Actualités sociales hebdomadaires : Pourquoi déposer cette proposition de loi maintenant ?
Monique Iborra : Je travaille sur cette thématique du grand âge depuis quatre ans. J’ai publié un rapport en 2018 avec Caroline Fiat [députée LFI]. Au total, sept rapports ont été rendus depuis à l’exécutif. Nous sommes tous en attente de la loi « grand âge » depuis 2019. Elle n’arrive pas. Il y a quatre mois, j’ai donc décidé de me repencher sur le sujet, d’où ma proposition de loi (PPL) . Et je ne suis pas la seule : Audrey Dufeu (LREM) en a déposé une récemment, et Annie Vidal (LREM) devrait en proposer une prochainement sur la bientraitance. Peut-être ne sommes-nous pas suffisamment habitués à ce que les députés déposent des propositions de loi. En effet, la plupart du temps, cela vient directement de l’exécutif. Mais c’est notre rôle.
Il y a quelques mois, j’ai signé, comme d’autres députés, une lettre demandant au Premier ministre de mettre en œuvre la loi « grand âge ». Ma proposition de loi n’est pas du tout en concurrence avec cette future réforme, que j’attends avec impatience. Je n’ai pas la prétention de la remplacer. Mais j’ai l’ambition d’apporter ma pierre à l’édifice. D’autant que certains ne se privent pas de dire que les députés En marche n’ont pas été capables de déposer une PPL sur le sujet…
Ne craignez-vous pas que cela engendre une certaine cacophonie et ajoute des doutes quant à la réalité d’une future loi ?
M. I. : A lire la presse, un texte circule. Celui-ci serait, semble-t-il, le projet de loi de la future réforme du grand âge. C’est absolument faux ! En tout cas, à l’Assemblée, nous n’en avons pas du tout entendu parler. J’ai récemment téléphoné au cabinet de la ministre [Brigitte Bourguignon, Ndlr] pour savoir ce qu’il en était. Il m’a été dit qu’il s’agissait d’un document de travail qui n’avait pas vocation, a priori, à être publié. Ils m’ont confirmé que rien n’est tranché pour le moment. Faire fuiter ce document de travail, qui est un document de l’administration centrale, n’est pas opportun. Mais on ne peut pas empêcher certains de vouloir mettre en concurrence l’Assemblée nationale et l’exécutif. Ce qui n’est pas du tout le cas.
Je conçois que l’on puisse être un peu étonné, mais je n’ai pas travaillé en catimini. J’ai prévenu le gouvernement et il m’a donné son feu vert. Ce qui peut surprendre aussi, c’est que la réforme soit prête. Il y a eu tellement de rapports, de consultations, de propositions et même une concertation nationale de grande ampleur… Cette loi, non seulement nous la voulons, mais nous avons tous les éléments pour la construire.
Les députés doivent participer à l’élaboration du futur texte. Je ne veux pas d’une loi tout droit sortie du chapeau de l’administration centrale, ni d’un plan, ni d’une loi d’adaptation, il y en a déjà trop eu. Ce que je produis ambitionne de réformer en profondeur le secteur. C’est cela, le plus important.
Un certain nombre de propositions figurent dans votre projet de loi. Comment comptez-vous les financer ?
M. I. : Je propose un tarif « socle » dans le secteur du domicile. Son montant doit être fixé par décret, par le pouvoir réglementaire. Je n’ai donc pas à l’indiquer dans ma PPL. Ce n’est pas le rôle de la loi. En revanche, la loi doit prévoir le financement. Et en ce qui concerne ce tarif, j’ai interrogé le cabinet du Premier ministre. Il m’a été assuré que ce serait fléché dans le prochain PLFSS [projet de loi de financement de la sécurité sociale]. Ce que j’avance dans ma PPL est finançable. D’autant qu’en plus de la création de la cinquième branche, il y a le plan de relance, dont 2 milliards d’euros sont consacrés aux Ehpad. Evidemment, j’en ai tenu compte aussi en écrivant ma proposition de loi.