Accès aux services, aux formations, à l’emploi, à la mobilité ou au logement. Pour lutter contre les nombreux freins auxquels se confrontent les jeunes des territoires ruraux, plusieurs expérimentations ont été menées par l’Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire (Injep). Des initiatives organisées durant trois ans dans des départements traversés de zones isolées, tels que le Finistère, l’Isère ou l’Ariège. Publiées dans un rapport du ministère des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative, les conclusions attestent de difficultés pour sortir le public du déterminisme social.
> Sur le même sujet : Précarité : Comment accompagner efficacement les plus vulnérables ?
Pour autant, les évaluations mettent en perspective trois types d’effets positifs sur les jeunes concernés : la sortie de l’isolement pour les individus accompagnés sur le long terme, une meilleure connaissance des ressources locales et une montée en compétences sur l'ingénierie de projets.
Renforcer l’accès aux droits
Financé par le Fonds d’expérimentation pour la jeunesse (FEJ), le programme s’est fondé sur la mise en place d’initiatives par les acteurs du territoire pour renforcer l’image positive de la jeunesse en l’impliquant dans la conception de politiques publiques qui la concernent. L’objectif ? Encourager la création d’activités et améliorer l’accès des jeunes aux services de prévention et de soins.
> A lire aussi : Pays de la Loire : la coupe budgétaire sans précédent des missions locales
« Dix projets ont ainsi été sélectionnés par un jury composé d'experts et de représentants institutionnels et administratifs […]. Ces expérimentations ont été déployées avec une enveloppe globale de 1,5 million d’euros couvrant les financements et les évaluations des projets retenus », détaillent les auteurs du rapport.
9 115 enfants et jeunes âgés de 6 à 30 ans, voire 35 ans pour certains, ont ainsi été accompagnés ou ont bénéficié d'actions de sensibilisation. Le tout, entre juillet 2020 et décembre 2023. Les activités ont été menées collectivement ou individuellement autour de programmes professionnels, culturels ou sociaux sur des champs variés : pépinières, coopérative de services, tiers-lieu, ateliers de découverte des métiers, entreprise de community management…
« Six projets sont portés par des réseaux ou fédérations nationales ou régionales d’association, un projet par une association locale, deux projets par des structures d'animation locales (MJC et centre socioculturel) et un dernier par une collectivité territoriale. Sept projets visent à accompagner la création d’activités professionnelles, culturelles ou sociales par les jeunes dans les territoires ruraux », souligne le rapport.
Des professionnels pas suffisamment formés
Sur le volet de l’insertion professionnelle, le bilan est mitigé. Si les individus aux capitaux scolaires et économiques plus développés s’intègrent mieux que les autres, seule une partie de ces jeunes ont développé une initiative leur garantissant un revenu. « Dans certains projets, la mise en relation avec des acteurs clés de leur soutien (élus, spécialistes du domaine, potentiels clients, etc.) a été décisive. Néanmoins, de même que pour l’identification des ressources locales, la mise en réseau a été assez variable en fonction des réseaux et connaissances propres aux accompagnateurs », constatent les évaluateurs.
> Sur le même sujet : Comment les publics précaires sont placés en concurrence ?
Autre point d’achoppement : la formation des professionnels n’était pas toujours suffisante pour accompagner les jeunes à développer des activités de nature économique, y compris relevant de l’économie sociale et solidaire.
L’aide autour de la création d’activités se révèle, quant à elle, positive. Selon le document, elle offre une porte d’entrée efficace et non stigmatisante pour un accompagnement social plus large. Les professionnels ont aussi l’occasion de personnaliser leur approche grâce à un travail par projets et à une réelle proximité avec les jeunes. « Pour ceux qui en émettent le souhait, l’accompagnement peut consister en un suivi de diverses démarches : professionnelles (appui à la rédaction de curriculum vitae, lettre de motivation, recherche d’offres d’emploi ou de stages, dépôt de candidatures, etc.), scolaires, sociales (accompagnement aux démarches administratives, orientation vers des structures adaptées, etc.) ou encore médicales (prise de rendez-vous médicaux entre autres) », pointe le rapport.
Autant de leviers qui permettent aux accompagnateurs d’engager un suivi social plus approfondi pour, le cas échéant, orienter les jeunes vers d’autres types de soutien.
Les limites de « l’aller vers »
Autres points positifs : grâce à l’investissement sur un projet commun, certaines actions collectives permettent de rompre l’isolement. A terme, une majorité de jeunes sont parvenus à identifier correctement les ressources locales de leur territoire, entre autres, grâce aux créations d’activités pour lesquelles il a fallu communiquer.
> A lire aussi : Justice des mineurs : bientôt un durcissement des peines ?
Dans la perspective d’aller à la rencontre des jeunes, de les informer sur leurs droits et sur l’existence de services de proximité, les deux projets nommés « En route vers la santé » et le « Lieu mobile » ont fait le choix de proposer une offre itinérante à un public âgé de 6 à 30 ans. « La souplesse des dispositifs a permis de combiner plusieurs formes d’intervention et d’accueil du public. Les véhicules ont pu devenir des points d’information, des lieux de consultation individuelle avec une psychologue ou une travailleuse sociale, des espaces de rencontre ou le support d’actions de prévention et de promotion de la santé. »
Le rapport conclut néanmoins que si les jeunes connaissent mieux leurs droits à l'issue de ces expérimentations, une médiation plus approfondie s’avère nécessaire pour une mobilisation effective des services.
>> Découvrir l’intégralité du rapport Agir auprès de la jeunesse en milieu rural