Elles sont aide à domicile, technicienne de l’intervention sociale et familiale (TISF), assistante maternelle, éducatrice spécialisée, auxiliaire de vie sociale, aide-soignante, assistante familiale et accompagnante éducative et sociale. A elles huit, elles ouvrent une porte sur l’univers encore bien trop méconnu du lien. Pendant deux ans, Vincent Jarousseau a suivi ces travailleuses « essentielles » afin de restituer leur parcours et leurs conditions de travail dans un livre hybride, entrelaçant bande dessinée et roman-photo documentaire. « Rendre compte de la situation de ces femmes laissées dans l’ombre, faire ressentir la complexité et la diversité des expériences, loin des clichés misérabilistes, tel est le but de ce documentaire », détaille le photojournaliste en préambule de l’ouvrage.
Au fil des pages, on découvre tour à tour les portraits de ces professionnelles, tantôt dans l’Avesnois, territoire rural du Nord, tantôt en Seine-Saint-Denis, département situé au nord-est de Paris. Chaque fois, le lecteur plonge dans leur enfance et est amené à comprendre les raisons pour lesquelles elles ont choisi leur métier. Il peut ainsi percevoir l’ampleur du lien tissé avec les personnes accompagnées et toucher du doigt ce que représente le manque criant de reconnaissance dans leur quotidien.
« La classe ouvrière telle qu’elle a été définie au XIXe siècle et au XXe siècle a disparu, elle a laissé la place à la notion plus vague de classes populaires (au pluriel). La société de services, largement portée par les femmes du lien, est pourtant une nouvelle classe ouvrière », constate Vincent Jarousseau, qui s’interroge : « Notre société veut-elle reconnaître les légitimes aspirations sociales de ces ouvrières ? » Et d’ajouter : « Un jour ou l’autre, chacun d’entre nous, à différentes étapes de sa vie, aura affaire à ces femmes ; nous serons entre leurs mains. »
« Les femmes du lien » – Vincent Jarousseau, dessins de Thierry Chavant – Ed. Les Arènes, 24,90 €.