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La circulaire d'août 2012 est loin d'avoir réglé toutes les atteintes aux droits des Roms

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Malgré la circulaire d'août 2012 relative à l'anticipation et à l'accompagnement des opérations d'évacuation des campements illicites, en particulier occupés par des populations Roms, la situation reste insatisfaisante et les évacuations se poursuivent, constatent plusieurs rapports publiés mercredi 26 juin, et émanant d'une mission d'évaluation de l'application de cette circulaire, à laquelle participait notamment l'IGAS, du défenseur des droits et du collectif Romeurope.
Et ce le jour où la Commission européenne publiait une recommandation sur les Roms invitant "les Etats membres à intensifier leurs efforts pour intégrer ces communuautés".

Des disparités sur le terrain

A travers les 14 départements qu'elle a visités, la mission interministérielle chargée d'évaluer les dispositifs d'accompagnement des personnes dans les campements - et à laquelle ont participé des membres de l'inspection générale de l'administration (IGA), de l'inspection générale des affaires sociales (IGAS), du conseil général de l'environnement et du développement durable et de l'inspection générale de l'administration de l'Education nationale et de la recherche (IGAENR) - a en effet "constaté des disparités et des approches différentes de la question des populations Roms présentes sur le territoire".
Sur le terrain, "la plupart des acteurs, y compris ceux de l'Etat, estiment ne pas disposer d'une connaissance suffisante et d'outils opérationnels pour la prise en charge de ces populations", note d'ailleurs le rapport, rendu public par la DIHAL.

Une grande précarité

Et "les mesures prévues, notamment l'accès aux dispositifs de droit commun, se heurtent aux difficultés intrinsèques de personnes qui ont, souvent, besoin d'un temps pour se reconstruire et se structurer en raison de la vie passée dans les campements et en errance".
De fait, la situation de ces publics se caractérise par "une grande précarité et une faible compétence professionnelle pénalisante pour l'accès à l'emploi, lorsqu'ils souhaitent s'établir dans le pays d'accueil", qui les rapprochent de la situation des migrants originaires de pays tiers et non d'Etats de l'Union européenne. "Cette distorsion explique en partie l'inadaptation des dispositifs de droit commun et les besoins spécifiques notamment en matière de scolarité et de santé", mais encore faut-il en tenir compte.
A cet égard, "l'accès à ces droits est prioritaire", confirme la mission interministérielle, qui juge aussi que "la formation et la recherche d'un emploi nécessitent également un accompagnement fort", mais renvoie en aval la question de l'accès au logement, qui constitue certes un "sujet important", mais à régler une fois que "le parcours d'insertion est engagé".

Des outils à mettre en oeuvre

Certes "les collectivités territoriales ont lancé depuis une dizaine d'années des actions en ce sens", avec de nombreuses expérimentations en région parisienne ou en province, qui gagneraient cependant à ce que l'Etat et les collectivités locales renforcent leur partenariat en la matière "par un meilleur dialogue et par le recours à de nouveaux outils", y compris en termes de co-financement.
La mission plaide ainsi pour que différents outils territoriaux encadrent ces actions, à l'instar d'une "instance de type 'plate-forme régionale' réunissant les préfets et les collectivités territoriales pour permettre une meilleure concertation et des arbitrages sur l'accueil en fonction d'une recherche foncière sur des terrains disponibles".
Des plates-formes locales d'accueil, d'orientation et d'information pourraient aussi être mises en place, par des associations ou d'autres opérateurs, "pour identifier et recenser les populations concernées, tout en permettant un accès plus satisfaisant aux dispositifs de droit commun".
Autre élément indispensable aux yeux des rapporteurs de la mission, il faut mutualiser et professionnaliser les diagnostics en vue de l'identification des personnes ayant un projet de vie en France et pouvant être prises en charge dans une file d'insertion. Un contrat de type "accueil et intégration" pourrait enfin "être mis en place pour les populations Roms dans le cadre d'un appui à un projet de vie en France validé et accompagné par les organisations d'insertion compétentes sur le terrain".

Une application hétérogène

Pour le défenseur des droits, Dominique Baudis, qui a réalisé un travail assez voisin de suivi de l'action menée par l'Etat, et qui formule de nombreuses recommandations au fil de son rapport, la circulaire du 26 août 2012 est "insuffisamment appliquée".
Depuis son adoption, elle "n'a pas systématiquement été mise en oeuvre sur le territoire et dans les cas où elle a été suivi, elle a été appliquée de manière insuffisante et hétérogène", souligne-t-il dans son rapport, qui fait d'ailleurs référence au bilan d'étape dressé récemment par le préfet Alain Régnier, délégué interministériel pour l'hébergement et l'accès au logement (DIHAL), mais aussi à la mission confiée à plusieurs inspections générales et à ses "propositions visant à renforcer l'efficacité des dispositifs".
Le défenseur des droits relève pour sa part "les difficultés rencontrées par certains départements où se sont installés un nombre élevé de campements illicites" et "constate la situation des collectivités locales qui n'ont pas la capacité de trouver des solutions d'hébergement provisoires et/ou pérennes à toutes les personnes expulsées des campements et de mettre en place un dispositif d'accompagnement en vue de leur garantir l'accès au logement et à l'emploi".
Il met aussi l'accent sur le fait que les populations visées sont constituées de ressortissants communautaires, et que ce débat mériterait d'être véritablement au niveau de l'Union européenne.

Un "nomadisme forcé" préjudiciable

Il déplore par ailleurs que "les enquêtes d'opinion démontrent une hostilité certaine à l'égard de ces populations", qui sont cependant confrontées à une accumulation de "handicaps" sociaux, administratifs et juridiques (quasi-impossibilité à accéder au marché du travail, refus illégaux et discriminatoires d'accès à la scolarisation et aux soins, instabilité des lieux de vie du fait des expulsions des terrains occupés et du territoire national...), qui les place dans une véritable impasse, avec des conséquences majeures en matière de santé, s'inquiète notamment le rapport de Dominique Baudis.
Enfin, "bien que sensible aux arguments du gouvernement et des élus quant à l'impossibilité de laisser perdurer des situations de fait inacceptables du point de vue de la loi et des nécessités de l'ordre public", le défenseur des droits "dénonce fermement le 'nomadisme forcé' qui résulte des pratiques trop fréquemment observées sur le territoire national, situation qui ne fait que déplacer le problème géographiquement et précariser davantage la situation de ces familles, brisant ainsi toute perspective d'intégration sociale".

Bilan d'application de la circulaire interministérielle du 26 août 2012 relative à l'anticipation et à l'accompagnement des opérations d'évacuation des campements illicites, rapport du défenseur des droits, en ligne sur son site.

A.S.

Société

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