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Pas-de-Calais : la distribution de repas aux migrants remise en cause, des ONG saisissent la justice

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Crédit photo Creative Commons
La semaine dernière, la préfecture du Pas-de-Calais a publié un arrêté interdisant la distribution de repas aux migrants dans certaines rues de Calais par les associations non mandatées par l’Etat. Cette décision a vivement fait réagir les associations, qui contestent les raisons invoquées par la préfecture et forment un recours en justice.

« La localisation des dispositifs humanitaires doit être et rester localisée à l’extérieur du centre-ville, dans des lieux suffisamment éloignés des secteurs habités », affirme la préfecture du Pas-de-Calais dans un communiqué de presse relatif à un arrêté entré en vigueur vendredi 11 septembre.

Le texte, qui a suscité une vive polémique depuis sa publication, interdit la distribution gratuite de boissons et denrées alimentaires par les structures non mandatées par l’Etat dans une vingtaine de rues et de quais du centre-ville de Calais. L’association La Vie active, seul opérateur du gouvernement, assure actuellement deux distributions quotidiennes sur des sites situés à l’extérieur de l’hypercentre.

« Le principe de fraternité bafoué »

Pour Juliette Delaplace, chargée de mission « migrants » pour le Secours catholique, à Calais, les autorités ont franchi une « ligne rouge » avec cette interdiction. « Le principe de fraternité, reconnu à valeur constitutionnelle est complètement bafoué, s’indigne-t-elle. Très concrètement, cette fraternité se traduit par le fait de donner à manger aux personnes qui en ont besoin là où elles se trouvent. »

Or, si ces derniers mois les associations ont ciblé leurs missions dans les zones du centre-ville, c’est, expliquent-elles, pour suivre les populations migrantes. « Les réfugiés y sont venus depuis les expulsions massives de juillet dernier en zone industrielle des Dunes. Ils ont rejoint le centre-ville pour chercher un abri et nous les avons suivis », rapporte François Guennoc, vice-président de l’Auberge des migrants.

Risques épidémiologiques…  

Dans le détail, la préfecture explique avoir pris cet arrêté, applicable jusqu’au 30 septembre prochain, au regard des risques épidémiologiques. « La multiplication de ces lieux de distribution entraîne des regroupements sans mesures de distanciation sociale », détaille le communiqué. Un argument contesté par François Guennoc. 

« Le manque de distanciation sociale est tout autant valable pour les distributions de l’Etat. Lorsqu’il y a une file d’attente, les gens sont immanquablement les uns derrière les autres. » Autre raison invoquée par les autorités : les troubles à l’ordre public générés par ces distributions. Selon la préfecture, le 24 août, une centaine de migrants présents à proximité de la gare ont fait preuve d’une « attitude hostile et conflictuelle » envers les forces de l’ordre. 

… Et troubles de l’ordre public

L’arrêté fait également mention des déchets laissés sur place à la suite des distributions de repas par les structures non mandatées. « Cette accusation est fausse, soutient de son côté François Guennoc. Nous nettoyons systématiquement après notre passage. Nous avons même mis en place une équipe qui passe quelques heures après la fin des repas et une autre le lendemain matin pour vérifier qu’aucun déchet ne traîne. » Juliette Delaplace corrobore : « Les associations organisent elles-mêmes le ramassage des déchets, alors qu’il s’agit initialement d’une mission de la mairie. »

 

Par-dessus tout, les structures dénoncent les moyens insuffisants déployés par l’Etat et réaffirment la nécessité de leur action. «Dans le contexte actuel de crise sanitaire, les personnes et associations qui viennent en aide aux exilés ont un rôle essentiel », déclare ainsi Cécile Coudriou,, présidente d’Amnesty International France dans un communiqué de presse regroupant notamment La Cimade et Médecins sans frontières.

 

Un recours en justice 

Si l’arrêté fait mention de 1 400 repas distribués quotidiennement par La Vie active en août 2020, et de 2 000 en septembre, cela reste bien en deçà des besoins des populations migrantes, selon la chargée de mission du Secours catholique. « Il y a entre 1 200 et 1 500 personnes en exil à Calais, pointe Juliette Delaplace. Tous les jours, dans notre accueil, nous rencontrons des personnes qui n’ont pas mangé depuis 24 ou 48 heures. » La problématique est la même, selon elle, en ce qui concerne les points d’eau mis à disposition des exilés.

En moyenne, 156 passages quotidiens ont été enregistrés par les autorités sur les 28 douches accessibles 5 jours par semaine par « navette mise à disposition des personnes qui le souhaitent », rapporte l’arrêté. « La encore, c’est bien trop peu en comparaison du nombre d’exilés présents à Calais », déplore Juliette Delaplace.

Douze ONG et associations ont saisi, mercredi 16 septembre, le tribunal administratif de Lille pour demander la « suspension immédiate » de cet arrêté préfectoral. « Nous pouvons espérer trouver un juge qui établira que cet arrêté est contraire au principe de fraternité », estime François Guennoc.

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