« Protégeons les aînés sans les isoler. » Tel est le leitmotiv du gouvernement pour ce reconfinement. Ainsi, le 28 octobre, Emmanuel Macron a annoncé que les visites en maisons de retraite et en Ehpad (établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes) seraient « cette fois autorisées dans le strict respect des règles sanitaires ». Pour le chef de l’Etat, il s’agit d’« éviter que ne se nouent des drames humains » comme ceux vécus au printemps, et que « des personnes en fin de vie se retrouvent totalement isolées ».
Fortement décriés lors de la première vague, l’isolement en chambre et l’interdiction des visites pendant plusieurs semaines ont, en effet, été vécus comme un traumatisme par les résidents et leurs familles, qui demandaient de façon insistante à ne pas revivre la même situation. Ils ont été entendus. Avec un impact positif sur l’organisation des Ehpad. « Il n’y a plus besoin d’avoir une logistique particulière, différentielle. Nous n’organisons plus d’activités ou de sorties individuelles. Nous faisons aussi moins d’appels en visio. Tout cela nécessitait une ingénierie et des moyens que l’on avait du mal à avoir. Cela va nous faciliter la vie », assure Elise Gambier, directrice de l’Ehpad public La Maison de Jeanne, à Villers-Bocage (Calvados). Cependant, avec le maintien des visites, il va falloir trouver, encore plus que lors de la première vague, un juste équilibre entre les enjeux de sécurisation et la liberté des personnes âgées. D’autant que, dans certains établissements, « les directeurs sont obligés de faire la police car les familles ne respectent pas les gestes-barrières », renseigne Annabelle Vêques, directrice de la Fnadepa (Fédération nationale des associations de directeurs d’établissements et services pour personnes âgées). « Il ne peut pas y avoir uniquement du sanitaire. Il doit systématiquement y avoir un questionnement éthique dans la façon dont nous menons l’accompagnement de nos seniors », estime Johan Girard, délégué national « filière personnes âgées et domicile » à la Croix-Rouge.
Mais, dans l’ensemble, la situation est cette fois différente. « Aujourd’hui, les protocoles sont connus, les matériels sont mis à disposition, les surcoûts dûs à ces matériels sont pris en compte. Ajoutées à cela les primes et les revalorisations salariales. Le contexte est plus simple à gérer », constate Romain Gizolme, directeur de l’AD-PA (Association des directeurs au service des personnes âgées). A ce jour, les acteurs du secteur ne constatent donc aucune difficulté sur le terrain, si ce n’est lorsque le Covid pénètre massivement dans un établissement.
« Alors que la hotline juridique de la Fnadepa débordait d’appels en mars-avril, pour l’instant nous avons moins d’appels au secours. Les Ehpad maîtrisent », se félicite Annabelle Vêques. Mais la situation peut très rapidement évoluer. Si, pour l’heure, un peu moins de 10 % des structures sont touchées, lors de la première vague, il n’avait fallu que quelques jours pour atteindre les 25 %. « On sait que la situation épidémiologique est amenée à flamber dans les prochaines semaines. Nous sommes donc très vigilants. Les jours à venir ne vont pas être simples », assure la directrice de la Fnadepa. Conscients de cela, la ministre déléguée à l’autonomie, Brigitte Bourguignon, et la DGCS (direction générale de la cohésion sociale) ont décidé de réunir régulièrement les acteurs du grand-âge pour faire des points d’étape. Et prendre, au besoin, des mesures plus contraignantes.
Le 1er novembre, le ministère des Solidarités et de la Santé a mis en ligne les nouvelles consignes de sécurité et mesures de protection à respecter dans les établissements pour personnes âgées. Voici les principales :
• Les visites extérieures sont strictement encadrées afin que les résidents puissent continuer à recevoir leurs proches. Il est absolument indispensable que tous les établissements mettent en place ces mesures d’encadrement des visites.
• Les sorties dans les familles sont suspendues temporairement.
• Les accueils de jour ne disposant pas d’entrée séparée sont fermés.
• Les visites des professionnels et des bénévoles formés sont maintenues pour éviter au maximum les ruptures d’accompagnement.
• Les établissements qui le peuvent constituent des secteurs dédiés aux cas suspects ou confirmés (secteurs « Covid ») afin d’éviter le confinement des résidents dans les chambres.