La France compte plus d’un million de personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer ou apparentée. Et 90 % d’entre elles présentent au moins un symptôme psychologique et comportemental de la démence (SPCD). Ces troubles impactent la qualité de vie des malades, fragilisent et réduisent leur autonomie mais agissent aussi sur l’accompagnement des aidants familiaux. A titre d’expérimentation, le CHU de Nice, soutenu entre autres par la Fondation Médéric Alzheimer, a lancé en décembre 2020 le projet Psydoma (Psychologues à domicile pour la maladie d’Alzheimer et psychoéducation des aidants). Porté par Olivier Guérin, chef du pôle gériatrique du CHU de Nice, et la psychologue Anne-Julie Vaillant-Ciszewicz, ce dispositif, entièrement gratuit pour les bénéficiaires, fournit un accompagnement pluridisciplinaire personnalisé aux malades et aux aidants à domicile.
« Sur une période divisée en deux phases de sept mois, une équipe composée de deux gérontopsychologues, une ergothérapeute et une infirmière coordinatrice se rend, trois fois par semaine, au domicile du couple aidant-aidé et lui propose des activités basées sur des approches thérapeutiques non médicamenteuses (ANM), les plus adaptées possible au malade et à son histoire : musicothérapie, stimulation sensorielle, ateliers de relaxation, ateliers mobilité, stimulation de la mémoire, etc., explique Anne-Julie Vaillant-Ciszewicz. Parallèlement, un programme psychoéducatif comprenant des exercices pratiques (contrôler le débit de sa voix, travailler les expressions du visage, l’articulation des mots…) et des apports théoriques sont dispensés auprès de l’aidant. L’idée est qu’il apprenne à affronter les comportements parfois difficiles liés à la maladie. »
Retarder l’entrée en Ehpad
Alors que la seconde phase de l’étude a débuté en novembre 2021 auprès de 16 couples aidants-aidés, vivant à Nice où dans les communes limitrophes, le moment n’est pas encore au bilan. Néanmoins, un certain nombre de constats ont pu être pointés. « Si les ANM sont les mêmes qu’en Ehpad, elles semblent plus efficaces à domicile, note Alice Cuni, l’une des deux gérontopsychologues. Etre dans un environnement familier rassure la personne souffrante et semble contribuer à réduire les troubles, principalement son anxiété. » Ce qui, par réciprocité, peut alléger l’aidant.
L’objectif initial de Psydoma était de retarder l’entrée en établissement de la personne Alzheimer en diminuant au maximum les troubles du comportement. Mais paradoxalement, et sans grande surprise, « à l’issue de la première phase, nous avons remarqué que le dispositif mettait surtout en évidence le besoin de répit de l’aidant, souligne Anne-Julie Vaillant-Ciszewicz. L’aidant a besoin d’apprendre à gérer ses émotions. Il est donc nécessaire d’être flexible et de personnaliser encore plus les séances psychoéducatives et de l’orienter au mieux dans ses décisions. »
Autre enseignement : Psydoma ne semble pas adapté aux symptômes sévères ni à la fin de vie. Ainsi, un couple aidant-aidé a quitté l’expérimentation avant son terme. « Non pas que cela ne fonctionnait pas, renseigne la psychologue, mais parce que la personne malade avait des troubles de plus en plus importants. L’aidant était complétement épuisé. Notre solution n’était donc plus la bonne. L’accueil de jour répondait plus à leur situation. »
