Les confinements successifs ont été marqués par les longues files d’attente devant les centres de distribution alimentaire. « La crise a donné à voir des pauvretés déjà installées », estiment Véronique Devise et Vincent Destival, respectivement présidente nationale et délégué général du Secours catholique.
L’enquête statistique annuelle de l’association, qui porte sur 770 000 personnes en 2020, s’appuie aussi sur une étude complémentaire menée auprès de 1 088 ménages qui ont reçu quelques-uns des 500 000 chèques-services de l’organisation.
Chiffres en hausse
L’année 2020 a vu augmenter les demandes d’aide alimentaire. Celles-ci ont concerné plus de la moitié des ménages rencontrés par les bénévoles. Ce phénomène s’inscrit dans un contexte de croissance du nombre de personnes ayant recours à un tel soutien : ils étaient 2,6 millions en 2006, 5,5 millions en 2017 et entre 5 et 7 millions en 2020.
L’association souligne que « 27 % des ménages auxquels nous avons remis des chèques-services subissent une insécurité́ alimentaire grave. Autrement dit, il leur arrive régulièrement de ne prendre aucun repas de la journée ».
Première cause de cette difficulté alimentaire : le manque d’argent. Les ménages avec un niveau de vie mensuel inférieur à 600 € formulent fréquemment une demande d’aide. La pauvreté frappe d’abord les jeunes. Près de trois personnes sur quatre accueillies cette année au Secours catholique ont moins de 45 ans, contre moins de la moitié dans la population générale. « La pauvreté frappe donc d’abord les jeunes actifs et leurs enfants », pointe le rapport. Le nombre de jeunes de moins de 25 ans augmente de 6 points par rapport à 2019.
Des familles monoparentales à 29 %
Olivier de Schutter (1), rapporteur spécial de l’ONU sur l’extrême pauvreté et les droits de l’Homme, est frappé de voir combien les jeunes ont été particulièrement fragilisés. « Etant présumés aidés par leurs parents, ils ne bénéficient pas du RSA. Cela explique leur taux de pauvreté́ excessif, qui se répercute sur les chiffres de l’aide alimentaire. »
L’étude laisse apparaître deux mouvements parallèles. « La période de confinement a précipité dans la pauvreté́ des personnes (étudiants, intérimaires, auto-entrepreneurs, etc.) qui étaient sur le fil. »
Mais la crise a aussi aggravé les problèmes des personnes déjà en situation de pauvreté. La part des familles monoparentales accueillies à l’association (29 %) est plus de trois fois plus importante que dans la population générale (9 %). Le taux d’hommes seuls de plus de 60 ans croît également : de 9 % en 2010 à̀ près de 14 % en 2020.
(1) Olivier de Schutter est également professeur de droit à l’Université de Louvain en Belgique.