Entre le 1er novembre 2020 et le 31 octobre 2021, 1 330 expulsions de campements, de squats ou de bidonvilles ont eu lieu en France métropolitaine. C’est ce que révèle le rapport annuel de l’Observatoire inter-associatif* des expulsions collectives de lieux de vie informels, rendu public le 16 novembre. Il pointe une augmentation significative des évacuations menées par les forces de l’ordre au regard des chiffres de l’année précédente qui en recensaient 1 079 (lire notre article).
Sur cette dernière année, 472 personnes ont été expulsées quotidiennement. Les démantèlements ont eu lieu à 77 % sur le littoral des départements du Nord et du Pas-de-Calais, sur les communes de Calais, de Marck, de Coquelles et de Grande-Synthe. Viennent ensuite le département de la Gironde et ceux d’Ile-de-France, avec respectivement 95 et 86 évictions dénombrées.
Au regard de la concentration des évacuations, une grande disparité territoriale est à noter. Les décisions dépendant de la volonté des préfectures. « Il s’agit d’une politique peu solide et pas très sérieuse. C’est vraiment regrettable, car en matière de réduction des risques, lorsque la Délégation interministérielle à l’hébergement et à l’accès au logement (Dihal) et le secteur associatif accompagnent le public, les résultats sont probants », assure Manuel Domergue, directeur des études de la Fondation Abbé-Pierre, à l’occasion d’une conférence de presse organisée lors de la publication du rapport.
Accroissement de la précarité
En cause, l’accroissement de la précarité dû à la répression. Les réponses apportées par les pouvoirs publics face à l’installation des habitats de fortune conduisent rarement à des solutions efficientes en matière de relogement. Concernant l’accompagnement et l’insertion, elles donnent par ailleurs lieu à de multiples ruptures de suivi.
Pour preuve, sur les 1 173 évacuations analysées dans le rapport, 147 ont donné lieu à la mise à l’abri temporaire des personnes concernées. 1 % d’entre elles ont bénéficié d’un hébergement stable en structures dédiées à l’hébergement d’urgence ou spécialisées dans la demande d’asile. Trois expulsions ont donné lieu à des propositions d’orientation vers un dispositif d’insertion.
Pour les individus, ces actions répétées mènent vers « le retour à la rue, à l’errance, une rupture dans la scolarisation des enfants, les suivis médicaux et sociaux, et souvent, la réinstallation sur d’autres lieux de vie, bidonvilles, squats ou autres », résument les auteurs du rapport. Alors que la trêve hivernale permet de protéger d’une expulsion les locataires les plus vulnérables chaque année du 1er novembre au 31 mars, aucun répit n’est laissé aux habitants de squats, de campements ou de bidonvilles.
*Ce collectif recense depuis trois ans les expulsions de lieux de vie informels en France métropolitaine. Il est composé de plusieurs
associations : la Fondation Abbé-Pierre, Médecins du monde, la Ligue des droits de l’Homme, le Collectif national droits de l’Homme Romeurope, la Plateforme des soutiens aux migrant.e.s, Human Rights Observers, la Fédération nationale des associations solidaires d'action avec les Tsiganes et les gens du voyage et l’Association nationale des gens du voyage citoyens.