III. Prise en compte et protection de l’enfant
Les conjoints ne sont pas les seules victimes de la violence au sein du foyer : les enfants peuvent également être touchés, directement ou indirectement, par cette brutalité. Dans un premier temps, en cas de séparation, les législateurs ont cherché à préserver la relation entre le parent et l’enfant coûte que coûte. Au fil du temps, les textes ont changé, et la possibilité de retirer complètement ou partiellement l’autorité parentale au conjoint violent a été introduite.
A. De la volonté de garder le lien avec le parent violent…
Les coups infligés par un parent sur l’autre parent ne font pas qu’une seule victime. Au-delà des conjoints, les enfants peuvent être impliqués dans ces scènes de violence. Longtemps, l’idée a été de dire qu’il fallait que ceux-ci maintiennent des liens familiaux avec leurs deux parents. C’est notamment ce qu’avait prôné la loi du 4 mars 2002 relative à l’exercice conjoint de l’autorité parentale. A l’époque, certaines associations avaient souligné les risques d’un tel projet, concernant notamment la nécessité d’une médiation familiale en cas de séparation des parents. Elles avaient, entre autres, alerté sur la dangerosité d’un tel dispositif pour les femmes victimes de violences domestiques. Tout en passant outre les recommandations des collectifs féministes, la loi avait tout de même noté la possibilité pour le juge de contrôler l’exercice de l’autorité parentale en cas d’atteinte à la sécurité, à la santé ou à la morale des enfants.
Depuis lors, de nombreuses évolutions ont eu lieu, allant de la suspension de l’autorité du parent violent à sa suppression totale. L’un des texte a, de son côté, consacré l’enfant en tant que victime à part entière.
B. … au retrait de toute autorité parentale
La loi du 28 décembre 2019 visant à agir contre les violences au sein de la famille et la loi du 30 juillet 2020 visant à protéger les victimes de violences conjugales ont posé les premiers jalons de la protection de l’enfant exposé aux violences conjugales. Ces deux textes ont notamment permis :
→ la suspension de plein droit de l’autorité parentale en cas de condamnation pour un crime commis sur l’autre parent ;
→ la possibilité de retrait de l’autorité parentale du parent condamné pour un crime ou un délit envers son propre enfant ou l’autre parent.
La loi du 18 mars 2024 visant à mieux protéger les enfants victimes et covictimes de violences – entrée en vigueur le 20 mars 2024 –, est venue compléter le dispositif législatif. Elle étend notamment les champs des infractions pour lesquelles un parent violent peut se faire retirer totalement ou partiellement l’autorité parentale :
→ s’il est auteur, co-auteur ou complice d’une agression sexuelle commise sur son enfant, ou d’un crime commis à l’encontre de l’autre parent ;
→ s’il a été condamné comme co-auteur, auteur ou complice d’un délit commis sur son enfant, autre qu’une agression sexuelle incestueuse ;
→ s’il a été condamné comme co-auteur, auteur ou complice d’un délit commis sur l’autre parent ou complice d’un crime ou d’un délit commis par son enfant.
Par ailleurs, le texte crée une nouvelle situation de délégation forcée de l’autorité parentale, en cas de condamnation pour crime ou agression sexuelle incestueuse sur son enfant.
Enfin, la loi du 18 mars 2024 suspend automatiquement les droits de visite et d’hébergement lorsque le parent a fait l’objet d’une poursuite par le ministère public, d’une mise en examen par le juge d’instruction, a commis un crime visant l’autre parent ou son enfant ou une agression sexuelle incestueuse envers celui-ci.
En plus de restreindre ou de retirer les droits parentaux du conjoint violent, ce dernier peut se voir déchu des avantages liés à la convention patrimoniale en cas de condamnation pour des faits commis sur son compagnon.
Retrouvez le dossier juridique complet :
Violences conjugales : comment protéger les victimes ? (1/6)
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