Dans « Les fossoyeurs », publié ce mercredi 26 janvier chez Fayard, et dont Le Monde a publié lundi les bonnes feuilles, le journaliste indépendant Victor Castanet décrit un système où la prise en charge des résidents est « rationnée » à tous les niveaux, malgré le prix élevé des chambres (environ 6 500 € par mois) afin d’améliorer la rentabilité du groupe privé d'Ehpad (établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes).
Face au scandale engendré par ces révélations, Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l’autonomie, annonce, ce jeudi 27 janvier, convoquer le directeur général du groupe le mardi 1er février afin de « faire toute la lumière sur les pratiques et dysfonctionnements qui y sont dénoncés ». Dans un courrier adressé au directeur, elle indique que de tels faits, s'ils sont avérés, « jettent l'opprobre sur un secteur et des professionnels qui sont engagés au quotidien au service des aînés ».
Ce mercredi 26 janvier, sur RMC, la ministre avait aussi annoncé le lancement d’une « enquête flash ». « Si ces faits sont avérés, ils sont extrêmement graves et nous les condamnons, assure-t-elle. Quand on a ce type de témoignages ça vous remue, c’est une évidence. Il ne faut pas que ça perdure. »
Brigitte Bourguignon prévient, néanmoins, du risque « d'Ehpad bashing » généralisé et assure que des contrôles sur des situations déjà signalées en 2018 ont été efffectués. Elle se réserve, avec Olivier Véran, ministre des Solidarités et de la Santé, « la possibilité d’une enquête indépendante de l’Igas [inspection générale des affaires sociales] sur ces faits s’ils sont avérés ». Pour cause, les Ehpad privés reçoivent des subventions de l'Etat et des départements.
Je veux m’assurer que les faits dénoncés dans « Les fossoyeurs » ne relèvent pas d’un système organisé par Orpea. Rogner sur la qualité par souci de rentabilité serait très préjudiciable.
C’est pourquoi je travaillerai en toute transparence avec l’ensemble des parties prenantes. pic.twitter.com/2srSnZIADl
— Brigitte Bourguignon (@BrigBourguignon) January 26, 2022
Dans un communiqué diffusé le 24 janvier, le groupe Orpea estime que « les éléments, polémiques et agressifs, montrent une volonté manifeste de nuire » et conteste « formellement l'ensemble de ces accusations [qu'il considère] comme mensongères, outrageantes et préjudiciables ». L'enquête d'investigation de Victor Castanet n'est pas la première du genre. Déjà en 2018, le magazine Envoyé spécial de France 2 avait révélé le « business » des Ehpad privés. Selon la journaliste Elise Lucet, le groupe Orpea avait, à l'époque, tenté d'interdire la diffusion du documentaire. Dans son livre, Victor Castanet affirme aussi avoir subi des pressions pour le dissuader d’aller au bout de son enquête, et s'être vu proposer la modique somme de « 15 millions d'euros » pour acheter son silence.
Ehpad : « Le personnel soignant est obligé d'être maltraitant car il fait face à un système violent de réduction des coûts mis en place par Orpea. On m'a proposé 15 millions d'euros pour que je ne publie pas mon enquête. »@VictorCastanet dans le 5/5 de @MattBelliard.#CàVous pic.twitter.com/rABMvWF80r
— C à vous (@cavousf5) January 25, 2022