Madame, Monsieur,
J’ai choisi de m’adresser personnellement à vous – bénévoles et professionnels des associations des solidarités et de la santé, personnes accueillies ou accompagnées, aidants – qui pensez voter pour le Rassemblement national les 30 juin et 7 juillet prochains.
Cette lettre est une démarche personnelle car, finalement, au-delà des mobilisations collectives auxquelles s’associe l’Union que je préside, le vote est avant tout un acte personnel. Il est celui d’une citoyenne ou d’un citoyen qui participe à choisir l’avenir de notre pays et qui a la chance de pouvoir le faire là où cette liberté a été conquise par les générations qui nous ont précédés.
Autant vous le dire d’emblée, de toutes mes forces et depuis toujours, je combats l’extrême-droite, ses idées, ses valeurs, les dangers qu’elle porte pour notre société et pour l’avenir de nos proches, les miens et les vôtres aussi.
Mais, je ne peux être naïf au point de penser que les près de 40 % de suffrages recueillis par l’extrême-droite lors du dernier scrutin ne se retrouvent pas aussi parmi celles et ceux qui font des solidarités leur engagement bénévole ou professionnel, et parmi les personnes accompagnées et leurs proches. Alors disons-nous les choses franchement.
En France, des citoyens sont attaqués dans leur chair et leur intégrité pour ce qu’ils sont, par des paroles et des actes racistes, antisémites ou homophobes, certains allant jusqu’aux pires des atrocités.
Aujourd’hui, la dissolution de l’Assemblée nationale fait entrer notre pays dans un moment de risques et d’incertitudes. Les prochaines élections législatives sont le réceptacle de toutes les insatisfactions exprimées ces dernières années concernant le pouvoir d’achat, l’accès à la santé et au logement, les réponses aux besoins d’accompagnement lorsque des vulnérabilités de l’existence surviennent, le besoin de sécurité pour son existence quotidienne, le manque d’assurance de pouvoir se projeter, pour soi-même et ses enfants, en espérant un progrès.
Je vous le dis le plus sincèrement possible : le sentiment d’avoir tout essayé sauf de se jeter dans l’abîme et d’y plonger soi-même n’a jamais sauvé personne.
Et aucun ripolinage de façade ne change le fond du projet porté par le Rassemblement national : une fracturation profonde de la société française qui repose sur l’opposition des uns contre les autres. Cela nous affaiblirait toutes et tous : pour faire face aux multiples enjeux de nos vies individuelles comme de l’avenir du pays, la solidarité n’est pas un but, mais un moyen. Le moyen d’une société solide, car solidaire.
Si d’évidence notre démocratie a besoin de se renouveler pour être plus à l’écoute des besoins qui s’expriment, le basculement de notre pays aux mains de l’extrême-droite nous changerait de nature. La France ne serait plus le pays des Lumières et de la Révolution française, celui porteur de la liberté, de l’égalité et de la fraternité, ici et dans le monde, celui qui se rassemble grâce à une laïcité à préserver, celui qui se construit par l’association de citoyennes et de citoyens égaux en droits et unis vers un destin commun.
Je suis persuadé que ces élections peuvent permettre de favoriser des politiques publiques qui reposent sur la primauté de l’humain, les droits fondamentaux des personnes et l’accueil inconditionnel, quels que soient les territoires et les situations sociales.
Vous comme moi disposons d’un outil que notre force commune peut rendre déterminant : le vote. Chaque voix compte et, dans chaque territoire, il y a bien heureusement plusieurs candidatures autres que celle de l’extrême-droite pour permettre de vous exprimer.
Aussi, je fais appel à ce qu’il y a de plus profond en vous, votre conception de la vie humaine et ce qui fait que vous portez, tout comme moi, la fierté d’être français pour ce que notre pays représente dans le monde. Il y a des actes dans la vie, particulièrement pendant les périodes troublées, qui marquent à jamais.
« Une démocratie doit être une fraternité, ou bien c’est une imposture » écrivait Antoine de Saint‑Exupéry. Il nous revient, à chacune et à chacun, de ne pas être les imposteurs de notre histoire commune.
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