C’est sur un vaste site, qui s’étend sur les 370 hectares de terre et de lagunes de la presqu’île de Maguelone (Hérault), que Les Compagnons de Maguelone ont élu domicile. L’association, qui gère cinq structures médico-sociales, trois foyers d’hébergement ainsi qu’un Esat de 84 places et sa section annexe à Palavas-les-Flots et Villeneuve-lès-Maguelone, accompagne 120 personnes en situation de handicap. Un dispositif réparti sur quatre communes qui complique les déplacements, surtout quand les transports publics manquent. « Le permis de conduire est un sésame pour la liberté », s’enthousiasme Nathalie Ammour, éducatrice spécialisée au Foyer logement éclaté (FLE) et cheville ouvrière de l’initiative « En route pour l’autonomie », visant à faciliter l’accès au permis de conduire des personnes handicapées. C’est d’ailleurs d’elles qu’émane la demande. En témoigne Vanessa, qui souhaite gagner en indépendance : « Je veux passer le permis pour bouger quand je veux, aller faire mes courses, voyager ou voir des amis ».
L’expérimentation a exigé deux années de préparation, principalement pour la recherche de subventions. Finalement, la solution est venue du compte personnel de formation (CPF) créé en 2015. « Comme n’importe quel salarié, les personnes travaillant en Esat ont droit à ce crédit renouvelable. Nous avons eu l’idée de l’utiliser pour financer la formation », précise Maguelonne Arghyris, responsable communication des Compagnons et éducatrice spécialisée. L’opération a été validée par la direction de l’Esat qui a accepté que les bénéficiaires prennent des leçons sur leur temps de travail. Elle a également pris en charge l’achat de tablettes pour apprendre le code. « Les cours ont lieu dans une salle de la presqu’île, que le régisseur de l’association, lui-même en situation de handicap, prépare. C’est une véritable chaîne », souligne Nathalie Ammour.
Une auto-école adaptée
Pour que les personnes handicapées puissent jouir d’une attention et d’une pédagogie particulières, une auto-école sous statut associatif, Clé de route, ayant l’habitude des prises en charge spécifiques, a été sollicitée. « L’objectif est d’adapter les méthodes d’apprentissage pour ne pas mettre les bénéficiaires en échec. Leur parcours est forcément plus compliqué et plus long que celui d’autres élèves », pointe l’éducatrice. Concrètement, chaque candidat doit s’engager dans le dispositif « En route vers l’autonomie » trois heures par semaine. Une heure est vouée à la conduite sur le site. L’enseignante, Michelle Lornier, adapte le cours à chaque profil. « Il s’agit d’expliciter un mot de vocabulaire ou de l’énoncer autrement », commente-t-elle. Un éducateur consacre une autre heure à ce qui n’a pas été compris. Un troisième temps sert à la révision des cours sur les tablettes numériques.
Après avoir passé des tests avec un psychologue agréé par la sécurité routière et rencontré un médecin, 16 résidents sont actuellement candidats au permis. Il est trop tôt pour savoir s’ils vont réussir. Mais selon Nathalie Ammour, « ce permis va favoriser leur ouverture au monde ». Pour plusieurs bénéficiaires dont Maylis, Manon ou Adrien, il s’agit surtout « de ne plus dépendre des autres ».
