Actualités sociales hebdomadaires : Pourquoi cette fusion, qui s’inscrit dans le cadre de la loi « transformation de la fonction publique », est-elle problématique ?
William Moncel : Le principal point de tension est le passage d’un seuil aujourd’hui fixé à 50 agents, pour la mise en place d’un CHSCT [comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail], à un seuil de 200 agents pour la mise en place obligatoire de la commission spécialisée, qui doit être l’équivalent de l’actuel CHSCT. Un directeur qui ne voudra pas mettre en place de commission spécialisée, rien ne l’obligera à le faire en dessous de 200 agents. Cela va relever des CSE [comités sociaux d’établissement] avec en filigrane moins de temps de délégation et de temps pour effectuer de la prévention par exemple. Les représentants du personnel vont être privés de moyens pour défendre réellement les employés.
Cela va impacter les deux tiers des établissements, si l’on se fie aux chiffres donnés par la DGOS. Parmi les 2 208 structures qui ont été répertoriées, seules 747 sont des entités légales d’employeurs de plus de 200 agents. Les établissements du social et du médico-social vont être les plus touchés, car il s’agit des plus petites structures. On dénombre 1 318 établissements publics et médico-sociaux, dont seulement 95 de plus de 200 agents. La DGOS a été appelée à négocier sur ce seuil, mais ne l’a jamais fait. Il y a eu une fermeture totale de dialogue. Il s’agit d’un recul social important.
ASH : Est-ce pour cela que vendredi 25 juin les organisations syndicales ont décidé de quitter le Conseil supérieur de la FPH, dont l’ordre du jour était le projet de décret concernant les comités sociaux d’établissement ?
W. M. : Oui, nous avons quitté la réunion car il y a eu un refus de négociation sur ce seuil, lors des groupes de travail et de la commission des statuts. Le deuxième point de tension a concerné la procédure d’expertise. Actuellement, le CHSCT peut mandater un expert extérieur lorsqu’il est en désaccord avec le directeur d’établissement sur un sujet. Si le directeur est farouchement opposé à cette procédure, il saisit le tribunal de grande instance.
Aujourd’hui, quand les organisations syndicales demandent une expertise, le directeur peut s'y opposer. En cas de désaccord, l’inspecteur du travail peut être saisi. Il rendra alors un rapport auquel le directeur devra répondre. Ensuite, si les organisations contestent le refus d’expertise, elles devront saisir le tribunal administratif. Soit c’est l’organisation qui effectue cette saisie, soit c’est le membre de la commission spécialisée en son nom propre. Pour résumer, les élus devront, en leur nom, entamer une procédure contre leur établissement. Sans compter que, s’ils veulent être assistés d’un avocat, ils devront engager les frais sur leurs propres deniers. Nous avons proposé des solutions intermédiaires sur cette question d’expertise mais, là encore, nous nous sommes heurtés à une administration complètement fermée.
ASH : Quelles sont vos actions à venir ?
W. M. : Face à un ministère qui refuse tout dialogue social, il est prévu de saisir le Premier ministre. Cela fait déjà plusieurs mois qu’il y a une absence de négociation. Tous les sophismes de France et de Navarre sont employés pour ne pas apporter de réponses factuelles aux questions posées. Il y a un semblant d’écoute, mais in fine les décisions restent unilatérales. Pourtant, alors que nous sortons d’une période de crise, l’utilité des CHSCT a été démontrée.
Sur le point du seuil du nombre d'agents, la première réponse apportée était qu’il s’agissait d’un problème d’inter-versants. Autrement dit, que le seuil de 200 était imposé par la ministre de la Transformation et de la Fonction publiques dans les trois versants : fonction publique territoriale, fonction publique de l’Etat et fonction publique hospitalière (FPH). Ce à quoi la ministre a officiellement expliqué qu’elle n’était pas opposée à un seuil différent dans la FPH au regard de ses spécificités. La DGOS nous a ensuite simplement répondu que les CHSCT n’avaient pas à donner la preuve de leur pertinence dans la diminution des risques d’accidents du travail et de maladies professionnelles.