de fait, consiste à adopter des canaux plus efficaces. « On a des super stagiaires », sourit Agathe Barnay. Comprenez : des « digital natives », capables de coups de pouce numériques. « On avait une problématique de salariés qui ne comprenaient pas leurs bulletins de paie. Ce qui induit très rapidement une perte de confiance dans la structure. On a mis en place des vidéos pour les expliquer, qui sont diffusables par les chefs de service. »

Après avoir refondu sa newsletter interne, la Croix-Rouge, forte de ses 16 700 salariés, est allée jusqu’à créer une émission de télé en octobre dernier. Présentée par la rédactrice en chef de la direction de la communication, C + Clair commente les temps forts de l’association. Le ton y est très pro, à la manière d’un journal télévisé, utilisant différents espaces, alternant les séquences : interview de la directrice générale, « boîte à questions » pour répondre aux sollicitations des salariés, présentation et valorisation d’employés qui font l’actualité. « C’est une manière d’animer la communauté de salariés, qui renvoie à chacun l’idée qu’on s’intéresse à lui, en lui donnant de l’info, analyse Laurent Amiand, directeur de la communication et des affaires publiques de l’association. On a tous besoin d’un salaire, mais d’autres éléments le complètent. Et malgré la difficulté de nos métiers, nous faisons en sorte que les salariés soient fiers de travailler à la Croix-Rouge. » Et quand les salariés sont valorisés en interne, ils renvoient une bonne image en externe.
 

5 Soigner l’identité visuelle, le message et les cibles

L’ADN de la structure est clairement définie ? C’est le moment d’harmoniser son identité visuelle pour communiquer d’une seule voix. Il s’agit, quels que soient ses moyens, de déterminer une charte graphique, avec son logo, ses couleurs, à décliner sur tous les supports, des sites Internet aux adresses physiques des établissements. « Sinon, la marque employeur se dilue », prévient Laurent Lebris.

Vient alors le temps, une fois les pratiques alignées sur les promesses, de véhiculer les messages. Pas besoin d’avoir le budget d’une entreprise du CAC 40 pour communiquer. Les réseaux sociaux, notamment, permettent de s’exprimer à moindre coût. A condition d’en maîtriser les ressorts. « Il ne s’agit pas de communiquer tous azimuts, prévient Louisa Tlilane, mais de cibler les bons canaux. » TikTok pour les jeunes, Instagram pour toucher un large public, Facebook pour ses groupes métiers… et, s’il n’y en avait qu’un à retenir, LinkedIn, tant il est devenu incontournable dans les domaines professionnels.

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La marque employeur est une proposition de valeurs qu’il faut énoncer : du sens, à défaut souvent de rémunération, des avantages sociaux, des conditions de travail… L’image renvoyée se niche parfois dans les détails. « Remercier ses collaborateurs publiquement montre le visage humain d’une association », suggère Laurent Lebris. Au-delà des mots, l’étude d’impact peut se révéler efficace : « Pour qu’une association soit fière de montrer ce qu’elle fait, elle doit pouvoir mesurer le retour social sur investissement, poursuit le dirigeant de Cause et Sens. Pas uniquement de manière quantitative, mais aussi qualitative. »
 

Compter sur ses salariés comme ambassadeurs

Les entreprises parlent d’Employee Advocacy, une stratégie où les salariés deviennent les ambassadeurs de la réputation de la structure. Souvent, ils le font de manière naturelle, relayant les projets auxquels ils participent, parfois animés par une forme de militantisme qui porte les valeurs de l’association. « Ce sont les premiers à partager nos infos et nos appels à soutien », témoigne Laurent Amiand à la Croix-Rouge. L’association n’a, pour le moment, pas défini de stratégie précise. Peu adepte de censure, elle estime avoir plus à gagner en laissant s’exprimer ses salariés. « Dans l’ensemble, les boulettes sont anecdotiques. Et les réseaux sociaux relèvent du domaine de la vie privée. Leurs utilisateurs sont libres d’y exprimer leurs opinions. Même s’il est vrai qu’à partir du moment où ils mentionnent leur employeur, celui-ci peut, à minima, discuter avec eux. »

Encore rarissimes parmi les associations du secteur, les stratégies consistant à désigner formellement des ambassadeurs doivent être encadrées. « Il faut définir les bons profils – ceux qui vont bien écrire, sont à l’aise à l’oral – et les former pour qu’ils passent les messages clés », considère Louisa Tlilane, à Nexem. Qui rappelle une condition sine qua non : « Le climat social de la structure doit être bon. »

Enfin, ces ambassadeurs peuvent aussi intervenir sur les plateformes d’offres d’emploi. Ainsi, ASH Job proposera dès février cette option aux employeurs sous forme de reportage photo, de vidéo, de podcast ou d’article.
 

7 Améliorer ses outils de recrutement

C’est l’interface clé entre la structure et les candidats à l’intégration. Le processus de recrutement se doit d’être cohérent de A à Z : des offres d’emploi bien référencées, lisibles et visibles auprès de destinataires ciblés, et la garantie d’une réponse aux candidats recalés sont des critères décisifs pour recruter tout en soignant la réputation de la structure. Un chantier que l’association Aurore envisage d’achever d’ici le printemps. Ses objectifs : mieux investir les job-boards et les groupes de réseaux sociaux où sont postées les annonces, et améliorer le sourcing de jeunes diplômés. Elle va créer un poste de chargé de recrutement et de marque employeur, dont une des missions phares est le lien avec les écoles. A l’image du partenariat récemment signé avec l’Institut régional du travail social (IRTS) Parmentier, à Paris.

Comme la Croix-Rouge, l’Armée du salut a créé une plateforme de recrutement accessible depuis son site. On y est invité à « rejoindre » la fondation comme bénévole ou salarié.

