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Loi "bien vieillir" : "Accepter le statu quo, c’est tuer les services d’aide à domicile" (UNA)

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Vincent Vincentelli

Vincent Vincentelli est directeur du pôle politiques publiques à l’UNA. 

Crédit photo D. R.
Dix départements devaient tester, à partir du 1er janvier 2025, de nouvelles modalités de tarification pour les services autonomie à domicile (SAD). Faute de candidats, l’expérimentation est abandonnée. L’Union nationale de l’aide, des soins et des services à domicile (UNA) appelle à une réforme d’urgence.

Les départements avaient jusqu’au mois de novembre pour répondre à l’appel à manifestation d’intérêt de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA). Un seul candidat s’est manifesté : le département de l’Eure, qui selon les informations de l’UNA, ne remplissait pas tous les critères d’éligibilité. Une situation que déplore Vincent Vincentelli, directeur du pôle politiques publiques de la fédération.

ASH : Comment expliquez-vous l’abandon de l’expérimentation sur la tarification des SAD ?

Vincent Vincentelli : Je ne l’explique pas. Ou alors, les explications sont terribles. Nos services sont en très grandes difficultés financières. Les représentants des départements communiquent à l’envi sur leurs difficultés. Des rapports soulignent la paupérisation des services et de leurs salariés. Des bénéficiaires ne trouvent pas de services ou ne parviennent pas à les financer. Et le message envoyé aujourd’hui par les départements est : “On n’a pas besoin de réformer” le système financier.

En novembre 2024, aux Assises du domicile, Olivier Richefou (président de la commission Autonomie-Grand âge à l’association Départements de France et du département de Mayenne, ndlr) déclarait vouloir la compétence de l’aide mais aussi du soin à domicile. Si les départements veulent une compétence sans en assumer le coût, c’est un sujet de fond, à traiter. Et c’était le but de l’expérimentation : s’attaquer à un financement, qui, de l’avis de tous, ne fonctionne pas.

Cette expérimentation était-elle importante à vos yeux ?

Au départ, l’UNA, comme d’autres fédérations, n’était pas favorable à une expérimentation. On en a déjà fait en 2012, en 2019. Des rapports explorant les problèmes et les solutions ont été remis. Dernier en date, celui de l’Igas (Inspection générale des affaires sociales) en février 2024 sur “les défis de la politique domiciliaire”. L’UNA voulait une réforme, non pas une expérimentation.

Sauf que dans les faits, l’expérimentation se déroule de façon sauvage. La réforme se met en place en créant des services pour les riches. Des départements détarifient des services, cessent de financer l’avenant 43. Et nous propose de facturer le reste à charge aux personnes. Renvoyer le coût sur les usagers, ce n’est pas une solution. D’autant que lorsqu’un département est pauvre, sa population, en général, l’est aussi. Si on veut discuter des solutions, le signal donné n’est pas bon.

>>> A lire aussi : Un secteur au bord du précipice

Quels sont les enjeux de cette réforme ?

Ils sont très simples : garantir la pérennité économique des services, l’attractivité et les conditions de travail des intervenants, et l’accessibilité financière des bénéficiaires à leurs droits. Aujourd’hui, l’universalité n’existe pas. Des personnes ne trouvent pas de services ni d’intervenants, ou quand elles en trouvent, elles ne peuvent pas payer. Le gouvernement doit créer les conditions économiques de cette réforme. Sur le terrain, des résistances perdurent. Certaines structures de l’aide à domicile ont du mal à se rapprocher des services de soins infirmiers à domicile (Ssiad), et inversement, parce que le modèle économique de ces services n’existe pas. La question politique – et centrale –, depuis la loi Borloo de 2005, c’est celle du reste à charge… Ce que rejette le secteur non lucratif.

Avec les SAD, pour filer la métaphore automobile, on a créé la carrosserie des services. On attend de créer le moteur, financier, pour réaliser les ambitions de ces services à domicile. Et il faut également le carburant : la branche autonomie doit jouer son rôle. Avec cette question : combien coûte réellement le service, et combien la branche est prête à apporter.

>>> A lire aussi : Pourquoi est-il nécessaire de faire le choix de la tarification des SAD

Qu’en est-il de l’enquête des coûts annoncée parallèlement à l’expérimentation ?

Malgré l’abandon de l’expérimentation, cette enquête est maintenue. Elle sera lancée auprès de 500 services. Nous la soutenons. L’APA (allocation personnalisée d'autonomie) existe depuis 2001 mais on ne sait pas précisément à quoi sert cet argent (à l’aide à la toilette, au repas, etc.) et quel est le contenu des plans d’aide. Cette enquête permettra d’objectiver ce que coûte un service de qualité aux personnes mais aussi la nature des prestations proposées.

Quel avenir pour les structures en attendant la réforme ?

Les SAAD (services d'aide et d'accompagnement à domicile) et Spasad (services polyvalents d’aide et de soins à domicile) ont jusqu’au 30 juin 2025 pour se mettre en conformité avec le cahier des charges des SAD. Les Ssiad devront, eux, avoir développé l’activité d’aide, ou avoir fusionné, ou s’être regroupé avec un SAD d’ici au 31 décembre 2025. Il y a donc urgence à mettre en place la tarification. Sinon, les structures vont avoir tendance à considérer que c’est trop compliqué, qu’elles n’ont pas les ressources et laisserons tomber la réforme. On acte ainsi l’abandon des services à domicile. Accepter le statu quo, c’est tuer ces services.

>>> Sur le même sujet : La chaotique réforme des services à domicile

Qu’allez-vous faire en tant que fédération ?

On va continuer nos actions et nos plaidoyers auprès du gouvernement pour faire entendre la nécessité d’un arbitrage politique. Non pas pour demain, mais déjà pour hier. Le seul motif d’espoir réside dans les déclarations du Premier ministre. En 2024, les gouvernements s’étaient succédé, sans que le secteur des personnes âgées ne soit réellement mentionné. François Bayrou est le premier à porter une attention au handicap et au grand âge, citant le maintien à domicile dans son discours de politique générale. C’est une source d’espoir. 

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