« L’hygiène corporelle est fondamentale pour conserver sa dignité, restaurer son image et retrouver l’estime de soi », confie Sara Le Goff coordonnatrice de l’association La Bulle douche nomade. Monitrice-éducatrice, elle a créé cette structure il y a cinq ans avec Noémie Ollier, également monitrice-éducatrice, et deux amis. L’idée : installer à l’intérieur d’un camping-car une salle de bains suffisamment grande pour offrir à des personnes sans domicile, ne fréquentant pas les accueils de jour de Montpellier, la possibilité de se laver confortablement. A côté, un salon spacieux leur permet de se poser, de boire un café. Et de se confier un peu. Quatre jours par semaine, l’après-midi ou le soir, les deux intervenantes garent leur camion ici et là, en fonction des appels reçus. « Nous allons rencontrer les personnes à l’endroit même d’où elles nous ont appelés », précise Sara Le Goff. Les bénéficiaires leur sont parfois signalés aussi par des citoyens ou envoyés par le 115. En 2021, 220 personnes ont pu profiter du dispositif dont trois quarts d’hommes. Et quelque 1 000 échanges ont eu lieu.
« Ces travailleuses sociales ont réussi à créer un lieu intimiste où des gens venus avec un mal-être ou une tension sont plus apaisés juste après une douche », observe Lucas Vigroux, chargé de mission sur la veille sociale au service intégré d’accueil et d’orientation de la métropole (SIAO 34). Ils abordent plus facilement certains sujets. » Venir se laver et repartir avec des produits d’hygiène et des vêtements propres attribués de façon personnalisée est un objectif en soi. Orienter vers une prise en charge plus large en est un autre. « L’hygiène est le prétexte », confie Sara Le Goff. Une première étape vers la ré-inclusion sociale. « Autour d’un café, on peut parler de tout, créer un lien de confiance », ajoute-t-elle.
Lutter contre la grande exclusion
Tous trouvent ici une écoute bienveillante et, surtout, un service à même d’activer le réseau des structures montpelliéraines qui relèvent de l’aide aux publics en situation de précarité. Comme les lieux où trouver un repas, un petit-déjeuner, nettoyer son linge, être orienté ou se faire accompagner par un travailleur social, ou encore se procurer une boîte postale dans un accueil de jour ou au Samu social. « Nous travaillons avec tous les acteurs de première ligne de la veille sociale », assure la monitrice-éducatrice, qui ajoute : « Nous nous donnons aussi pour mission de cerner les demandes, notamment s’il y a besoin de soins. » En fonction de ceux-ci, les permanences de Médecins du monde pourront être les premiers lieux de consultation. En attendant d’être, si nécessaire, ramené vers le droit commun pour bénéficier d’une couverture santé. Quant aux personnes qui présentent des conduites addictives, elles sont dirigées vers des lieux spécifiques à la réduction de risques.
Bénévoles au départ, les deux professionnelles sont, depuis deux ans, salariées à temps partiel de l’association. « Autrement, nous n’aurions pas pu continuer, confie Sara Le Goff. Nous n’avons pas les moyens de faire plus, nous devons renouveler chaque année nos demandes de financement. » Pour assurer les maraudes (181 l’année dernière), les deux femmes s’appuient sur une quinzaine de volontaires. Certains ont une spécificité, comme Hervé qui parle allemand, ou Arnaud, coiffeur, qui a instauré une séance « coupe de cheveux » deux fois par mois. « Elles composent chaque jour avec le travail des uns et des autres face à des gens très démunis, en intégrant bien la vision du bénévole dans le fonctionnement », salue Lucas Vigroux. Au point de vouloir créer un module formation « Accueil » pour les préparer aux réalités de cet engagement.