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Pour les premiers, une page dédiée décrit les missions générales. Et détaille, ville par ville, les besoins du moment. De la préparation des événements festifs aux cours de français pour les exilés, une centaine de missions ponctuelles et régulières attendaient les volontaires parisiens à la veille de Noël. Pour les salariés, outre le rappel des cinq valeurs de la fondation, les axes de la politique RH côtoient les engagements en faveur de la diversité et de l’inclusion, chiffres à l’appui lorsqu’ils sont bons– comme ici l’indice d’égalité femmes-hommes. « L’enjeu, souligne la DRH Agathe Barnay : montrer que nos politiques partagent les mêmes valeurs, qu’il s’agisse de l’accompagnement des personnes ou des salariés et bénévoles. » Pour incarner les métiers en image : différents portraits vidéo de collaborateurs. Les offres d’emploi y sont présentées de façon harmonisée, et il est possible de déposer sa candidature spontanée en glissant un CV et en renseignant ses informations.

 

Travailler l’intégration

Rien ne sert d’attirer de nouveaux collaborateurs si ce n’est pas pour les conserver. Et parce que la première expérience compte double, soigner l’accueil constitue la règle numéro un. « Donner le sentiment qu’on est hyper contents qu’ils viennent travailler augure d’une bonne relation, explique Agathe Barnay. Sauf que le temps manque à chacun. Pour créer du lien et accompagner les nouveaux arrivants, on a mis en place des parrains. Et formalisé un parcours d’intégration qui commence par une demi-journée d’information, notamment sur les avantages liés à la fondation. » Chaque nouvel arrivant est invité au siège, à Paris, lors d’une journée d’accueil. « On diffuse des films sur l’histoire de l’Armée du salut, une belle histoire portée par des femmes. On met en valeur la fondation et on travaille le sentiment d’appartenance et de fierté. Et ça cartonne », se félicite la DRH.
 

9 Former les managers, et au-delà

Les managers sont un élément central de la marque employeur. Ce sont eux qui vont impulser la stratégie et décliner ses objectifs. Aurore a identifié cet objectif parmi ses priorités. « On doit garantir que nos politiques RH ont les moyens de respecter les promesses de la marque employeur, qu’ils savent recruter, intégrer et fidéliser leurs collaborateurs », explique Alexia Pescreminoz. Et, au-delà, c’est toute la chaîne des salariés et des bénévoles qui doit pouvoir bénéficier de formations. L’Armée du salut a mis en place au sein de ses instances représentatives des référents handicap et harcèlement sexuel et moral. Elle accompagne les salariés les plus âgés, en valorisant leur expertise auprès des plus jeunes. Elle a aussi créé un poste dédié aux risques psychosociaux et à la pénibilité. « Il faut montrer que chacun compte dans la structure, explique Agathe Barnay. Et s’il y a des difficultés, accompagner vers un autre projet. »

 

10 Dire au revoir

C’est le dernier détail, qu’on aurait tendance à négliger… Mettre les formes pour quitter son salarié est un impératif, même en cas de licenciement pour faute ou inaptitude : « Il faut toujours être respectueux, accompagner les personnes en leur rappelant le cadre, avec objectivité », explique Agathe Barnay. Question de réputation. Un salarié éconduit aura sa version de l’histoire, inutile de susciter un ressentiment qui pourrait se retourner contre la structure.

Question aussi de retour d’expériences. D’où l’importance de réaliser des entretiens de départ, pour en comprendre les raisons. Et c’est une façon, enfin, de préserver l’avenir. A Aurore, l’ancienne directrice générale adjointe avait quitté la structure pour des raisons personnelles. Désormais installée en région, elle est revenue quelques mois plus tard apporter ses compétences à un autre poste.

Et même un départ à la retraite ne doit pas être minimisé, conseille la DRH de l’Armée du salut. « En n’accompagnant pas, on donne parfois le sentiment de mettre à la porte. Or les anciens salariés peuvent se révéler une mine d’or. Ils connaissent la maison et peuvent constituer de très bons renforts ponctuels pour des interventions ou des formations. Ils peuvent aussi suggérer de bons profils de candidats. »
 

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Paroles de pros

« Fonctionnant essentiellement à partir de financements publics, nous sommes toujours tiraillés entre la nécessité de nous faire connaître et celle de rester discrets. Notre activité, notamment celle liée aux hébergements d’urgence et à l’accompagnement de migrants, comporte une dimension qui peut être vue de façon négative. Les mobilisations contre l’ouverture d’un Cada à Saint-Brevin (Loire-Atlantique) en sont un exemple. Il nous faut pourtant aller chercher la notoriété pour attirer, entre autres, des jeunes diplômés du travail social. Ce qui est indispensable pour notre survie. »

Alexia Pescreminoz, DRH de l’association Aurore
 


 

Une formation estampillée Nexem

Les fédérations et organisations professionnelles sont des appuis essentiels dans cette structuration de la marque associative. Nexem, qui représente les employeurs du secteur privé à but non lucratif, a mis en place une série d’outils pour accompagner ses adhérents : un livret d’accueil pour mieux intégrer les salariés, une trame d’entretiens de départ pour identifier d’éventuels points d’amélioration, un guide sur la marque employeur…

Depuis 2022, la fédération propose aux responsables RH une formation intitulée « Promouvoir sa marque employeur associative sur le web pour mieux recruter ». Au programme : l’élaboration d’une stratégie de contenus. « Ils doivent être attractifs, spécifiquement conçus pour les candidats visés, selon les standards du web et largement promus sur les différents canaux (site institutionnel, blog, site carrière, plateformes spécialisées, réseaux sociaux, newsletters…) », indique Nexem.

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