S’ils travaillent d’ordinaire dans l’ombre, les mandataires judiciaires de la protection des majeurs (MJPM) sont loin d’être rares en France. En 2021, plus de 710 000 personnes majeures vivaient sous tutelle, curatelle ou sauvegarde de justice en raison d’une altération temporaire de leurs facultés psychiques, cognitives ou physiques(1). « Lorsque le juge estime que la famille est défaillante, il peut mandater un professionnel dont le rôle sera de faire en sorte que les droits fondamentaux de la personne protégée soient respectés, au même titre que tous les autres citoyens », informe Caroline Montrignac, MJPM libérale dans le Vaucluse.
Gestion courante
Selon le degré d’incapacité du majeur et l’étendue du mandat, le champ d’intervention du MJPM peut être vaste, allant de la réalisation des actes de gestion courante – règlement d’une facture d’énergie, souscription d’un contrat d’assurance, déclaration d’impôt sur le revenu… – à celle d’actes engageant le patrimoine – acheter ou vendre un bien immobilier, contracter un emprunt bancaire… « Il peut aussi m’arriver d’appeler un plombier pour déboucher des toilettes, de faire un peu de médiation avec les voisins, de prendre un rendez-vous médical ou d’être en lien avec les auxiliaires de vie pour l’entretien du logement. Je cherche des solutions en fonction des situations, mais j’essaie toujours de ne pas me substituer à la personne, ni à l’ensemble des interventions relevant du secteur médico-social », détaille Anne-Cécile Henry, mandataire judiciaire au sein de l’Udaf 44.
Dans ses missions, le mandataire doit faire primer l’autodétermination du majeur protégé, en ajustant les explications à sa compréhension. « Notre objectif est le retour à l’autonomie. Mon rôle est d’évaluer la capacité de la personne à faire ses démarches et, en cas d’inadéquation, de l’amener à demander la modification de la mesure auprès du juge pour l’adapter », complète son homologue à l’Udaf 44, Emilie Delarue. L’accompagnement se fait souvent sur le long terme, parfois jusqu’au décès de la personne. Une dimension du métier qu’apprécient nombre de mandataires car elle favorise l’instauration d’un lien de qualité. Elle exige de ce fait patience et diplomatie pour gagner la confiance de la personne protégée et de ses proches. « Cela peut prendre du temps car nous avons affaire à des personnes vulnérables, qui peuvent se méfier ou changer d’avis. L’écoute et le dialogue sont primordiaux », avertit Caroline Montrignac.
Licence professionnelle
A l’instar de nombreux mandataires, cette dernière a d’abord eu un parcours dans une profession juridique. Les personnes concernées forment, avec celles issues du secteur social, l’essentiel des effectifs, même si la profession tend à se diversifier et accueille des personnes d’horizons professionnels différents, comme l’immobilier, la banque ou le notariat. Tous ont toutefois suivi la même formation : le certificat national de compétence (CNC) de mandataire judiciaire à la protection des majeurs, qui était jusqu’alors un prérequis.
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Mais à compter de 2025, pour exercer des fonctions de protection et d’accompagnement, il faudra impérativement être titulaire d’une licence professionnelle avec mention « activités juridiques : MJPM », délivrée par les universités. Ne changeront pas les trois statuts permettant d’exercer son métier : salarié d’une association tutélaire, préposé d’un établissement ou à titre individuel. « En tant que préposée d’établissement de deux Ehpad, j’accompagne uniquement des résidents de ces structures, alors qu’ailleurs le public peut être plus varié, renseigne Jessica Padra, salariée de Constance Mazier, à Aubervilliers, et la Seigneurie, à Pantin (Seine-Saint-Denis). Dans tous les cas, c’est une profession un peu touche-à-tout où l’on ne s’ennuie jamais. »
(1) Source : ministère de la Justice.