Minima sociaux : qui y entre ? Qui y reste ? Qui en sort ? Pour le savoir, la DREES s’est livrée à un comparatif des trajectoires connues par les bénéficiaires du RSA (revenu de solidarité active), de l’ASS (allocation de solidarité spécifique, réservée aux demandeurs d’emploi en fin de droits) et de l’AAH (allocation aux adultes handicapés).
RSA: Allers-retours
Selon les chiffres ainsi collectés – et enrichis, à cette occasion, grâce à l’échantillon national interrégimes d’allocataires de compléments de revenus d’activité et de minima sociaux (Eniacrams)-, il apparaît que les allocataires du RSA étaient, en 2023, les populations connaissant le plus grand nombre d’allers-retours entre les minima sociaux.
Pour preuve : bien que 26% des bénéficiaires recensés fin 2023 ne l'aient pas perçu l’année précédente, les nouveaux entrants n’en restaient pas moins des habitués des dispositifs sociaux. Parmi les nouveaux entrants, il ne s’en trouvait que 8% à n’avoir perçu aucune autre allocation de solidarité entre 2013 et 2022 avant de se retrouver éligibles au RSA. « En moyenne, les bénéficiaires du RSA de 35 à 64 ans ont perçu des minima sociaux pendant six années sur les dix précédentes, 26 % ont même perçu un minimum social chaque fin d’année entre 2013 et 2022 », observe la DREES.
Toutes catégories de bénéficiaires des minima sociaux confondus, les allocataires du RSA -et avant lui du RMI, l’étude débutant son observation en 2007- sont ceux qui ont connu les parcours les plus hachés. Quelque 41 % d’entre eux ont connu au moins une sortie et un retour dans les minima sociaux au cours de la décennie 2013-2023. « Cela signale une instabilité pour une partie des bénéficiaires du RSA, qui peut témoigner d’une proximité avec le marché du travail supérieure à celle des personnes restées continûment dans les minima sociaux », ajoute la DREES.
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ASS: parcours "moins erratiques"
C’est du côté des allocataires de l’ASS que l’on retrouve les taux d’entrée les plus élevés : fin 2023, 30% de ses bénéficiaires ne percevaient aucun minima social l’année précédente. Quelque 17% n’en avaient d’ailleurs pas perçu au cours des dix années précédentes. « C’est le signe que les allocataires de l’ASS ont en moyenne connu des difficultés économiques moindres par le passé que les bénéficiaires du RSA ou de l’AAH », précise l’étude.
Ce sont également les publics « les moins erratiques » et les plus proches de l’emploi, selon la DREES puisque 31% avaient connu au moins une entrée et un retour dans les minima sociaux entre 2013 et 2023 (moins que les bénéficiaires du RSA). En revanche, ils étaient 30% à ne plus être assujettis à un minima social fin 2023, ce qui tend à indiquer que, de tous les allocataires, ils sont ceux qui en sortent le plus facilement. Une situation qui s’explique notamment par l’impossibilité de cumuler emploi et ASS plus de trois mois, alors que ce cumul n’est pas limité dans le cas du RSA (sauf en cas d’atteinte du plafond maximal de ressources autorisé pour y être éligible).
AAH: long maintien dans le régime
Enfin, les bénéficiaires de l’AAH connaissent un faible taux d’entrée dans le régime des minima sociaux… mais ont tendance à y demeurer très longtemps. Ainsi, 9% des allocataires adultes handicapés de la fin 2023 ne percevaient aucune prestation sociale l’année précédente. Un chiffre à pondérer toutefois en fonction du taux d’incapacité constaté puisqu’il s’élevait à 6% pour les reconnus « AAH 1 » (niveau de handicap supérieur à 80%), mais de 11% pour ceux reconnus « AAH 2 » avec un niveau de handicap compris entre 50 et 79%.
Seuls 4% des bénéficiaires de l’AAH en 2023 n’avaient bénéficié d’aucun minimum social durant la décennie précédente, « signe qu’une bonne partie des entrants dans l’AAH avaient déjà connu des difficultés sociales », analyse la DREES. Confirmation de cette persistance dans le régime des minima sociaux : en décembre 2023, ils étaient 55% à avoir perçu chaque année une prestation sociale depuis au moins 2013.
Par ailleurs, les allocataires de l’AAH constituent la catégorie qui connait le moins de sortie du régime des minima sociaux : seuls 5% de ceux qui en bénéficiaient fin 2022 en étaient sortis l’année suivante. Une situation que la DREES explique par la faible insertion des personnes handicapées sur le marché de l’emploi. « Elle est due aussi à des facteurs institutionnels : il est possible de cumuler revenus d’activité et AAH sans limite de temps et à des niveaux de revenus nettement plus élevés que dans le cas du RSA », précise l’enquête.
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