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« On ne veut pas d’ubérisation des services à la personne »

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Frank Nataf, président de la Fédésap : « La population française ne perçoit pas le niveau d’engagement et de souffrance qu’endurent les chefs d’entreprises comme les dirigeants associatifs dans les services à domicile. »

Frank Nataf, le président de la Fédésap, accueille plutôt favorablement le nouveau cahier des charges des services à la personne. Mais réaffirme aussi son opposition aux plateformes numériques à bas coût.

Fin des « barrières d'accès », assouplissement de la condition d’activité exclusive et vérifications des antécédents du candidat à l'embauche… Les évolutions du nouveau cahier des charges du secteur de l’aide à la personne ont été confirmées par Olivia Grégoire, la ministre déléguée aux PME, au commerce et à l’artisanat, lors du Salon des services à la personne et de l’emploi à domicile, le 28 novembre 2023. Le même jour, un arrêté spécifiant ces mesures, était publié au Journal officiel. Réactions du président de la Fédération française des services à la personne et de proximité (Fédésap), Frank Nataf.

ASH : Certaines mesures contenues dans le nouveau cahier des charges vont dans le sens d’un contrôle plus strict, notamment concernant les antécédents judiciaires pour obtenir l’agrément. Comment réagissez-vous à cette évolution ?

Frank Nataf : Les mesures annoncées sont à la fois plus strictes et moins strictes puisqu’il n’y a plus d’obligation d’avoir de local mais que, à contrario, il y a obligation de réaliser les entretiens en présentiel, ce que nous demandions. Quand on est sur une logique de renforcer la qualité et la sécurité pour les usagers, on ne peut que s’en réjouir. Après, il y a toujours un équilibre à trouver entre faire une usine à gaz inapplicable sur le terrain – ce qui ne sera pas forcément le cas – et trouver un dispositif de régulation pour éviter que n’importe qui pratique des interventions, en particulier auprès des publics fragiles. On attend de voir très concrètement comment cela va se mettre en œuvre. Est-ce que ça va être simple à appliquer ? Nous verrons si c’est extrêmement restrictif ou si, au contraire, le dispositif laisse une place à l’imagination et à l’innovation.

Les micro-entrepreneurs et entreprises de moins de 10 salariés exerçant dans l’aide à la personne à titre principal pourront désormais proposer une autre activité en complément. Comment accueillez-vous cet assouplissement de la condition d’activité exclusive ?

Sur cette notion de condition d’activité exclusive, cela fait plusieurs années que nous disons que, dans les services à la personne où les marges sont très serrées, il faut avoir la capacité de pouvoir exercer sans nécessairement démultiplier les structures juridiques. Car c’était ce qu'il se passait : il fallait créer une société à côté qui facturait ce qui ne rentrait pas dans l’agrément ou la déclaration. Cet assouplissement est donc plutôt une bonne mesure. Que cela s’applique aux auto-entrepreneurs aussi, c’est une mesure de justice.

Vous vous attendiez à plus ?

Nous attendions de la réforme qu’elle clarifie la situation sur les plateformes numériques. On ne veut pas d’Uber dans le secteur des services à la personne. On est sur des métiers qui sont profondément humains. Que les dispositifs digitaux permettent de faciliter, d’accord, c’est comme cela qu’on entrera dans le XXIe siècle. En revanche, on ne veut pas d’uberisation et de précarisation de nos salariés qui sont déjà soumis à des conditions difficiles.

La population française ne perçoit pas le niveau d’engagement et de souffrance qu’endurent les chefs d’entreprises comme les dirigeants associatifs dans les services à domicile. Là on est arrivé à un point extrêmement dur. Je n’ai jamais vu ça en 20 ans. On est sur un niveau de souffrance au travail, à tous les échelons de la chaîne. Je parle évidemment des intervenants qui subissent des fractionnements qui sont désastreux. Je parle aussi de l’encadrement intermédiaire qui est obligé de gérer les absences causées par ces fractionnements. Je parle enfin des dirigeants qui sont soumis à une pression et un degré de responsabilité énormes.

Vous avez été entendus ?

On a d’abord maintenu dans le nouveau cahier des charges une disposition qui était essentielle pour nous. On évolue dans un métier humain et il est inenvisageable pour nous de faire passer des entretiens en visio. La relation n'est pas la même quand on a quelqu’un en face de soi et quand on est devant un écran. Il faut que tous les entretiens, de recrutement comme d’encadrement, s'effectuent de façon physique, près du lieu d’embauche de la personne. Qu’on ne se retrouve pas avec des batteries de recruteurs dans des pays à bas coûts qui feraient passer des entretiens en visio pour aller travailler en France. Le risque était réel que des plateformes numériques puissent gérer leur vivier de candidats et transférer tout leur back office de recrutement et de sourcing dans des pays low cost. Ça, c’était juste hors de question.

Autre préoccupation, qui a été entendue : faut-il nécessairement des locaux pour exercer ces professions-là ? Et donc ajouter des charges... Pas nécessairement. Libre à chacun de s’organiser. D’occuper, par exemple, un co-working. Ce n’est pas la même chose que d’avoir un bail. De pouvoir exercer un certain nombre d’activités en home office, en télétravail. Il faut que cela soit permis et que l’on ne se retrouve pas hors la loi. La suppression de l’obligation d’avoir un local est donc arrivée et nous nous en réjouissons.

 

 

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