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Un « Deuil numérique » pour les morts oubliés du Sénégal

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Photo d'illustration.

Crédit photo Confidence - stock.adobe.com
Société civile, associations et ONG multiplient les initiatives pour honorer la mémoire des Sénégalais disparus dans des embarcations de fortune, en route vers « l’eldorado » européen.

« Un avenir noyé dans les océans, le Sénégal pleure sa jeunesse », écrit un internaute sénégalais, au-dessus de la photographie d’une main anonyme sur le point d’être happée par les fonds marins. Depuis le 13 novembre dernier, des milliers de messages semblables inondent les réseaux sociaux en signe de « recueillement numérique ».

Une initiative lancée par Pape Demba Dione, un jeune de 28 ans révolté par le silence du gouvernement sénégalais du président Macky Sall, à l’heure où au moins 400 de ses concitoyens auraient péri dans l’océan Atlantique ces dernières semaines pour rejoindre en pirogue les îles Canaries et « l’eldorado » européen.

Depuis, les associations locales appuyées par des organisation non gouvernementale (ONG) occidentales, ayant relayé l’appel de Pape Demba Dione, maintiennent la pression sur les autorités politiques, accusées de minimiser le nombre réel des victimes.

La méthodologie du déni

A titre d’exemple, l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) a publié le 29 octobre dernier un bilan de 140 morts disparus en mer ce jour-là. Des informations qualifiées d’« infondées » par le ministère de l’Intérieur, lequel a évoqué le repêchage de « six corps et le sauvetage de 91 rescapés ».

Pour justifier ces écarts, le gouvernement sénégalais insiste sur une émigration irrégulière qui contourne les circuits officiels, et dont « l’ampleur statistique » ne peut s’établir « qu’à partir des données recueillies auprès de migrants qui arrivent sur les côtes des pays destinataires », insiste le ministère de la Jeunesse.

« Le gouvernement, ajoute le ministre secrétaire général du pouvoir en place, Abdou Latif Coulibaly, appelle à revenir à des proportions beaucoup plus objectives et plus réalistes pour parler de ces questions plutôt que de faire dans l’émotion. »

Une méthodologie qui prend la forme du déni et que conteste la société civile, qui répond par la publication de photographies des disparus diffusées par leurs proches, dont les témoignages se multiplient dans les journaux et télévisions privés.

Le samedi 21 novembre, des associations réunies au sein du collectif baptisé « 480 », en référence au nombre de migrants morts selon lui cette même semaine de la fin du mois d’octobre, ont entamé une marche silencieuse dans les rues de Dakar pour prolonger le « recueillement numérique », et appeler les citoyens à réagir. « 480, Dafa doy » (« 480, ça suffit ! »), pouvait-on lire sur les banderoles, tandis que les autorités promettent de renforcer les contrôles et la surveillance du littoral.

Le président Macky Sall a également annoncé la création d’un Conseil national pour l’insertion et l’emploi des jeunes, plus de huit ans après son élection et sa promesse, restée lettre morte, de créer un million d’emplois dans un pays où, les diplômes important peu, trouver un travail stable relève de la gageure.

Un effondrement sécuritaire

Si le Sénégal reste un îlot démocratique au milieu d’une Afrique de l’Ouest minée par la « guerre contre le terrorisme » et confrontée à un véritable effondrement sécuritaire, ses jeunes à la recherche d’un avenir meilleur en Europe n’ont d’autre choix que de risquer leur vie en traversant l’Atlantique sans papiers d’identité, ce qui rend d’autant plus difficile leur éventuelle identification en cas de naufrage.

Lorsqu’ils parviennent à fouler le sol européen, la plupart tente, afin de bénéficier du droit d’asile, de se faire passer pour des citoyens venus de Gambie, enclave autoritaire voire dictatoriale coincée entre le nord du Sénégal et le sud du pays, la Casamance.

Société

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