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Audrey Adam, le deuil et la nation (éditorial)

Hommage minute de silence

Photo d'illustration

Crédit photo Creative Commons
L'éditorial de la rédaction des ASH revient cette semaine sur le décès tragique d'Audrey Adam, une conseillère en économie sociale et familiale (CESF) de 36 ans, tuée dans l'exercice de ses fonctions par un homme de 83 ans. 

Les deuils collectifs d’une nation en disent autant, sinon davantage, que ses joies unanimes. Celui réservé à la mort d’un policier tué à Avignon le 5 mai dernier, alors qu’il effectuait un contrôle sur un lieu de deal, était nécessaire. Tout comme peuvent l’être ceux concernant d’autres membres des forces de sécurité décédés dans des conditions similaires.

Et tout comme aurait dû l’être l’hommage qu’aurait mérité Audrey Adam, une travailleuse sociale âgée de 36 ans qui exerçait dans le département de l’Aube. La jeune femme a été abattue par un octogénaire auquel elle rendait régulièrement visite. Visiblement déboussolé, le meurtrier présumé a probablement retourné l’arme contre lui pour mettre fin à ses jours, selon les constatations du GIGN.

Le silence de l’Etat sur ce drame traduit la considération accordée par les gouvernants nationaux aux travailleurs sociaux et médico-sociaux. Il démontre le peu de compréhension de leurs missions, de leur rôle crucial dans ce qui nous permet de faire société. Ce mutisme est aussi le symptôme d’une incapacité à comprendre les émiettements sociétaux actuels qui se nourrissent voracement d’un accroissement massif de la pauvreté, d’une perte de repères collectifs, de l’isolement individuel, de la segmentation des luttes… Des phénomènes amplifiés par l’actuelle situation sanitaire.

Ces schismes engendrent une violence sourde, enracinée, qui parfois explose. Le meurtre d’Audrey Adam en atteste. Tout comme celui, en février dernier, du responsable d’un centre d’accueil pour demandeurs d’asile des Pyrénées-Atlantiques. Ou encore celui d’une psychologue d’Annecy, tuée en août 2020 alors qu’elle était sur le point de signaler une agression sexuelle sur mineur. Ces actes définitifs ne sont que les arbres décharnés qui cachent une forêt de violences, plus ou moins fortes, plus ou moins tolérées. Mais qui s’exercent chaque jour davantage sur les travailleurs sociaux. Les faibles moyens dont ceux-ci disposent dégradent la qualité de leurs interventions. Face à une prise en charge déficiente, les publics accompagnés ont de plus en plus tendance à réagir violemment. Et c’est ainsi que le piège se referme, que les professionnels sont happés par un engrenage mortifère.

La question de la sécurité des travailleurs sociaux mérite d’être posée. Mais la réponse ne peut être que sociétale. Instrumentaliser ces morts à des fins électoralistes alors que la tendance est au « tout-sécuritaire » constituerait une triple faute. Cela reviendrait à nier l’essence même du travail de ces victimes, contribuerait de facto à renforcer la violence de certains bénéficiaires et trahirait la nature de l’intervention sociale à la française.

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