« En temps normal, la liste d’attente pour entrer en établissement est très importante. Et le turn-over très rapide. Mais, en ce moment, les entrées s’effectuent au compte-gouttes. J’ai même encore 12 lits disponibles », assure Bruno Ogeix, cadre de santé à l’Ehpad (établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes) L’Ombelle de Maringues (Puy-de-Dôme). Une baisse du taux d’occupation liée selon lui à la crise sanitaire. D’autant que sa structure a récemment été touchée par le virus. « En février, sur nos 142 résidents, 84 ont été contaminés. Si la plupart ont été asymptomatiques, nous avons tout de même eu 18 décès », témoigne-t-il. Conséquence : des chambres demeurent à ce jour inoccupées. Une situation qui s’observe à l’échelle nationale.
Très durement frappés lors de la première vague, les Ehpad n’ont pas pu, pendant de longs mois, accueillir de nouveaux résidents. « Le Covid a eu un impact négatif sur les admissions, déplore Aymeric Mathias, directeur des opérations France du groupe Korian. Le taux d’occupation a subi un nombre de décès évidemment plus élevé que d’habitude, mais aussi l’inquiétude des familles. Elles avaient peur d’un reconfinement et de ne pouvoir voir leur parent pendant de longues semaines. »
« Des taux d’occupation dramatiquement bas »
Pour le premier groupe d’Ehpad commerciaux en France (avec près de 500 établissements), lors de la première vague, « le taux d’occupation a baissé de 5 points environ. Nous avons regagné les deux tiers pendant l’été 2020 avant de reperdre ce que nous avions gagné pendant la deuxième vague ». « En juillet, dans le privé comme dans le public, tous les établissements se sont retrouvés avec des taux dramatiquement bas, pouvant parfois descendre à 80 % », insiste Florence Arnaiz-Maumé, déléguée générale du Syndicat national des établissements et résidences privés pour personnes âgées (Synerpa). En temps normal, le taux d’occupation moyen d’un Ehpad est de 98 %.
Annabelle Vêques, directrice de la Fnadepa (Fédération nationale des associations de directeurs d’établissements et services pour personnes âgées), se montre moins alarmiste : « Il n’y a pas de préoccupation majeure. Cela reste un phénomène minoritaire et assez localisé. Mais nous avons tout de même besoin de le quantifier. C’est pourquoi j’ai demandé la semaine dernière à la ministre déléguée à l’autonomie, Brigitte Bourguignon, de lancer une enquête en ce sens par le biais de la CNSA [Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie]. »
« La confiance revient »
La situation s’améliore ces dernières semaines, essentiellement en raison de la vaccination massive des résidents. Si Bruno Ogeix a encore 12 lits disponibles, il indique avoir effectué « 19 entrées depuis le 12 mars ». A un rythme peu soutenu cependant : « Trois admissions par semaine car il s’agit avant tout de redonner confiance aux familles. Ce qui prend du temps. »
« Depuis un mois, on sent un vrai retour, confirme Aymeric Mathias. Les familles sont rassurées : a priori, il n’y aura plus jamais de fermeture totale des Ehpad. » « Les établissements reprennent pourcent par pourcent. Nous avons refranchi les 90 % d’occupation, mais nous ne sommes pas encore au niveau d’avant crise, analyse Florence Arnaiz-Maumé. Les Ehpad redeviennent attractifs. »
Ce qui a son importance car, comme le rappelle la déléguée générale du Synerpa, « pour être à l’équilibre, le taux d’occupation doit être très élevé, au-delà de 95 % ». Dit autrement, « en dessous de 95 %, chaque heure qui passe, un Ehpad perd de l’argent ».