"Au fil des mois, la dynamique du plan s'est essoufflée", pointe la sénatrice (centriste) Valérie Létard, dans son rapport consacré à l'évaluation du plan autisme 2008-2010 remis jeudi 12 janvier à Roselyne Bachelot, ministre des Solidarités et de la Cohésion sociale, alors qu'étaient organisées les premières rencontres parlementaires sur l'autisme, déclaré "Grande cause nationale" le 20 décembre dernier.
Si elle souligne de "réelles avancées", notamment sur le plan des connaissances et de l'élaboration de recommandations de bonnes pratiques sur l'autisme, la réalisation et l'évaluation de nouveaux modèles d'accompagnement, la création sur cinq ans de 4 100 places supplémentaires, "les progrès significatifs, bien qu'incomplets, de l'organisation de la prise en charge des diagnostics enfants", ou encore le renforcement des centres de ressources autisme (CRA), Valérie Létard juge cependant indispensable de relancer la dynamique de ce plan.
Relancer la dynamique
En effet, si "la plupart des mesures relevant de la responsabilité des directions des ministères sociaux ont été mises en oeuvre", celles qui dépendaient de l'interministériel ne sont en revanche "qu'en début de réalisation, voire non commencées (logement, emploi, adultes…)".
La mission conduite par Valérie Létard estime cependant que "la conception du plan garde toute sa pertinence et n'a pas besoin d'être reprise" mais qu'il faut "la relancer, s'assurer de la mise en oeuvre effective des mesures, (...) et conforter les acquis".
Après un état des lieux de l'autisme en France, qui pointe notamment le "retard important de la prise en charge" dans notre pays, et le bilan de la mise en oeuvre des 30 mesures du plan autisme 2008-2010, la troisième partie du rapport recense donc 50 propositions.
Améliorer le diagnostic précoce
Le premier volet de propositions concerne l'appropriation et la mise en oeuvre effective de l'état des connaissances et recommandations actualisées de l'HAS et de l'ANESM.
Deuxième axe : améliorer le diagnostic précoce et l'organisation de la continuité et la disponibilité de l'accompagnement, notamment en confortant l'action des CRA et en formant les professionnels de santé au dépistage (généralistes, pédiatres, médecins de PMI, personnels de santé scolaire).
"Tous les enfants, partout en France, doivent pouvoir être diagnostiqués de manière précoce", insiste ainsi la sénatrice. Diagnostic qui doit ensuite "se poursuivre par un accompagnement adapté", afin de "mettre en place les soutiens adaptés pour assurer le développement de l'enfant et prévenir, autant que faire se peut, les retards liés au handicap".
Il s'agit notamment d'assurer les relais nécessaires auprès des professionnels chargés des soins et de l'accompagnement des enfants et de leur famille, ainsi que l'articulation avec les équipes pluridisciplinaires de la Maison départementale des personnes handicapées (MDPH).
Mieux accompagner les adultes
Autre levier essentiel à la réussite du plan et qui doit donc être "priorisé" : la formation, autant auprès des professionnels que des aidants.
Le rapport insiste par ailleurs sur un champ "trop largement oublié", celui de l'accompagnement des adultes autistes. Car si des progrès considérables ont été réalisés dans ce domaine pour les enfants, pour les adultes, "mises à part quelques rares réussites locales, l'essentiel reste à faire".
La mission propose dans ce cadre de "favoriser l'émergence au niveau régional ou interrégional de centres/équipes expertes afin de garantir à terme et de façon progressive le niveau de qualité et l'appui pour les cas complexes", de développer des pôles territoriaux d'évaluation clinique et fonctionnelle en réseau, ou encore de mettre en place "selon les territoires et l'offre existante, des équipes mobiles interdisciplinaires ayant pour mission de gérer les situations complexe".
Modèles d'accueil pour les 18-25 ans
Valérie Létard veut également encourager le développement de nouvelles formes d'accompagnement afin de "faciliter les projets d'insertion professionnelle en milieu ordinaire des adultes avec autisme en capacité de le faire" et développer le Samsah comme alternative à l'obligation d'admission en institution.
Il faut aussi raisonner en parcours de vie et éviter les ruptures de prise en charge, plaide encore la sénatrice du Nord, qui juge qu'il manque une transition vers l'âge adulte pour les adolescents autistes. Elle propose donc d'expérimenter des modèles d'accueil et d'accompagnement pour les 18-25 ans pour assurer cette continuité et "travailler aussi l'accompagnement dans le logement et l'emploi".
Autre préoccupation : l'anticipation des besoins des personnes handicapées vieillissantes vivant à domicile. La mission préconise notamment de développer dans chaque région des aides à domicile "labellisées autisme" et de favoriser le développement des appartements et des petites maisons d'accueil, à proximité de la famille.
Une gouvernance rénovée
Enfin, il faut redynamiser le pilotage du plan avec une gouvernance rénovée notamment en affichant "clairement le pilotage interministériel" et en intégrant le rôle et la place de l'ARS dans la mise en oeuvre du plan et le niveau régional du pilotage du plan.
Tous ces efforts doivent par ailleurs se conjuguer avec une "offre suffisante et adaptée de places". Et si Valérie Létard se dit consciente de la crise budgétaire "profonde" que le pays traverse, elle se déclare "convaincue que, dans les arbitrages des prochaines années, l'effort de création de nouvelles places en faveur des personnes autistes devra rester un des axes forts de la politique du handicap".
Avant de se déclarer en conclusion "optimiste", ne "doutant pas que les pouvoirs publics n'aient à coeur de relancer la dynamique du plan".
"Evaluation de l'impact du Plan autisme 2008-2010 - Comprendre les difficultés de sa mise en oeuvre pour mieux en relancer la dynamique", rapport remis par Valérie Létard le 12 janvier 2012, décembre 2011.
E.C.
