L’organisation est en cours. Alors que la France connaît son second confinement en raison de la montée de la seconde vague de l’épidémie de Covid-19, la mise à l’abri et la prise en charge des personnes les plus précaires sont urgentes. Et le parc d’hébergement d’urgence, qui compte 180 000 places en fonctionnement actuellement, ne suffit pas. « Le niveau de place est élevé. Mais de nombreuses personnes dorment encore dehors », explique Florent Gueguen, directeur de la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS), qui rassemble 80 % des centres d’hébergement français. « Les chiffres d’appels au 115 ne sont pas bons. Et ils se dégradent dans les grandes métropoles », précise-t-il.
Une situation qui perdure, puisque les remontées chiffrées font état d’une augmentation des demandes non pourvues depuis l’été. Par exemple, en septembre, le jour de la rentrée scolaire, 4 000 personnes en famille n’ont pas reçu de réponse favorable de la part des services sociaux pour être logées. De plus, malgré les réunions régulières des associations avec la ministre déléguée chargée du logement, Emmanuelle Wargon, les places supplémentaires se font rares. « Nous avons vraiment besoin de nouveaux sites. Nous espérons ouvrir 200 places dans deux structures parisiennes ces prochains jours », indique Bruno Morel, directeur général d’Emmaüs Solidarité.
Anciennes auberges de jeunesse, bureaux vides… Différentes alternatives existent pourtant pour faire face aux urgences sanitaires et climatiques qui accentuent la vulnérabilité des sans-abri. Des lieux qu’il faut ensuite « armer » avec des lits, du matériel de cuisine et des points d’eau. « Heureusement, nous savons plutôt bien le faire », indique Bruno Morel. Pour accélérer le processus, la FAS demande par ailleurs la création de cellules départementales réunissant tous les acteurs (bailleurs, associations…).
Des limites aux ressources humaines
En parallèle, assurer la continuité des services implique aussi, à la manière des soignants, de pouvoir compter sur les professionnels qui accompagnent les plus démunis. « Ils sont épuisés par la situation », déplore Florent Gueguen. Ce ressenti est unanime. Alors que la première vague a fortement mobilisé les travailleurs sociaux, la fatigue et la résignation se font à présent sentir. Et, de manière inédite, la question des ressources humaines s’ajoute aux habituelles recherches de budgets et de solutions foncières.
Il est en effet difficile de trouver des personnes supplémentaires pour du travail temporaire. « Lors de la première vague, le personnel de certains centres a chuté de 30 %. Pour cette fois, nous n’avons aucun recul », explique Florent Gueguen. Pourtant, les protocoles sanitaires sont maintenant bien intégrés et les réserves de gel et de masques en quantité suffisante au sein des différentes structures. Les solutions d’isolement des personnes testées positives, qui pourraient rassurer, sont de facto très contraignantes pour assurer le travail social. C’est le constat réalisé par Marion Crepet, cheffe de service de l’hébergement d’urgence pour demandeurs d’asile (Huda) de Lyon-VIII pour l’association Forum réfugiés-Cosi, qui prend en charge 175 personnes en logements collectifs avec une équipe de 9 salariés. « Contrairement à la précédente vague, les services de l’Etat sont maintenus. La logistique due au protocole sanitaire vient donc s’ajouter à l’accompagnement social et au flux des demandeurs d’asile sans possibilité d’isolement, alors que de nombreuses personnes vulnérables sont hébergées et que l’urgence sanitaire n’en est qu’un parmi d’autres. » D’énormes responsabilités pèsent donc sur ces professionnels, qui n’ont, par ailleurs, pas de solution pour se ressourcer par des activités sur leur temps libre. Le manque de visibilité sur la durée de cette deuxième vague accentue également leur inquiétude.