Chaque année, environ 150 adultes en situation de handicap sont contraints de quitter les Hauts-de-France pour bénéficier en Belgique d’un accompagnement médico-social qu’ils ne trouvent pas en France. Pour prévenir ces départs, l’agence régionale de santé (ARS) a lancé, en 2021, un appel à manifestation d’intérêt afin de financer des solutions alternatives d’accompagnement de ce public. Parmi les candidatures retenues, celle de La Gerlotte, maison d’accueil spécialisée (MAS) située à Marcq-en-Barœul dans le Nord. Cet établissement géré par le Groupement des associations partenaires d’action sociale (Gapas), qui accueille habituellement 38 personnes de plus de 18 ans en situation de polyhandicap, propose, depuis le printemps 2022, un dispositif de MAS hors les murs.
« Il s’agit d’une nouvelle modalité d’accompagnement souple et modulable, destinée à tout adulte en situation de handicap bénéficiant d’une notification en MAS. Mais nous prenons prioritairement les personnes sans solution et les jeunes adultes maintenus dans des établissements et services du secteur de l’enfance au titre de l’amendement “Creton” »(1), détaille Thomas Routier, le directeur. L’équipe pluridisciplinaire est composée de quatre accompagnants éducatifs et sociaux, une aide médico-psychologique, 1,5 équivalent temps plein d’infirmier et une éducatrice spécialisée, auxquels s’ajoutent, une fois par semaine, un ergothérapeute, un psychologue et une psychomotricienne. Dans un rayon de 10 km autour de Marcq-en-Barœul, ces professionnels interviennent au domicile des usagers et proposent une prise en charge personnalisée. Ce qui n’est pas toujours simple. « Auparavant, la plupart des personnes étaient en établissement. Elles avaient l’habitude d’un “scénario dessiné” pour elles, avec des horaires à respecter. Désormais, elles doivent “dessiner” elles-mêmes leurs besoins et apprendre à les identifier, explique Marie-Cécile Legrand, éducatrice spécialisée. Cette nouvelle approche demande aussi aux familles de revoir leur organisation et leurs priorités. Elles apprennent, par exemple, à déléguer, à s’accorder du temps. »
Pas de reste à charge pour l’usager
En fonction des besoins des bénéficiaires, évalués lors de l’admission, trois forfaits d’accompagnement sont possibles. « Ils s’étalent jusqu’à 6 jours sur 7 avec une amplitude pouvant aller de 7 h à 21 h. Des prestations de nuit avec garde itinérante ou nuit complète de présence à domicile sont également proposées », précise Thomas Routier. Une prise en charge sur mesure qui a un coût : 75 000 € par personne, intégralement financés par l’ARS. Donc sans reste à charge pour l’usager. A ce jour, La Gerlotte épaule quatre personnes sur les sept prévues au départ, les trois dernières devrant être intégrées d’ici la fin de l’année. Le temps que les professionnels s’adaptent. Se rendre chez les personnes n’équivaut pas, en effet, à un travail en institution. « A domicile, nous sommes dans la débrouille, dans le bricolage. Il faut réagir vite, appuie Anne-Sophie Dorp, accompagnante médico-sociale. Par exemple, je suis arrivée début août chez un bénéficiaire qui n’avait même pas de fauteuil roulant. Il y avait donc urgence. Les familles ont besoin de solutions quasi immédiates. Elles sont en souffrance à force de trop attendre. »
(1) Adopté en 1989, l’amendement « Creton » est une mesure dérogatoire qui permet de maintenir les enfants de plus de 20 ans en établissements médico-éducatifs.
